Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Congo démocratique

Victimes de la guerre et du sida

Au moment où se tient la conférence mondiale de Barcelone sur le sida, Catherine Ninin s’est rendue en RD Congo où le sida gagne du terrain dans un pays ravagé par la guerre.
De notre envoyée spéciale en République démocratique du Congo

Ecoutez le magazine Reporter de Catherine Ninin (durée 20 minutes)

«Combien d’entre vous ont déjà violé une femme ?» Sans hésitation, une main se lève, puis deux, trois, dix… Les jeunes soldats interrogés à Goma dans l’est de la République démocratique du Congo reconnaissent sans peine avoir violé des femmes. «J’ai fait comme les autres», explique doucement l’un d’entre eux. Ici comme dans l’ensemble du pays, le sida fait partie des dégâts collatéraux provoqué par les conflits qui ravagent la RDC depuis des années.

Si l’on s’en tient au chiffres officiels, la séroprévalence du VIH sida en République démocratique du Congo est estimé à 5% de la population... Mais selon Mashako Mamba, le ministre congolais de la Santé, elle serait déjà de 10% à Matadi, le principal port du pays, même chiffre avancé pour Lubumbashi, la capitale du cuivre dans le Katanga. Quant à l'est du pays occupé par la rébellion, ce taux avoisinerait les 20% et plus.

Des chiffres alarmants mais difficilement vérifiables en l'absence de toute véritable étude épidémiologique. Malgré tout il semble bien que la guerre ait entraîné ces dernières années une hausse conséquente du sida affectant l'ensemble de la population mais plus particulièrement les jeunes, la force active du pays. Dans les zones de conflits, particulièrement l'est du pays, province orientale, nord et sud Kivu, nord du Katanga, de nombreux viols sont signalés commis par des soldats, congolais ou non.


Les besoins sont immenses

En effet, malgré les accords de Lusaka signés en 1999 et censés mettre fin à la guerre, les forces armées étrangères sont toujours présentes en RDC. Tant amies qu'ennemies, elles viennent de pays où le taux d'infection au VIH/sida est élevé. Le Zimbabwe compte 25% de séroprévalence, le Rwanda 12%, l'Ouganda 8%.

Conflits successifs depuis 1996, déplacements de population à répétition, la situation économique du pays déjà très précaire s'est largement aggravée avec pour conséquence directe, un terrible appauvrissement de la population déjà exsangue sous Mobutu et une hausse de la prostitution. Autant de facteurs d'accroissement du risque de propagation du VIH/sida.

Depuis novembre 1999, Les casques bleus de la MONUC sont censés vérifier le désengagement des forces et le respect du cessez le feu. Environs 3 500 militaires sont ainsi déployés dans ce pays cinq fois grand comme la France. Conscient du danger que représente le sida pour ses troupes, accusées parfois de comportement sexuel à risque, L'état-major de la MONUC n'a qu'un mot d'ordre «prévention à tout prix». Chaque soldat se voit remettre son lot de préservatifs accompagné d'un petit bréviaire sur le sida. «C'est Tout simplement pour ne pas jouer avec sa vie» explique le général Mountaga Diallo, commandant de la force de la MONUC. A chacun, espérons le, de suivre ces précieux conseils.

La République démocratique du Congo s'attaque, elle, à ce nouveau défi, la lutte contre le sida aidé en cela par l'OMS, Onusida et la Banque mondiale. Mais les besoins sont immenses. Soixante-quinze pour cent des infrastructures sanitaires sont délabrées, les médicaments manquent tout comme les préservatifs et la sécurité transfusionnelle n'est pas assurée. Un espoir toutefois, l'inauguration toute récente du premier centre de transfusion sanguine à Kinshasa, un centre de référence pour toute l'Afrique centrale et puis enfin l'arrivée des premiers anti-rétroviraux dans la capitale Kinshasa. De quoi donner du baume au coeur aux nombreux bénévoles des ONG locales qui chaque jour se battent pour gagner cette nouvelle guerre contre le VIH.





par Catherine  Ninin

Article publié le 10/07/2002