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Inde-Pakistan

Acharnement diplomatique autour du conflit

Le sommet d’Almaty s’achève sur une note d’espoir, avec l’assurance donnée par le président russe d’une rencontre prochaine entre le général Musharraf et le Premier ministre Vajpayee. Mais aucun signe concret sur le terrain, ni aucune déclaration des deux hommes n’engagent à l’optimisme.
Si l’on attendait de la réunion d’Almaty qu’elle scelle la réconciliation entre l’Inde et le Pakistan, l’échec est total. Contrairement à leur précédente rencontre, lors du sommet régional tenu il y a six mois à Katmandou, les chefs d’Etat des deux pays n’ont même pas consenti à se rencontrer en tête à tête, comme l’espérait notamment le Premier ministre russe. New Delhi est restée sur ses positions, privilégiant les signaux en provenance du terrain. Ces signaux restent mauvais: depuis trois semaines, il ne se passe plus une journée sans duel d’artillerie impliquant les deux camps. Au moins la réunion d’Almaty aura-t-elle eu le mérite de manifester à nouveau la très vive inquiétude de la communauté internationale sur cette situation qui prévaut sur cette ligne de contrôle qui sépare les deux armées dans la province contestée du Cachemire et dont elle craint, à juste titre, qu’elle ne dégénère en guerre totale impliquant les armes nucléaires dont disposent les uns et les autres. En attendant de disposer de véritables moyens d’action, les seize membres de la Conférence pour les interactions et les mesures de confiance en Asie (CICA) ont adopté un document minimum dans lequel ils identifient le «séparatisme comme l’une des principales menaces (…) à la sécurité et la stabilité» et s’interdisent de soutenir tout mouvement séparatiste sur le territoire d’un autre Etat membre.

Et là réside précisément la contradiction sur laquelle New Delhi peut toujours s’adosser pour ne manifester aucune souplesse face à une direction pakistanaise acculée à répliquer sur le même registre belliqueux aux accusations indiennes. C’est bien ce qui tranche dans l’attitude des deux capitales. D’une part une super-puissance indienne bien campée dans le rôle de la victime du terrorisme islamique. D’autre part une puissance régionale moyenne pakistanaise qui, de son côté, a bien du mal à convaincre qu’elle a brusquement rompu avec l’islamisme radical qu’elle encourageait jusqu’au 11 septembre dernier. Pourtant le général Musharraf a multiplié ces dernières semaines les signes de bonne volonté, protestant de sa bonne foi, donnant des gages et déclarant qu’il était prêt, lui, à rencontrer le Premier ministre Vajpayee. Sa situation est en effet des plus inconfortables. La nouvelle donne en Afghanistan l’a fragilisé et révélé son impuissance à véritablement agir sur le cours des événements, c’est à dire à apaiser la tension aux frontières.

L’Inde veut-elle la guerre ?

Dans ce contexte, New Delhi ne fait donc rien d’autre que d’attendre des signes concrets qui ne peuvent survenir. Et de laisser se refermer lentement, mais sûrement, le piège de l’engrenage, ne laissant finalement d’autres choix à Islamabad que celui des armes, tôt ou tard. Le général Musharraf a bien senti se refermer sur lui le piège indien. A l’issue de l’entretien séparé qu’il a mené avec Vladimir Poutine, mardi, le numéro un pakistanais a déclaré devant la presse que «l’Inde menace en permanence le Pakistan d’une attaque et refuse de dialoguer avec lui». Il a également indiqué que le résident russe les avait invités, lui et son homologue indien, à Moscou. Sans toutefois préciser s’ils étaient conviés à la même date. Ce sur quoi le président russe s’est voulu rassurant en déclarant, à l’issue d’entretiens séparés que les deux hommes «ont décidé de régler leur différend pacifiquement» et souhaitaient «un contact direct».

Simple formule diplomatique de circonstance ou véritable lueur d’espoir à l’issue de la réunion d’Almaty ? En tout cas les diplomates n’ont pas encore épuisé toutes leurs cartes. D’ici la fin de la semaine le vice-ministre américain des Affaires étrangères et le ministre américain de la Défense sont attendus à Islamabad et New Delhi.



par Georges  Abou

Article publié le 04/06/2002