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Société

Pas facile d’être diplômé avec des parents divorcés

Face aux facteurs lourds, liés au niveau socio-culturel des parents, qui jouent un rôle déterminant dans la réussite scolaire des enfants, la trajectoire familiale exerce une influence secondaire mais non négligeable. Ainsi, il apparaît que les enfants de couples divorcés réussissent, en moyenne, moins bien à l’école que leurs camarades dont les parents sont restés unis.
«Du point de vue du nombre, le divorce est devenu banal mais du point de vue des effets, il n'y a pas de banalisation.» A l’heure actuelle, près d’un enfant sur quatre est confronté avant sa majorité à l’épreuve de la séparation de ses parents. Et pour Paul Archambault, auteur d’une thèse intitulée Le devenir des enfants de familles dissociées, dont un extrait vient d’être publié dans la revue Population et société de l’Ined (Institut national d’études démographiques), le divorce demeure un élément «structurant» dans le parcours scolaire des enfants. «Quel que soit le milieu social, la rupture du couple parental est associée à une réussite scolaire plus faible». Malgré tout, Paul Archambault explique qu’il s’agit d’un «raisonnement à la moyenne. Une majorité d’enfants [de divorcés] ne souffrent pas d’échec scolaire. Mais il y a amoindrissement des chances».

Dans les milieux favorisés, le divorce fait passer le taux d’échec au baccalauréat de 7 à 15 % si la mère a obtenu un diplôme d’études supérieures et de 27 à 45 % si la mère n’en a pas. Mais dans les classes sociales privilégiées, c’est surtout au niveau des études supérieures que le fossé se creuse entre enfants de divorcés et de couples unis. Après le bac, il y a «un décrochage», estime Paul Archambault. Ceux dont la trajectoire familiale a été perturbée par une rupture parentale vont moins loin que les autres. C’est donc par rapport au niveau de diplôme auquel ils auraient pu prétendre que «l’impact est élevé».

«Amoindrissement des chances»

Chez les enfants d’ouvriers et d’employés, la tendance est identique. Dans la première catégorie, 50 % des enfants sortent du système scolaire sans aucun diplôme en cas de divorce, au lieu de 37 % lorsque les parents restent unis. Chez les employés, on arrive à 22 % au lieu de 11 %. Quant aux chances des jeunes d’accéder à l’enseignement supérieur, elles sont quasiment inexistantes pour les enfants d’ouvriers dont les parents décident de se séparer.

Dans tous les cas, l’avantage procuré par l’effet positif de l’un des «facteurs lourds» qui déterminent la réussite scolaire des enfants, à savoir le niveau d’études de la mère, peut être anéanti par une séparation. Ainsi, 35 % des enfants d’employés obtiennent le bac lorsque les parents sont unis, même si la mère n’a aucun bagage, contre seulement 30 % de ceux qui ont une mère diplômée mais séparée. «La stabilité du noyau familial est aussi fortement associé à l’obtention du baccalauréat que l’est le privilège d’avoir une mère instruite».

Les effets de la séparation des parents ne sont pas forcément immédiats. «Ils peuvent être décalés. Il n’y a pas toujours de perturbation au moment du divorce. Mais plus tard, vers 18 ans quand les jeunes ont des grands choix à faire [poursuite des études, vie en couple…]. Les enfants de familles désunies se décident plus tôt.» La rupture des parents peut entraîner une scolarité perturbée mais aussi une scolarité écourtée. Que ce soit dans le contexte d’une famille recomposée ou monoparentale, les jeunes peuvent être amenés pour différentes raisons, d’ordre économique ou relationnel, à décider de quitter le foyer familial, ce qui signifie souvent arrêter ses études.

Où est la cause, où est l’effet ? «C’est là que l’on ne sait pas». Pas facile, en effet, de déterminer si c’est le divorce en lui-même qui met les enfants en situation d’échec scolaire ou si ce sont les causes de la séparation des parents qui ont préparé le terrain et fragilisé les enfants. «Nous avons peu de moyens d’évaluer cela en sciences sociales. Nous ne pouvons pas demander aux parents de rester ensemble pour voir ce qui se passe et avoir un effet placebo».

Lien utile
Ined

A écouter :
Paul Archambault
Auteur du Devenir des enfants de familles dissociées, au micro d'Isabelle Jammot.



par Valérie  Gas

Article publié le 05/05/2002