Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Burkina Faso

Bombardement de nuages pour faire tomber la pluie

Le gouvernement burkinabè a lancé le 9 juillet 2002 un programme de bombardement des nuages pour provoquer la pluie. Dénommé «Saaga», c’est-à-dire pluie en langue locale, ce programme vise à obtenir une bonne pluviométrie dans ce pays sahélien où la sécheresse sévit de façon cyclique.
De notre correspondant au Burkina Faso

Provoquer la pluie! Ce n’est pas une blague, mais bien une réalité scientifique. La technique consiste à ensemencer les nuages en les bombardant de cristaux de sels à l’aide d’avions et de générateurs installés au sol. Le processus de précipitation est ainsi accéléré et voilà toutes les chances réunies pour qu’il pleuve.

Cette technologie américaine est expérimentée au Maroc depuis le milieu des années 1980. En 1998, alors que la plupart des barrages du Burkina sont complètement asséchés, le gouvernement fait appel aux techniciens marocains. Quelques mois d’intervention ont suffit à convaincre les autorités burkinabè de l’efficacité de la technique de provocation «artificielle» des pluies. «La pluviométrie a connu une augmentation générale de 14 % par rapport à la campagne 1997, affirme Salif Diallo, ministre de l’agriculture et de l’hydraulique. Dans la même année 1998, les différents barrages ont connu un fort taux de remplissage jamais égalé jusque-là».

Très vite, la décision a été prise en conseil des ministres de lancer un programme «Saaga» dans la durée avec des moyens et des techniciens burkinabè. C’est ainsi qu’un peu plus de 4,5 milliards de FCFA ont été débloqués pour l’achat de matériels et la formation de techniciens aux Etats-Unis et au Maroc. Aujourd’hui, le pays est équipé de 3 petits avions adaptés pour l’opération, de radar, d’un laboratoire de physique de nuages, etc. Toutes les conditions sont donc réunies pour forcer le ciel à ouvrir les vannes.

Officiellement on assure que l’opération est sans danger pour l’environnement

Le programme a été lancé officiellement le 9 juillet sur la base aérienne de Ouagadougou qui accueille les installations grâce à un financement d'un montant global de 250 millions de CFA accordé par la France, le Danemark, les Pays-Bas et Taiwan. L’opération a été lancée en présence des représentants de la communauté musulmane et chrétienne qui avaient multiplié les prières ces dernières semaines pour implorer la générosité de Dieu.

Selon le colonel Abraham Traoré, coordonnateur du programme, l’opération est sans danger pour l’environnement. Il assure que les produits chimiques lancés dans les nuages ne sont pas toxiques. «En fait, on ne fabrique pas les nuages, on ne fait qu’accélérer leur processus de formation pour précipiter la pluie», précise-t-il.

Si quelques burkinabè restent sceptiques sur l’efficacité de cette technologie, la majorité la réclamait depuis la saison dernière où la pluviométrie de l’ensemble du pays n’était pas à la hauteur des attentes. Cette année, la situation est pire. Les premières pluies attendues en avril ou en mai selon les régions ne sont venues qu’à la fin du mois de juin. Les barrages qui alimentent Ouagadougou en eau potable sont à leur plus bas niveau avec pour conséquences, de graves pénuries d’eau dans certains quartiers de la ville. En campagne, notamment dans le centre du pays, les paysans n’ont pas encore semé deux mois après le début théorique de la saison agricole.

«La situation est inquiétante», résume Salif Diallo pour qui le programme Saaga «est un espoir pour les paysans.» Selon, le directeur général de la météorologie du Burkina, tout n’est pas perdu pour les paysans. «Jusqu’au 15 juillet, on peut encore semer et rattraper la saison», rassure-t-il. Il reste que dans ce cas, les risques de disettes ici et là sont réels, d’autant que les paysans comptent en général sur les récoltes précoces pour mettre fin à la période de soudure. Or, la situation est particulièrement critique cette année où une quinzaine de provinces du pays sont déficitaires sur le plan alimentaire. Avec une agriculture essentiellement pluviale, tout déficit pluviométrique entraîne automatiquement un déficit agricole.



par Alpha  Barry

Article publié le 12/07/2002