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Ordonnances plus légères, honoraires plus élevés ?

Dans le cadre de la grande négociation en cours, en France, entre les médecins et les caisses d’assurance maladie autour de la hausse du tarif des consultations, le débat sur la prescription systématique des médicaments génériques pour diminuer les dépenses de santé est de nouveau à l’ordre du jour.
Les Français sont de grands consommateurs de médicaments. Ils dépensent chaque année 15,24 milliards d’euros en produits pharmaceutiques. Par contre, ils préfèrent les «spécialités». Les génériques (copies moins chères des molécules) ne représentent en effet, selon le syndicat national de l'industrie pharmaceutique, que 3 à 4% du marché. Dans ce domaine, la France semble en retard par rapport à certains de ses voisins européens. Au Danemark, on atteint le chiffre de 50%, en Grande-Bretagne celui de 40%, en Allemagne 28% et aux Pays-Bas 10%.

Face à constat et en partant de la nécessité de réduire les dépenses de santé, la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) propose de financer les dépenses supplémentaires engendrées par un passage du tarif de la consultation à 20 euros et de la visite à 30 euros (soit 966 millions d’euros), que les médecins généralistes français réclament depuis des mois, en élargissant la prescription des génériques. Selon Jean-Marie Spaeth, le président de le Cnam, «si l’on prescrivait les 30 premières molécules sur les 200 génériques qui existent, c’est l’équivalent du coût de la consultation à 20 euros qui serait économisé. Nous attendons des médecins un bon usage des soins ».

Concrètement la Cnam suggère de mettre en place des contrats individuels par lesquels les médecins s’engageraient à respecter des quotas de prescriptions de génériques. Cette proposition est totalement rejetée par ces derniers. Non seulement, ils refusent sur le principe la notion d’engagement individuel mais en plus ils estiment qu’ils doivent rester maîtres des prescriptions aux malades qui ne peuvent, selon eux, être uniquement tributaires de critères comptables.

Les génériques ne percent pas

Cette mesure semble faire office de solution miracle. Car si le gouvernement a confirmé qu’il reconnaissait la validité de la revendication des médecins concernant la revalorisation de leurs honoraires, il s’est aussi engagé à ne pas augmenter les cotisations sociales pour que le coût de ces mesures ne soit pas à la charge des salariés. Dans un tel contexte, la question du financement est centrale. Pour Jean-François Copé, le porte-parole du gouvernement, la revalorisation des honoraires des médecins s’inscrit «dans un plan d’ensemble qui inclut la notion de bonnes pratiques médicales et le développement des médicaments génériques».

Quoi qu’il en soit, la question de savoir si le bon usage de la prescription de génériques est suffisant pour financer les mesures actuellement envisagées, peut être posée. Le débat sur les génériques n’est pas nouveau en France. Et malgré des incitations renouvelées, il n’a pas été possible pour le moment de faire passer leur utilisation dans les pratiques courantes. Même si les Français ne marquent pas de réticence de principe par rapport aux médicaments génériques, nombreux sont ceux qui restent attachés à certaines spécialités et ne désirent pas changer leur traitement. Pression des malades ou réticence des médecins, le résultat est là, comme l’indique un rapport de la Cnam sur les médicaments les plus prescrits en France, les spécialités restent en tête et les génériques ne percent pas.

C’est toute l’organisation du système de santé, les pratiques établies et les a priori à la fois des médecins, des pharmaciens et des patients qui doivent être pris en compte pour arriver à changer la donne et obtenir le résultat escompté, dont il n’est pas évident qu’il soit aussi probant que promis en terme d’économies. Selon le syndicat national de l’industrie pharmaceutique, ce débat est, en effet, «secondaire» car les médicaments ne représentent que 15,7 % du total des dépenses de santé. Et sur ce marché, le nombre de génériques disponibles en France reste encore très limité.



par Valérie  Gas

Article publié le 04/06/2002