Italie
Berlusconi en guerre contre les syndicats
«Les actions en justice, les manifestations syndicales et les coups de revolver ne nous arrêteront pas». Il a suffi d’une phrase de trop de Berlusconi pour que les deux Italies se retrouvent une fois de plus face à face, à trois semaines d’une grève générale décidée par tous les syndicats, la première du genre depuis vingt ans. Une initiative unitaire qui intervient alors que pays est confronté à la plus grande crise politique et sociale depuis l’arrivée au pouvoir de Berlusconi, il y a dix mois.
Contrairement à ce qui s’était passé au lendemain de l’assassinat d’Aldo Moro, en 1978, l’Italie d’aujourd’hui n’est guère unie face au terrorisme: quelques heures à peine après la mort de Marco Biagi elle a retrouvé les clivages à la fois culturels et politiques qui la caractérisent depuis l’arrivée de Berlusconi sur le devant de la scène, en 1994. Deux importants ministres, Antonio Martino (Défense) et Umberto Bossi (Réformes), ont aussitôt laissé entendre que les syndicats post-communistes faisaient en quelque sorte le lit des nouvelles Brigades rouges; alors que nombreux ont été les syndicalistes tombés sous les balles des terroristes d’extrême-gauche.
Ces propos ont suscité d’importantes critiques au sein même du gouvernement, de la part de certains centristes et surtout de Gianfranco Fini (droite nationaliste et post-fasciste), toujours en quête de respectabilité, qui a explicitement demandé à Berlusconi de rappeler à l’ordre les ministres trop bavards et d’afficher un minimum de cohésion alors que le pays est toujours sous le choc de l’assassinat de Marco Biagi. Berlusconi a aussitôt décidé de tenir mardi soir une conférence de presse entouré de tous les leaders de la majorité. Mais ses propres propos n’ont vraiment pas calmé le jeu.
La riposte cinglante du Corriere della Sera
Visiblement agacé, Silvio Berlusconi n’a cessé de se défendre et d’accuser les syndicats de «mensonges» et de «mauvaise foi» sur son projet de réforme du droit de travail, tout en dénonçant une fois de plus les journaux «communistes» qui auraient mal interprété les propos de ses ministres. La riposte du Corriere della Sera (qui appartient à la holding Fiat) a été cinglante: le quotidien milanais a qualifié d’«inacceptables» les propos de Berlusconi mettant sur un même plan ses affaires judiciaires, les manifestations syndicales et les attentats terroristes; avant de dénoncer «le mépris vis-à-vis de la contrepartie syndicale» affiché par le leader de Forza Italia, qui avait qualifié la grande manifestation du 23 mars de «simple promenade gratuite».
Le quotidien lui a aussi rappelé que cette manifestation avait été organisée par la seule CGIL (gauche post-communiste), alors que la prochaine grève générale a été décidée par toutes les fédérations syndicales. Berlusconi ayant réussi l’exploit de se couper des syndicats les plus proches de sa majorité et de les pousser dans les bras de la CGIL de Sergio Cofferati. «Alimenter les polémiques ne mène nulle part» a en effet déclaré la CISL (catholique), tandis que pour l’UIL (centriste) le discours de Berlusconi est «la réponse de qui veut clore de dialogue».
Celui-ci pourrait néanmoins reprendre au lendemain de la grève générale du 16 avril prochain, qui s’annonce d’ores et déjà comme une autre démonstration de force vis-à-vis du gouvernement de centre-droite. Car Berlusconi a maladroitement tenté de minimiser cet événement: «en réalité, c’est une grève partielle, très partielle, a-t-il dit, car (pour être générale) elle devrait concerner 21 millions d’Italiens, et ce ne sera pas le cas». Le président du conseil italien a apparemment oublié un conseil qui lui a été donné la veille par un ami de longue date: Giulio Andreotti, vieux renard de la politique italienne et grand connaisseur des milieux romains, lui a en effet suggéré de faire comme le pape «qui sait faire taire ses cardinaux».
Gros Plan
Magazine présenté par Hervé Guillemot. (25/02/2002)
Ecouter également Sergio Romano, l'Invité Europe du 21/03/2002
Ecouter égalementElio Comarin, l'invité de la rédaction du 21/03/2002, 5'48. Invité de la semaine
Erri De Luca
Ecrivain Italien, et invité de la semaine sur RFI est interviewé par Pierre Ganz de RFI et Alain Louyot de L'Express.
Ces propos ont suscité d’importantes critiques au sein même du gouvernement, de la part de certains centristes et surtout de Gianfranco Fini (droite nationaliste et post-fasciste), toujours en quête de respectabilité, qui a explicitement demandé à Berlusconi de rappeler à l’ordre les ministres trop bavards et d’afficher un minimum de cohésion alors que le pays est toujours sous le choc de l’assassinat de Marco Biagi. Berlusconi a aussitôt décidé de tenir mardi soir une conférence de presse entouré de tous les leaders de la majorité. Mais ses propres propos n’ont vraiment pas calmé le jeu.
La riposte cinglante du Corriere della Sera
Visiblement agacé, Silvio Berlusconi n’a cessé de se défendre et d’accuser les syndicats de «mensonges» et de «mauvaise foi» sur son projet de réforme du droit de travail, tout en dénonçant une fois de plus les journaux «communistes» qui auraient mal interprété les propos de ses ministres. La riposte du Corriere della Sera (qui appartient à la holding Fiat) a été cinglante: le quotidien milanais a qualifié d’«inacceptables» les propos de Berlusconi mettant sur un même plan ses affaires judiciaires, les manifestations syndicales et les attentats terroristes; avant de dénoncer «le mépris vis-à-vis de la contrepartie syndicale» affiché par le leader de Forza Italia, qui avait qualifié la grande manifestation du 23 mars de «simple promenade gratuite».
Le quotidien lui a aussi rappelé que cette manifestation avait été organisée par la seule CGIL (gauche post-communiste), alors que la prochaine grève générale a été décidée par toutes les fédérations syndicales. Berlusconi ayant réussi l’exploit de se couper des syndicats les plus proches de sa majorité et de les pousser dans les bras de la CGIL de Sergio Cofferati. «Alimenter les polémiques ne mène nulle part» a en effet déclaré la CISL (catholique), tandis que pour l’UIL (centriste) le discours de Berlusconi est «la réponse de qui veut clore de dialogue».
Celui-ci pourrait néanmoins reprendre au lendemain de la grève générale du 16 avril prochain, qui s’annonce d’ores et déjà comme une autre démonstration de force vis-à-vis du gouvernement de centre-droite. Car Berlusconi a maladroitement tenté de minimiser cet événement: «en réalité, c’est une grève partielle, très partielle, a-t-il dit, car (pour être générale) elle devrait concerner 21 millions d’Italiens, et ce ne sera pas le cas». Le président du conseil italien a apparemment oublié un conseil qui lui a été donné la veille par un ami de longue date: Giulio Andreotti, vieux renard de la politique italienne et grand connaisseur des milieux romains, lui a en effet suggéré de faire comme le pape «qui sait faire taire ses cardinaux».
Gros Plan
Magazine présenté par Hervé Guillemot. (25/02/2002)
Ecouter également Sergio Romano, l'Invité Europe du 21/03/2002
Ecouter égalementElio Comarin, l'invité de la rédaction du 21/03/2002, 5'48. Invité de la semaine
Erri De Luca
Ecrivain Italien, et invité de la semaine sur RFI est interviewé par Pierre Ganz de RFI et Alain Louyot de L'Express.
par Elio Comarin
Article publié le 27/03/2002