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Football

Le passé se rappelle au présent

L'Allemagne et le Brésil face à face. Une affiche inattendue en regard du présent. Une affiche que l'on désespérait de voir depuis 68 ans.
Comment le présent s'inscrit-il par rapport à l'Histoire?
Voilà très certainement un sujet de philosophie qui aurait tenté bien des candidats au baccalauréat.

Curieusement la finale de la Coupe du monde qui opposera, dimanche à Yokohama, l'Allemagne au Brésil est un événement à méditer et qui s'insère parfaitement dans le cadre de notre question préalable.

Le présent, ce sont deux équipes moribondes -ou considéres comme telles- qui avaient pioché comme jamais pour avoir le droit de participer au Mondial asiatique. Etrillée, entre autres, à Munich par l'Angleterre cinq buts à un -humiliation majeure- l'Allemagne avait dû avoir recours aux repêchages pour obtenir son visa. Le Brésil n'avait pas été mieux loti, seulement quatrième sur dix des éliminatoires sud-américaines. En schématisant deux équipes fantômatiques, délaissées à juste raison au moment des pronostics. Pour une fois qu'on ne prenait pas les lignes d'un palmarès pour évaluer les chances des éventuels candidats au titre,on se disait qu'enfin on prenait en considération la forme du présent et non pas le passé, si glorieux fût-il.

Au rendez-vous de l'Histoire

Car le passé avec le Brésil et l'Allemagne, c'est quelque chose: quatre titres pour le premier, trois pour le deuxième. Six finales pour l'un comme pour l'autre. Seize participations, avant celle de cette année, sur seize possibles pour le Brésil; quatorze pour l'Allemagne. En fait, aussi bien car les Allemands n'avaient pas été invités à la première édition en 1930, de même qu'au lendemain de la seconde guerre mondiale, ils avaient été écartés du rendez-vous de 1950, le premier de l'après-guerre. Ces deux pays additionnaient les plus. D'un côté, l'aspect magique, féérique du football brésilien, l'équipe mythique. De l'aure côté le réalisme impitoyable du football allemand, un football mécanique et dévastateur. Jamais battu d'avance. En France, on garde toujours en mémoire la demi-finale de 1982, à Séville. Les Allemands, bien que menés 3-1 lors des prolongations, étaient revenus à égalité avant de s'imposer dans l'épreuve des tirs au but. On peut les dire dominés, usés, laminés, à l'agonie, on peut les dire sans imagination, ce sont souvent eux qui finissent par gagner.
Voilà comment l'Histoire, cette année, a bousculé le présent. Nous proposant pour la finale l'affiche impossible de cette confrontation Brésil-Allemagne qui ne s'est jamais produite dans toute l'histoire de la Coupe du monde. Toujours têtes de série, ils ne pouvaient pas se retrouver ensemble dans les matches de poule. Le sort et l'élimination des uns ou des autres ont fait que ce match de rêve s'est transformé en rendez-vous manqués. Probable, souhaitable au XXe siècle, il apparaissait improbable voire inimaginable en ce début de XXIe siècle. Pourtant quand la France, l'Argentine, l'Italie, l'Espagne et l'Angleterre étaient envoyées au tapis, l'Allemagne et le Brésil faisaient de la résistance.
Quand l'impossible paraît probable, c'est à ce moment-là qu'il rencontre le possible.

Quand le présent fait fi de l'Histoire, c'est l'Histoire qui se rappelle au bon souvenir du présent.



par Gérard  Dreyfus

Article publié le 27/06/2002