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Proche-Orient

Sharon limoge des ministres religieux

Le Premier ministre israélien Ariel Sharon a limogé lundi soir quatre de ses ministres du parti orthodoxe Shass, lequel avait voté contre un plan de rigueur destiné à faire face aux conséquences économiques de l'Intifada. Il brandit la menace d’élections anticipées.
Ariel Sharon est en colère. «Je ne permettrai pas aux gens du Shass d'exercer un chantage sur moi. On ne peut pas continuer ainsi: il faut leur montrer qui est le patron», a affirmé lundi soir le Premier ministre israélien, en commentant le limogeage de quatre ministres de ce parti orthodoxe. Les parlementaires du Shass, troisième parti d'Israël et pilier de la coalition gouvernementale avec ses 17 députés, venaient de le défier à la Knesset en votant en première lecture contre son plan d'austérité économique. Résultat : 47 voix contre le texte, 44 pour.

Un peu plus tard, un cinquième ministre de cette formation, absent lors du vote, a présenté sa démission en solidarité avec ses collègues. Et dans la foulée, Sharon étant décidé à punir ceux qui ont trahi la solidarité gouvernementale, cinq vice-ministres du Shass et deux vice-ministres du parti du Judaïsme unifié de la Torah ont aussi été démis de leurs fonctions, ces limogeages prenant immédiatement effet.

Ce plan «d'urgence économique», adopté en avril par le gouvernement, vise notamment à réduire de 2,6 milliards de dollars le déficit budgétaire engendré par 20 mois d'Intifada palestinienne, notamment à cause des dépenses de sécurité. Israël subit de plein fouet une grave crise économique, en particulier dans le tourisme et les industries de haute technologie. Parmi les principales mesures, une hausse de la TVA et du prix des carburants. C'est la réduction des allocations familiales de 200 millions de dollars, prévue par le plan, qui a provoqué la réaction du Shass, ses dirigeants dénonçant une décision «antisociale».

Deux Israéliens sur trois satisfaits de Sharon

Mardi matin, le quotidien Maariv estimait que le Premier ministre était confronté à la crise gouvernementale la plus grave depuis la formation de son cabinet, en mars 2001. Au point qu’on évoque la menace d’élections anticipées. Selon son entourage, le Premier ministre devait procéder mardi à des consultations en vue d'un tel scrutin, la législature arrivant à échéance à la fin d’octobre 2003.

Toutefois, avant d’en arriver à cette solution extrême, Ariel Sharon devrait tenter une nouvelle fois de faire passer son projet. Le ministre des Finances Silvan Shalom a annoncé que le plan d'austérité serait à nouveau soumis mercredi au vote du Parlement, sans la moindre modification. «Il est important que ce plan soit approuvé, a affirmé Ariel Sharon, car l'insécurité et l'ambiance pré-électorale nuisent aux marchés boursiers déjà affectés par 20 mois de guerre». Et de reprocher au Shass d'être guidé par «des intérêts sectoriels».

Du côté du parti travailliste, autre poids lourd de la coalition, on approuve la réaction du Premier ministre. «M. Sharon a fait exactement ce qu'il devait faire, a déclaré le chef de la diplomatie Shimon Peres. Il ne faut pas permettre à notre économie de dégringoler comme celle de l'Argentine». Mardi, la crise politique s'est traduite par une dépréciation de la monnaie nationale, le shekel, de 0,9% par rapport au dollar, et par une baisse moyenne de 0,5 point de la Bourse de Tel-Aviv.

Les journaux israéliens approuvent également. Ils étaient unanimes mardi à souligner que le Premier ministre avait démontré ses qualités d'homme d'Etat en refusant de composer avec le Shass, un parti qui joue depuis une décennie de son rôle charnière pour faire et défaire les coalitions gouvernementales. Selon les commentateurs politiques israéliens, il est probable que, face à la menace, les élus des partis orthodoxes fassent marche arrière. Ils n'ont guère d’intérêt à un scrutin anticipé, car les sondages leur sont défavorables, tandis que près de deux Israéliens sur trois se disent satisfaits de la gestion des affaires par Ariel Sharon.



par Philippe  Quillerier-Lesieur

Article publié le 21/05/2002