Eglise catholique
Le Vatican face à la pédophilie
La mise en cause de plus en plus fréquente de prêtres catholiques, y compris des prélats, dans des affaires de pédophilie embarrasse le Saint-Siège qui ne peut plus, comme par le passé, opposer le silence à ces accusations.
De notre correspondant au Vatican
L’évêque de Palm Beach, en Floride, contraint début mars de démissionner pour des abus sexuels commis il y a 25 ans dans un séminaire. Son prédécesseur avait connu le même destin en 1999. A Cardiff, au Pays de Galles, l’archevêque contraint de présenter des excuses publiques après le scandale provoqué par deux prêtres qui étaient sous son autorité accusés de pédophilie. En France, un évêque condamné à trois mois de prison avec sursis, Mgr Pican, en septembre dernier. Enfin, tout récemment, le diocèse de Boston, aux Etats-Unis, littéralement submergé par un scandale identique.
Autant de faits divers qui empêchent dorénavant de parler de cas isolés dans l’épineux dossier de la pédophilie dans l’Eglise. Réunis en assemblée plénière à Lourdes, en novembre 2000, les évêques de France avaient courageusement mis ce sujet à leur ordre du jour. Leur condamnation fut claire, tout comme leur appel à ne plus étouffer ce type d’affaires, une pratique qui a longtemps prévalu, de l’aveu même de certains grands prélats. Le cardinal Law, archevêque de Boston et véritable pillier romain de l’épiscopat américain, vient ainsi de présenter lui aussi des excuses publiques, pour avoir simplement transféré, et non dénoncé ni même suspendu, un prêtre pédophile dont les agissements étaient connus au sein du diocèse. Ce prêtre, actuellement incarcéré, aurait abusé de plus de 200 enfants. Le diocèse de Boston vient d’être condamné à verser quelque 30 millions de dollars aux famillles des victimes. Au coût moral et d’image que ce genre d’affaires provoque, s’ajoute désormais un coût économique lui aussi embarrassant.
Ces scandales à répétition soulèvent deux interrogations qui agitent à la fois le monde ecclésial et la société civile. La première porte sur les faits eux-mêmes, sur l’ampleur réel du phénomène des déviances sexuelles au sein de l’Eglise. La seconde, sur l’attitude des autorités ecclésiastiques vis-à-vis des fautifs et des autorités judiciaires.
Un évêque doit-il dénoncer ses prêtres ?
D’importants responsables de la Curie romaine, et le Pape en personne, ont à plusieurs reprises dénoncé fortement le «cancer de la pédophilie». Le Cardinal Lopez Trujillo, président du Conseil pontifical pour la famille, le fit même très tôt, il y a plus de dix ans, en lançant l’alarme sur le tourisme sexuel dans les pays asiatiques et en qualifiant même les actes pédophiles de véritables «crimes contre l’humanité». Mais la question des prêtres impliqués dans ce type de délit a suscité davantage d’embarras. Le problème n’était pas ignoré, mais on constatait une évidente réticence à prendre position publiquement. Il a fallu attendre l’an passé pour qu’un document traite pour la première fois de ce sujet.
Un texte du Pape, un «motu proprio», dans lequel Jean Paul II demande «aux évêques non seulement de contribuer à éviter un crime aussi grave, mais aussi de protéger au moyen des sanctions nécessaires la sainteté du sacerdoce». Un véritable rappel à l’ordre qui, par ailleurs, confiait à la Congrégation pour la doctrine de la foi une nouvelle mission : contrôler de plus près ce phénomène. Les évêques devront faire un rapport à la congrégation romaine.
Voilà pour la gestion «interne» du problème. Mais le document du Pape, et la lettre du cardinal Ratzinger qui l’accompagnait, laissaient sans réponse la seconde question : un évêque, informé des agissements d’un prêtre de son diocèse, doit-il ou non le dénoncer ? Outre la question de conscience, qui n’est pas spécifique à l’évêque, ce point soulève le problème de la juridiction. Nul ne remet en cause l’existence du droit canon de l’Eglise. Mais lorsque les faits relèvent du pénal, quelle valeur attribuer à cette juridiction interne ? Difficile d’apporter une réponse générale.
Les responsables de l’Eglise, à juste titre, soulignent volontiers que les méfaits de certains prêtres ou religieux ne sauraient occulter l’engagement charitable de centaines de milliers de serviteurs de l’Eglise. Mais la série des faits divers est devenue trop longue, et certains silences trop lourds, pour que l’Eglise ne ressente pas le besoin de lancer un signal sans équivoque. D’autant que dans le monde catholique, ces délits sexuels renforcent les tenants du mariage des prêtres. Le journal du diocèse de Boston posait lui-même la question ouvertement la semaine passée.
L’évêque de Palm Beach, en Floride, contraint début mars de démissionner pour des abus sexuels commis il y a 25 ans dans un séminaire. Son prédécesseur avait connu le même destin en 1999. A Cardiff, au Pays de Galles, l’archevêque contraint de présenter des excuses publiques après le scandale provoqué par deux prêtres qui étaient sous son autorité accusés de pédophilie. En France, un évêque condamné à trois mois de prison avec sursis, Mgr Pican, en septembre dernier. Enfin, tout récemment, le diocèse de Boston, aux Etats-Unis, littéralement submergé par un scandale identique.
Autant de faits divers qui empêchent dorénavant de parler de cas isolés dans l’épineux dossier de la pédophilie dans l’Eglise. Réunis en assemblée plénière à Lourdes, en novembre 2000, les évêques de France avaient courageusement mis ce sujet à leur ordre du jour. Leur condamnation fut claire, tout comme leur appel à ne plus étouffer ce type d’affaires, une pratique qui a longtemps prévalu, de l’aveu même de certains grands prélats. Le cardinal Law, archevêque de Boston et véritable pillier romain de l’épiscopat américain, vient ainsi de présenter lui aussi des excuses publiques, pour avoir simplement transféré, et non dénoncé ni même suspendu, un prêtre pédophile dont les agissements étaient connus au sein du diocèse. Ce prêtre, actuellement incarcéré, aurait abusé de plus de 200 enfants. Le diocèse de Boston vient d’être condamné à verser quelque 30 millions de dollars aux famillles des victimes. Au coût moral et d’image que ce genre d’affaires provoque, s’ajoute désormais un coût économique lui aussi embarrassant.
Ces scandales à répétition soulèvent deux interrogations qui agitent à la fois le monde ecclésial et la société civile. La première porte sur les faits eux-mêmes, sur l’ampleur réel du phénomène des déviances sexuelles au sein de l’Eglise. La seconde, sur l’attitude des autorités ecclésiastiques vis-à-vis des fautifs et des autorités judiciaires.
Un évêque doit-il dénoncer ses prêtres ?
D’importants responsables de la Curie romaine, et le Pape en personne, ont à plusieurs reprises dénoncé fortement le «cancer de la pédophilie». Le Cardinal Lopez Trujillo, président du Conseil pontifical pour la famille, le fit même très tôt, il y a plus de dix ans, en lançant l’alarme sur le tourisme sexuel dans les pays asiatiques et en qualifiant même les actes pédophiles de véritables «crimes contre l’humanité». Mais la question des prêtres impliqués dans ce type de délit a suscité davantage d’embarras. Le problème n’était pas ignoré, mais on constatait une évidente réticence à prendre position publiquement. Il a fallu attendre l’an passé pour qu’un document traite pour la première fois de ce sujet.
Un texte du Pape, un «motu proprio», dans lequel Jean Paul II demande «aux évêques non seulement de contribuer à éviter un crime aussi grave, mais aussi de protéger au moyen des sanctions nécessaires la sainteté du sacerdoce». Un véritable rappel à l’ordre qui, par ailleurs, confiait à la Congrégation pour la doctrine de la foi une nouvelle mission : contrôler de plus près ce phénomène. Les évêques devront faire un rapport à la congrégation romaine.
Voilà pour la gestion «interne» du problème. Mais le document du Pape, et la lettre du cardinal Ratzinger qui l’accompagnait, laissaient sans réponse la seconde question : un évêque, informé des agissements d’un prêtre de son diocèse, doit-il ou non le dénoncer ? Outre la question de conscience, qui n’est pas spécifique à l’évêque, ce point soulève le problème de la juridiction. Nul ne remet en cause l’existence du droit canon de l’Eglise. Mais lorsque les faits relèvent du pénal, quelle valeur attribuer à cette juridiction interne ? Difficile d’apporter une réponse générale.
Les responsables de l’Eglise, à juste titre, soulignent volontiers que les méfaits de certains prêtres ou religieux ne sauraient occulter l’engagement charitable de centaines de milliers de serviteurs de l’Eglise. Mais la série des faits divers est devenue trop longue, et certains silences trop lourds, pour que l’Eglise ne ressente pas le besoin de lancer un signal sans équivoque. D’autant que dans le monde catholique, ces délits sexuels renforcent les tenants du mariage des prêtres. Le journal du diocèse de Boston posait lui-même la question ouvertement la semaine passée.
par Laurent Morino
Article publié le 20/03/2002