Sénégal
Hommage de rattrapage pour Senghor
L’Académie française a rendu hommage à Léopold Sédar Senghor, décédé le 20 décembre 2001, à Servon, petite commune de Normandie où il s’était retiré. La journée du 29 janvier lui était consacrée pour l’évocation de sa mémoire, ponctuée par une messe dite en l’église Saint-Germain-des-prés, paroisse de l’académie française, en plein cœur du quartier latin de Paris.
La visite du président sénégalais Abdoulaye Wade du Sénégal à Paris, a été une fois de plus l’occasion d’évoquer la mémoire du président défunt, dont les obsèques ont été célébrées à Dakar, le 29 décembre dernier. Après avoir parlé du «Nepad», Nouveau partenariat pour le développement en Afrique, les personnalités françaises, sénégalaises et africaines, invitées à l’Elysée ont engagé des discussions à bâtons rompus autour de la mémoire de l’ancien président défunt. Senghor était sur toutes les lèvres. Le nègre, le poète, le politicien, l’agrégé de grammaire, le professeur de grec et de latin, l’académicien tatillon sur le parler juste, le socialiste néanmoins ami de Georges Pompidou, l’humaniste, bref tous les invités parlaient du «Senghor» qui les a marqués. Pour clôturer cette journée, l’Académie française avait également demandé une messe, à laquelle les plus hautes personnalités de l’Etat se sont invitées, mais en l’absence d’Abdoulaye Wade, représenté par son épouse. L’ancien président du Sénégal Abdou Diouf et son épouse étaient présents en compagnie des membres de la famille de Senghor.
Lors des obsèques de Léopold Sédar Senghor, du 29 décembre 2001 à Dakar, les absences du président Jacques Chirac et du Premier ministre Lionel Jospin ont été sévèrement soulignées. La présence de Raymond Forni, président de l’Assemblée nationale française et de Charles Josselin, ministre délégué chargé de la coopération, représentant la République n’a pas convaincu les observateurs politiques et nombre d’Africains de l’intérêt que la France accordait à cet événement et à cet illustre serviteur disparu. La présence des deux têtes de l’exécutif français prenait d’un coup une valeur de rachat. Jacques Chirac, ne donnant aucune explication sur son absence à Dakar, refusait par ailleurs qu’on assimile son acte à un quelconque «rattrapage».
Le rattrapage politique
Mais le bref discours qu’il a prononcé au terme d’une messe d’une heure et quinze minutes, était bel et bien une oraison funèbre. Jacques Chirac a salué le serviteur de la République qui a été député et ministre de la quatrième république avant de mener la carrière que l’on sait. Plusieurs citations et réflexions de Léopold Sédar Senghor ont rythmé le discours du président de la République qui s’est volontiers inscrit parmi les héritiers d’une certaine pensée «senghorienne». Le tutoiement à la fin de son discours marquait une fraternité, une complicité et surtout l’appartenance à une grande famille. «Léopold Sédar Senghor, plus que frère de la France, sache que ton autre patrie te voue une gratitude et une admiration qui l’anoblit».
Avant cette intervention du président de la République, le secrétaire perpétuel de l’Académie française, Maurice Druon avait déjà lui salué l’homme de culture, «définiteur de la négritude, chantre de la civilisation de l’universel et prophète du métissage». Le combat de l’homme politique qui se mêlait aux souffrances du poète, a trouvé sa stabilité dans les convictions religieuses que le cardinal Lustiger, a souligné dans son homélie. Pour l’archevêque de Paris, qui beaucoup cité le poète, un enseignement de Senghor lui apparaît: tirer des paradoxes une source de dialogue et non de conflit et toujours avoir à l’esprit le pardon et la tolérance. «Plaise à Dieu que ce vœu de Senghor ne soit pas un rêve dépassé par la cruauté des hommes», conclut-il.
A la sortie de la cérémonie, après le départ du président de la république et du premier ministre français, des personnalités diverses se sont mêlées aux gens anonymes pour apprécier la beauté de l’hommage rendu à Senghor. Sur le parvis de l’église Saint-Germain-des-prés, on a commenté la prestation de la chorale sénégalaise de Popenguine associée à la liturgie. Après des chants grégoriens accompagnés par les orgues de l’église, on changeait presque d’univers par les mélodies religieuses, interprétées en langues sérère et wolof du Sénégal, soutenues par des tambours «djembé». Ce dialogue des cultures, cher à Senghor a finalement eu raison de ce qui a été vécu par les Sénégalais comme une frustration. Les plus hautes autorités françaises étaient là, présentes dans un hommage commun. Et comme le disait une des choristes sénégalaises «nous sommes chrétiens et nous avons pardonné».
Lors des obsèques de Léopold Sédar Senghor, du 29 décembre 2001 à Dakar, les absences du président Jacques Chirac et du Premier ministre Lionel Jospin ont été sévèrement soulignées. La présence de Raymond Forni, président de l’Assemblée nationale française et de Charles Josselin, ministre délégué chargé de la coopération, représentant la République n’a pas convaincu les observateurs politiques et nombre d’Africains de l’intérêt que la France accordait à cet événement et à cet illustre serviteur disparu. La présence des deux têtes de l’exécutif français prenait d’un coup une valeur de rachat. Jacques Chirac, ne donnant aucune explication sur son absence à Dakar, refusait par ailleurs qu’on assimile son acte à un quelconque «rattrapage».
Le rattrapage politique
Mais le bref discours qu’il a prononcé au terme d’une messe d’une heure et quinze minutes, était bel et bien une oraison funèbre. Jacques Chirac a salué le serviteur de la République qui a été député et ministre de la quatrième république avant de mener la carrière que l’on sait. Plusieurs citations et réflexions de Léopold Sédar Senghor ont rythmé le discours du président de la République qui s’est volontiers inscrit parmi les héritiers d’une certaine pensée «senghorienne». Le tutoiement à la fin de son discours marquait une fraternité, une complicité et surtout l’appartenance à une grande famille. «Léopold Sédar Senghor, plus que frère de la France, sache que ton autre patrie te voue une gratitude et une admiration qui l’anoblit».
Avant cette intervention du président de la République, le secrétaire perpétuel de l’Académie française, Maurice Druon avait déjà lui salué l’homme de culture, «définiteur de la négritude, chantre de la civilisation de l’universel et prophète du métissage». Le combat de l’homme politique qui se mêlait aux souffrances du poète, a trouvé sa stabilité dans les convictions religieuses que le cardinal Lustiger, a souligné dans son homélie. Pour l’archevêque de Paris, qui beaucoup cité le poète, un enseignement de Senghor lui apparaît: tirer des paradoxes une source de dialogue et non de conflit et toujours avoir à l’esprit le pardon et la tolérance. «Plaise à Dieu que ce vœu de Senghor ne soit pas un rêve dépassé par la cruauté des hommes», conclut-il.
A la sortie de la cérémonie, après le départ du président de la république et du premier ministre français, des personnalités diverses se sont mêlées aux gens anonymes pour apprécier la beauté de l’hommage rendu à Senghor. Sur le parvis de l’église Saint-Germain-des-prés, on a commenté la prestation de la chorale sénégalaise de Popenguine associée à la liturgie. Après des chants grégoriens accompagnés par les orgues de l’église, on changeait presque d’univers par les mélodies religieuses, interprétées en langues sérère et wolof du Sénégal, soutenues par des tambours «djembé». Ce dialogue des cultures, cher à Senghor a finalement eu raison de ce qui a été vécu par les Sénégalais comme une frustration. Les plus hautes autorités françaises étaient là, présentes dans un hommage commun. Et comme le disait une des choristes sénégalaises «nous sommes chrétiens et nous avons pardonné».
par Didier Samson
Article publié le 29/03/2002