Attentats : la riposte
Neuf Américains tués dans les combats contre Al Qaïda
Les troupes américaines ont subi de lourdes pertes avec neuf morts et une quarantaine de blessés dans l’est de l’Afghanistan, au cours de la plus importante offensive depuis le début de la guerre. Des avions français ont participé à l’opération. Le Congrès américain demande au président Bush de mieux définir sa guerre contre le terrorisme.
De notre correspondant à New York
L’opération ressemble fort à un remake malheureux de La chute du Faucon noir. Le premier hélicoptère de l’US army a été touché lundi par une grenade alors qu’il devait déposer des soldats sur le champ de bataille de la plus grande offensive américaine depuis le début de la guerre en Afghanistan, commencée samedi au sud de Gardaz, dans l’est du pays. Alors que l’appareil s’enfuit en décollant en catastrophe, un soldat tombe au sol. L’hélicoptère endommagé ne peut faire marche arrière et se pose quelques centaines de mètres plus loin. Alors que le soldat tombé est présumé mort, un second hélicoptère tente de le récupérer, en vertu du principe selon lequel les troupes américaines ne laissent personne derrière –un principe qui a valu de lourdes pertes aux Américains en Somalie. Alors qu’il arrive sur place, le second appareil, un MH-47 Chinook, est abattu, faisant vraisemblablement sept morts et une dizaine de blessés qui seront secourus.
Samedi, au premier jour de l’offensive, le soldat des forces spéciales Stanley Harriman, 34 ans, est tombé sous les balles ennemies. Le bilan total de cette bataille est pour l’instant de 9 morts et une quarantaine de blessés. L’opération, baptisée Anaconda, vise des poches de résistance des talibans et d’Al-Qaïda dans des montagnes de l’est du pays. Elle mobilise près de 2 000 hommes au sol dont près de 1 000 soldats américains, 200 commandos des pays alliés aux Etats-Unis dans cette offensive (Canada, Australie, Danemark, France, Allemagne et Norvège) et environs 800 combattants afghans loyaux au gouvernement de transition. Des avions français ont participé aux attaques aériennes. Au total, au moins 350 bombes ont été lâchées par les avions américains sur les positions talibanes et d’Al-Qaïda, dont des bombes thermobariques censées faire des dégâts dans les caves et les grottes qui servent de refuge aux «terroristes».
Ces pertes sont de loin les plus lourdes infligées aux Etats-Unis depuis le début de la guerre. Jusque-là, seuls un béret vert et un agent de la CIA avaient péri au cours de combats. En janvier, sept Marines avaient trouvé la mort dans le crash accidentel d’un avion de ravitaillement au Pakistan. Le général Tommy Franks, le patron des opérations en Afghanistan, a prévenu que la guerre venait d’entrer dans une phase plus dangereuse alors que des centaines de soldats américains sont désormais engagés dans des combats au sol. «On peut s’attendre à davantage de pertes» a-t-il prévenu.
Jusque-là, les forces américaines se contentaient de guider et d’assister au sol les soldats afghans opposés aux talibans. Mais depuis que leur victoire est acquise sur l’ensemble du pays, les Afghans sont plus réticents à risquer leur vie en délogeant les talibans et les combattants d’Al Qaïda de leurs positions retranchées. Dans ces montagnes, le danger est grand pour les hélicoptères américains. L’altitude rend leur vol plus risqué et de nombreux combattants talibans et d’Al Qaïda sont équipés de missiles portables Stinger fournis par les Américains dans les années 80 pour lutter contre l’URSS. Ils ont appris à s’en servir avec une précision redoutable contre les hélicoptères russes.
Oussama Ben Laden court toujours
George Bush «porte le deuil» de chaque soldat tombé, a fait savoir son porte-parole Ari Fleischer, qui a rappelé que le pays devait «être préparé à subir des pertes». Selon le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld, l’ennemi a subi «un bien plus grand nombre de morts et de blessés, et il y en aura beaucoup d’autres». Il a admis qu’il restait très certainement d’autres poches de résistance à travers le pays et a avoué ne disposer d’aucune information sur les mouvements de Oussama Ben Laden. Toutefois, selon lui, des officiels talibans haut-placés se trouvent parmi les combattants au sud de Gardez, ce qui expliquerait leur pugnacité. Selon le Pentagone, des centaines de combattants d’Al Qaïda et de talibans surarmés seraient retranchés dans ces montagnes. Ils auraient perdu entre 100 et 200 hommes dans l’attaque, peut-être beaucoup plus. «Nous savons qu'Al Qaïda a deux possibilités: s’enfuir ou rester et combattre», a expliqué le général Richard Myers, chef d'état-major américain. «Il semble qu'ils aient choisi de rester et de combattre jusqu'au dernier, j’espère que nous pourrons satisfaire leur désir» a-t-il ajouté.
Ces rodomontades militaires ne suffiront sans doute pas à occulter deux faits. D’abord, les opérations au sol menacent de s’enliser dans des combats meurtriers. Ensuite, Oussama Ben Laden court toujours. Malgré cela, l’administration Buhs projette d’ouvrir de nouveaux fronts en fournissant une assistance militaire anti-terroriste en Georgie, aux Philippines et au Yemen. Or, le Congrès commence s’inquiéter. Il demande des comptes au président Bush sur l’état de la guerre contre le terrorisme. Les parlementaires exigent que l’administration définisse mieux les nouvelles missions militaires tout en pensant à des stratégies de sortie.
«Nous ne savons vraiment pas dans quelle direction nous allons», a déploré le leader démocrate de la majorité sénatoriale Tom Daschle. «Avant que nous allions dans ces nouveaux endroits, je pense qu’il est important de comprendre quel est notre but, combien de temps nous allons y rester, comment cela affecte notre effort en Afghanistan». Pour le sénateur républicain John McCain, il devrait y avoir «beaucoup de consultations avec le Congrès et le peuple américain sur notre stratégie exacte et notre objectif global à court terme». De nombreux critiques estime que les Etats-Unis risquent de s’enliser dans des conflits régionaux complexes qu’ils comprennent mal. Déjà, il est prévu que les 5000 soldats américains stationnés en Afghanistan restent sur place jusqu’à ce que les derniers combattants de Al Qaïda soient éliminés, et que le nouveau gouvernement soit suffisamment stable pour empêcher leur retour. La mission pourrait s’éterniser.
L’opération ressemble fort à un remake malheureux de La chute du Faucon noir. Le premier hélicoptère de l’US army a été touché lundi par une grenade alors qu’il devait déposer des soldats sur le champ de bataille de la plus grande offensive américaine depuis le début de la guerre en Afghanistan, commencée samedi au sud de Gardaz, dans l’est du pays. Alors que l’appareil s’enfuit en décollant en catastrophe, un soldat tombe au sol. L’hélicoptère endommagé ne peut faire marche arrière et se pose quelques centaines de mètres plus loin. Alors que le soldat tombé est présumé mort, un second hélicoptère tente de le récupérer, en vertu du principe selon lequel les troupes américaines ne laissent personne derrière –un principe qui a valu de lourdes pertes aux Américains en Somalie. Alors qu’il arrive sur place, le second appareil, un MH-47 Chinook, est abattu, faisant vraisemblablement sept morts et une dizaine de blessés qui seront secourus.
Samedi, au premier jour de l’offensive, le soldat des forces spéciales Stanley Harriman, 34 ans, est tombé sous les balles ennemies. Le bilan total de cette bataille est pour l’instant de 9 morts et une quarantaine de blessés. L’opération, baptisée Anaconda, vise des poches de résistance des talibans et d’Al-Qaïda dans des montagnes de l’est du pays. Elle mobilise près de 2 000 hommes au sol dont près de 1 000 soldats américains, 200 commandos des pays alliés aux Etats-Unis dans cette offensive (Canada, Australie, Danemark, France, Allemagne et Norvège) et environs 800 combattants afghans loyaux au gouvernement de transition. Des avions français ont participé aux attaques aériennes. Au total, au moins 350 bombes ont été lâchées par les avions américains sur les positions talibanes et d’Al-Qaïda, dont des bombes thermobariques censées faire des dégâts dans les caves et les grottes qui servent de refuge aux «terroristes».
Ces pertes sont de loin les plus lourdes infligées aux Etats-Unis depuis le début de la guerre. Jusque-là, seuls un béret vert et un agent de la CIA avaient péri au cours de combats. En janvier, sept Marines avaient trouvé la mort dans le crash accidentel d’un avion de ravitaillement au Pakistan. Le général Tommy Franks, le patron des opérations en Afghanistan, a prévenu que la guerre venait d’entrer dans une phase plus dangereuse alors que des centaines de soldats américains sont désormais engagés dans des combats au sol. «On peut s’attendre à davantage de pertes» a-t-il prévenu.
Jusque-là, les forces américaines se contentaient de guider et d’assister au sol les soldats afghans opposés aux talibans. Mais depuis que leur victoire est acquise sur l’ensemble du pays, les Afghans sont plus réticents à risquer leur vie en délogeant les talibans et les combattants d’Al Qaïda de leurs positions retranchées. Dans ces montagnes, le danger est grand pour les hélicoptères américains. L’altitude rend leur vol plus risqué et de nombreux combattants talibans et d’Al Qaïda sont équipés de missiles portables Stinger fournis par les Américains dans les années 80 pour lutter contre l’URSS. Ils ont appris à s’en servir avec une précision redoutable contre les hélicoptères russes.
Oussama Ben Laden court toujours
George Bush «porte le deuil» de chaque soldat tombé, a fait savoir son porte-parole Ari Fleischer, qui a rappelé que le pays devait «être préparé à subir des pertes». Selon le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld, l’ennemi a subi «un bien plus grand nombre de morts et de blessés, et il y en aura beaucoup d’autres». Il a admis qu’il restait très certainement d’autres poches de résistance à travers le pays et a avoué ne disposer d’aucune information sur les mouvements de Oussama Ben Laden. Toutefois, selon lui, des officiels talibans haut-placés se trouvent parmi les combattants au sud de Gardez, ce qui expliquerait leur pugnacité. Selon le Pentagone, des centaines de combattants d’Al Qaïda et de talibans surarmés seraient retranchés dans ces montagnes. Ils auraient perdu entre 100 et 200 hommes dans l’attaque, peut-être beaucoup plus. «Nous savons qu'Al Qaïda a deux possibilités: s’enfuir ou rester et combattre», a expliqué le général Richard Myers, chef d'état-major américain. «Il semble qu'ils aient choisi de rester et de combattre jusqu'au dernier, j’espère que nous pourrons satisfaire leur désir» a-t-il ajouté.
Ces rodomontades militaires ne suffiront sans doute pas à occulter deux faits. D’abord, les opérations au sol menacent de s’enliser dans des combats meurtriers. Ensuite, Oussama Ben Laden court toujours. Malgré cela, l’administration Buhs projette d’ouvrir de nouveaux fronts en fournissant une assistance militaire anti-terroriste en Georgie, aux Philippines et au Yemen. Or, le Congrès commence s’inquiéter. Il demande des comptes au président Bush sur l’état de la guerre contre le terrorisme. Les parlementaires exigent que l’administration définisse mieux les nouvelles missions militaires tout en pensant à des stratégies de sortie.
«Nous ne savons vraiment pas dans quelle direction nous allons», a déploré le leader démocrate de la majorité sénatoriale Tom Daschle. «Avant que nous allions dans ces nouveaux endroits, je pense qu’il est important de comprendre quel est notre but, combien de temps nous allons y rester, comment cela affecte notre effort en Afghanistan». Pour le sénateur républicain John McCain, il devrait y avoir «beaucoup de consultations avec le Congrès et le peuple américain sur notre stratégie exacte et notre objectif global à court terme». De nombreux critiques estime que les Etats-Unis risquent de s’enliser dans des conflits régionaux complexes qu’ils comprennent mal. Déjà, il est prévu que les 5000 soldats américains stationnés en Afghanistan restent sur place jusqu’à ce que les derniers combattants de Al Qaïda soient éliminés, et que le nouveau gouvernement soit suffisamment stable pour empêcher leur retour. La mission pourrait s’éterniser.
par Philippe Bolopion
Article publié le 05/03/2002