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Angola

Paulo «Gato» : du maquis à la scène politique

Successeur de Jonas Savimbi, le général «Gato» a signé l’accord de paix avec les autorités de Luanda au nom de l’UNITA. Pour lui, le plus difficile reste à faire : transformer la guerilla en mouvement politique.
Paulo Lukamba dit «Gato», le «chat», nouveau dirigeant intérimaire de l'UNITA, l'opposition armée défaite par les forces gouvernementales angolaises, fait face au plus grand défi de son existence : transformer une rébellion armée en une force politique capable de mener le combat par des moyens pacifiques.

Pour ce «dur», âgé aujourd'hui de 48 ans, fidèle depuis 1974 de Jonas Savimbi, le chef historique de l'UNITA tué dans l'est du pays le 22 février dernier, la tâche paraît difficile mais non insurmontable.

Il s'agit de relancer un mouvement en débandade, en refaisant l'unité entre les factions du maquis, de l'extérieur et les parlementaires de Luanda. Tout en faisant face à un adversaire victorieux qui a su toutefois, le président José Eduardo dos Santos en tête, tendre la main aux vaincus et se montrer, pour le moment, magnanime et faire la paix après 27 ans de guerre.

Plusieurs chefs militaires de la rébellion ont déjà été intégrés dans l'armée gouvernementale angolaise au lendemain de la signature de l'accord de cessez-le feu le 4 avril, y compris le général Geraldo Abreu Muengo «Kamorteiro», qui l'avait négocié et qui a signé pour l'UNITA en même temps que le général Armando Da Cruz Neto, chef d'état-major des Forces armées angolaises (FAA).

Un homme secret, réservé et rigide

Quand il est apparu sur les écrans de télévision, le visage émacié et barbu, le corps flottant dans un uniforme tout neuf fourni par ses ennemis, «Gato» a mis fin aux spéculations concernant son sort. Car le numéro trois de l'UNITA, secrétaire-général du mouvement depuis le milieu des années 90, se battait sur le terrain comme Jonas Savimbi et le vice-président Antonio Dembo, mort d'un diabète aigu quelques jours après la disparition du fondateur du mouvement.

«Gato» est très vite apparu comme le nouveau responsable de l'UNITA, prenant la tête d'un comité de gestion qui a reçu l'aval des représentants de l'extérieur et de parlementaires de l'UNITA restés à Luanda, sans toutefois s'assurer le soutien de la faction dissidente de l'UNITA-Renovada (rénovée) qui s'est ralliée au gouvernement de Luanda en 1998. Il a depuis rencontré en tête à tête le président dos Santos mais aussi le chef de la Renovada, Eugenio Manuvakola, auquel il avait succédé au poste de secrétaire-général, qui a demandé à le voir.

Originaire de Huambo, dans le centre sud du pays où il a fait ses études secondaires, marié à une nièce de Savimbi, selon un de ses anciens collaborateurs, il avait représenté l'UNITA à Paris à partir de 1983.

Arrivé avec le grade de colonel, il quitté la capitale française en 1991 avec les étoiles de général, pour rejoindre la commission conjointe chargée de mettre en application les accords de paix de Bicesse et de préparer les élections présidentielles. Celles-ci ont été interrompues après le premier tour en 1992 avec la reprise de la guerre civile, Savimbi ayant refusé de reconnaître la victoire de dos Santos. Blessé dans les combats de Luanda, «Gato» a ensuite rejoint le maquis aux côtés de Savimbi.

Parlant bien le français, réservé, parfois même secret, ou en colère quand la cause de l'UNITA n'était pas «bien comprise», un rare sourire illuminant son visage, il s'était toujours montré rigide, imputant au régime de Luanda la responsabilité de la guerre. Il avait réussi à établir d'excellents contacts dans certains milieux politiques et journalistiques français à l'époque où Savimbi était considéré comme un «combattant de la liberté», bénéficiant du soutien américain – mais aussi celui du régime de l'apartheid sud-africain – face au régime marxiste de Luanda aidé par les Soviétiques et les Cubains.

Rencontré plus tard, en 1994 à Huambo, à l'époque occupé par l'UNITA et bombardé quotidiennement par l'aviation gouvernementale, il soulignait que le mouvement n'allait «jamais» déposer les armes mais se battrait jusqu'à la victoire finale. Il a continué à s'en tenir à cette position jusqu'au bout, selon des proches, y compris après la reprise des hostilités en 1998, après l'échec progressif des accords de paix de Lusaka de 1994.

«Gato» refuse toujours de considérer officiellement l'UNITA comme vaincue. Pour lui le cessez-le-feu est un accord librement négocié. Il estime que cet accord ouvre la voie pour que l'UNITA joue pleinement son rôle de parti politique d'opposition. Pour lui, le mouvement «a la capacité de se transformer en un parti d'opposition très fort», capable de se faire entendre par la voie des urnes.

Selon «Gato» le plus grand défi immédiat sera de réussir la réunification et la réorganisation de l'UNITA et d'organiser un nouveau congrès pour élire un successeur au président fondateur du parti.

Ecouter également:
Paulo «Gato», secrétaire général de l'Unita
Invité Afrique, (04/04/2002).





par Marie  Joannidis

Article publié le 10/04/2002