Irak
L’Irak renoue le dialogue avec l’ONU
Le chef de la diplomatie irakienne Naji Sabri a rencontré Kofi Annan à l’ONU. C’est la première rencontre à ce niveau depuis un an. Le régime de Bagdad n’écarte plus le retour des inspecteurs en désarmement de l’ONU. La négociation s’est déroulée avec en toile de fond les menaces d’intervention militaire des Etats-Unis qui ont accueilli fraîchement l’initiative irakienne.
De notre correspondant à New York
Le ton a indéniablement changé. Jeudi soir, en quittant le siège de l’ONU, le nouveau ministre des Affaires étrangères irakien, Naji Sabri, a affirmé avoir «eu un échange de vues constructif et positif». «La partie onusienne a exprimé ses soucis, et nous les nôtres. Nous nous rencontrerons encore à la mi-avril pour poursuivre notre dialogue», a-t-il ajouté. Pour sa part, Kofi Annan a estimé que les débats avaient été «francs et utiles». Ils se sont concentrés sur le retour en Irak des inspecteurs en désarmement de l’ONU. L’an dernier, à la même époque, en quittant Kofi Annan, le ministre des Affaires étrangères irakien d’alors, Mohamed Saïd al-Sahaf, avait claqué la porte à la négociation. «Les inspecteurs ne retourneront jamais en Irak, même si les sanctions sont totalement levées», avait-il alors déclaré dans un geste de défi. Le secrétaire général des Nations unies avait préféré ne pas donner suite.
Beaucoup de spécialistes du dossier voient dans cette nouvelle rencontre une lueur d’espoir. La situation est bloquée depuis décembre 1998 lorsque les inspecteurs de l’ONU, chargés par le Conseil de sécurité de vérifier que l’Irak ne dispose plus d’armes de destructions massives, avaient quitté le pays à la veille de bombardements américano-britanniques. Depuis, l’Irak refuse obstinément leur retour en prétextant notamment, avec raison, que les Etats-Unis et la Grande Bretagne utilisaient la commission de vérification onusienne comme source de renseignement pour leurs services d’espionnage. Le retour des inspecteurs reste pourtant une condition incontournable de la levée de l’embargo qui pèse durement sur l’Irak et ses habitants.
Une situation bloquée depuis 1998
La reprise des négociations est à mettre au compte des Irakiens. Kofi Annan a accepté de bonne grâce, après s’être assuré que le principal sujet de discussion serait cette fois le retour des inspecteurs. «Je ne voudrais pas assister à une extension du conflit au Proche-Orient», a-t-il expliqué, ajoutant qu’il préférait voir le conflit réglé «par voie diplomatique». Après la rencontre, il s’est montré prudent fasse au Conseil de sécurité. «C’est un bon début», a affirmé le prix Nobel de la Paix. Pour la première fois, les Irakiens n’ont pas écarté la question du retour des inspecteurs. Ils ont en revanche adressé une série de questions au Conseil. Parmi leurs principales préoccupations : les conditions d’une levée des sanctions, les modalités d’une éventuelle inspection, la question des zones d’exclusion aérienne ou encore le problème des disparus irakiens.
Côté américain, la reprise des négociations a été accueillie avec le plus grand scepticisme. Le représentant des Etats-Unis au Conseil de sécurité a expliqué que le retour des inspecteurs n’était pas négociable. «Nous avons déjà trop attendu», a-t-il affirmé. «Même après cette rencontre, nous n’avons aucune indication selon laquelle l’Irak est prêt à se mettre en conformité», a estimé Richard Boucher, porte-parole du département d’Etat américain, ajoutant que Bagdad cherchait à «détourner l’attention de ses obligations centrales». Autant dire que l’ambiance n’est pas à la réconciliation. Les experts estiment que le Pentagone a depuis longtemps choisi d’intervenir militairement contre l’Irak dès que la campagne d’Afghanistan sera terminée. Le président George Bush a déjà inclus l’Irak dans son fameux «axe du mal». Selon cette logique, le retour des inspecteurs sur le sol irakien serait plus embarrassant qu’autre chose. Comme pour accréditer cette thèse, les Etats-Unis ont dévoilé à la veille de la rencontre entre Kofi Annan et Najir Sabri des photos satellites censées prouver que l’Irak viole l’embargo sur les armes en détournant des camions achetés dans le cadre du programme humanitaire pétrole contre nourriture pour les convertir en équipement militaire. Certains diplomates y ont vu une tentative grossière de saboter la négociation.
Autre incertitude de poids : les Irakiens sont-ils réellement prêts à laisser revenir les inspecteurs de l’ONU ? Il est raisonnable d’en douter. Ce ne serait pas la première fois que l’Irak fait diversion et joue la montre pour se protéger de la menace militaire américaine. Pourtant, pour la première fois jeudi dernier, le ministre irakien a accepté de s’entretenir avec le chef de la Commission de surveillance, de vérification et d'inspection des Nations unies, Hans Blix. De son côté, la délégation irakienne comprenait l'ancien général Hossan Amin, chef du département national du contrôle du désarmement. Certains veulent y voir un signe selon lequel le régime de Saddam Hussein prend désormais la question au sérieux.
La prochaine rencontre se tiendra donc à la mi-avril. «Il est nécessaire que le Conseil de sécurité se montre uni pour soutenir les efforts de Kofi Annan», estime Jean-David Lévitte, représentant de la France à l’ONU. Pour l’instant, parmi les membres permanents du Conseil, les Etats-Unis et la Grande Bretagne restent sur une ligne beaucoup plus «dure» que la France, la Russie et la Chine. Il leur reste à peine plus d’un mois pour tenter de présenter un front commun.
Le ton a indéniablement changé. Jeudi soir, en quittant le siège de l’ONU, le nouveau ministre des Affaires étrangères irakien, Naji Sabri, a affirmé avoir «eu un échange de vues constructif et positif». «La partie onusienne a exprimé ses soucis, et nous les nôtres. Nous nous rencontrerons encore à la mi-avril pour poursuivre notre dialogue», a-t-il ajouté. Pour sa part, Kofi Annan a estimé que les débats avaient été «francs et utiles». Ils se sont concentrés sur le retour en Irak des inspecteurs en désarmement de l’ONU. L’an dernier, à la même époque, en quittant Kofi Annan, le ministre des Affaires étrangères irakien d’alors, Mohamed Saïd al-Sahaf, avait claqué la porte à la négociation. «Les inspecteurs ne retourneront jamais en Irak, même si les sanctions sont totalement levées», avait-il alors déclaré dans un geste de défi. Le secrétaire général des Nations unies avait préféré ne pas donner suite.
Beaucoup de spécialistes du dossier voient dans cette nouvelle rencontre une lueur d’espoir. La situation est bloquée depuis décembre 1998 lorsque les inspecteurs de l’ONU, chargés par le Conseil de sécurité de vérifier que l’Irak ne dispose plus d’armes de destructions massives, avaient quitté le pays à la veille de bombardements américano-britanniques. Depuis, l’Irak refuse obstinément leur retour en prétextant notamment, avec raison, que les Etats-Unis et la Grande Bretagne utilisaient la commission de vérification onusienne comme source de renseignement pour leurs services d’espionnage. Le retour des inspecteurs reste pourtant une condition incontournable de la levée de l’embargo qui pèse durement sur l’Irak et ses habitants.
Une situation bloquée depuis 1998
La reprise des négociations est à mettre au compte des Irakiens. Kofi Annan a accepté de bonne grâce, après s’être assuré que le principal sujet de discussion serait cette fois le retour des inspecteurs. «Je ne voudrais pas assister à une extension du conflit au Proche-Orient», a-t-il expliqué, ajoutant qu’il préférait voir le conflit réglé «par voie diplomatique». Après la rencontre, il s’est montré prudent fasse au Conseil de sécurité. «C’est un bon début», a affirmé le prix Nobel de la Paix. Pour la première fois, les Irakiens n’ont pas écarté la question du retour des inspecteurs. Ils ont en revanche adressé une série de questions au Conseil. Parmi leurs principales préoccupations : les conditions d’une levée des sanctions, les modalités d’une éventuelle inspection, la question des zones d’exclusion aérienne ou encore le problème des disparus irakiens.
Côté américain, la reprise des négociations a été accueillie avec le plus grand scepticisme. Le représentant des Etats-Unis au Conseil de sécurité a expliqué que le retour des inspecteurs n’était pas négociable. «Nous avons déjà trop attendu», a-t-il affirmé. «Même après cette rencontre, nous n’avons aucune indication selon laquelle l’Irak est prêt à se mettre en conformité», a estimé Richard Boucher, porte-parole du département d’Etat américain, ajoutant que Bagdad cherchait à «détourner l’attention de ses obligations centrales». Autant dire que l’ambiance n’est pas à la réconciliation. Les experts estiment que le Pentagone a depuis longtemps choisi d’intervenir militairement contre l’Irak dès que la campagne d’Afghanistan sera terminée. Le président George Bush a déjà inclus l’Irak dans son fameux «axe du mal». Selon cette logique, le retour des inspecteurs sur le sol irakien serait plus embarrassant qu’autre chose. Comme pour accréditer cette thèse, les Etats-Unis ont dévoilé à la veille de la rencontre entre Kofi Annan et Najir Sabri des photos satellites censées prouver que l’Irak viole l’embargo sur les armes en détournant des camions achetés dans le cadre du programme humanitaire pétrole contre nourriture pour les convertir en équipement militaire. Certains diplomates y ont vu une tentative grossière de saboter la négociation.
Autre incertitude de poids : les Irakiens sont-ils réellement prêts à laisser revenir les inspecteurs de l’ONU ? Il est raisonnable d’en douter. Ce ne serait pas la première fois que l’Irak fait diversion et joue la montre pour se protéger de la menace militaire américaine. Pourtant, pour la première fois jeudi dernier, le ministre irakien a accepté de s’entretenir avec le chef de la Commission de surveillance, de vérification et d'inspection des Nations unies, Hans Blix. De son côté, la délégation irakienne comprenait l'ancien général Hossan Amin, chef du département national du contrôle du désarmement. Certains veulent y voir un signe selon lequel le régime de Saddam Hussein prend désormais la question au sérieux.
La prochaine rencontre se tiendra donc à la mi-avril. «Il est nécessaire que le Conseil de sécurité se montre uni pour soutenir les efforts de Kofi Annan», estime Jean-David Lévitte, représentant de la France à l’ONU. Pour l’instant, parmi les membres permanents du Conseil, les Etats-Unis et la Grande Bretagne restent sur une ligne beaucoup plus «dure» que la France, la Russie et la Chine. Il leur reste à peine plus d’un mois pour tenter de présenter un front commun.
par Propos recueillis par Philippe Bolopion
Article publié le 09/03/2002