Afrique du Sud
Sida: Mandela messager des malades
En rendant visite à Zackie Achmat, le leader de la campagne contre le sida, Nelson Mandela s'est directement impliqué dans le combat pour les soins aux malades.
De notre correspondante en Afrique du Sud
Zackie Achmat redoutait que Nelson Mandela insiste, comme ses proches, pour qu’il prenne des antirétroviraux. «Tout le monde le sait, il est difficile de refuser quelque chose à Mandela», a-t-il confié après avoir reçu la visite de l’ancien président, samedi dernier, à son domicile du Cap. Le président de Campagne d’action pour les traitements (TAC), l’association la plus militante du pays contre le sida, n’a pas reçu des remontrances. Nelson Mandela était venu lui prêter une oreille attentive, lui demandant à quelles conditions il accepterait de se soigner. Zachie Achmat a souvent répété qu’il ne se résoudrait à prendre lui-même des antirétroviraux, disponibles au prix fort dans les pharmacies, que lorsque la majorité de ses concitoyens, trop pauvres pour se les acheter, y auraient accès à moindre coût dans les hôpitaux publics. «Cela va au-delà de ma propre santé, a-t-il déclaré, beaucoup de gens meurent».
En Afrique du Sud, un pays où 11 % de la population est contaminée (5 millions de personnes), quelque 300 000 personnes mourront du sida cette année. Autant de vies, répète TAC, qui auraient pu être prolongées.
Pour la première fois, Nelson Mandela s’est directement impliqué dans le dossier du sida. A plusieurs reprises, ces dernières années, il a appelé le gouvernement et son propre parti à arrêter les «débats futiles», pour enfin passer à l’action contre l’endémie. Conciliant, Mandela n’a pas voulu faire de commentaire sur la politique du gouvernement, et a défendu la nécessité de mener des études scientifiques pour savoir «si les conclusions tirées en Europe sont applicables à notre peuple, considérant la pauvreté et les conditions non hygiéniques dans lesquelles les gens vivent ici». Il n’empêche : l’ancien héros de la lutte contre l’apartheid aura rendu hommage à l’actuel héros de la lutte contre le sida en Afrique du Sud. Et promis de porter son message au président Thabo Mbeki.
L’initiative de cette rencontre est venue de TAC, qui cherche à faire pression sur le gouvernement pour qu’il distribue à grande échelle les versions génériques des trithérapies. Son idée : faire de Nelson Mandela un médiateur avec Thabo Mbeki, pour qu’il «reconnaisse l’utilité des antirétroviraux et que des projets pilotes soient mis en place avant un accès universel aux traitements».
Les autorités se retranchent souvent derrière l’argument financier, de même qu’un principe égalitaire «d’accès universel» qui l’empêche de d’apporter des traitements à quelques-uns, et pas à tous.
La réponse du porte-parole de la présidence n’a pas été très encourageante. «Le président ne sait pas de quoi il s’agit et l’ancien président ne lui a parlé de cette question», a déclaré Bheki Khumalo après l’entretien de Nelson Mandela et Zackie Achmat. Le refus du gouvernement d’apporter des antirétroviraux exaspère de plus en plus en Afrique du Sud. «Nous sommes le seul pays à ne pas avoir de politique en matière de traitements», a tempêté le 27 juillet dernier Kgosi Letlape, le président de l’Association des médecins sud-africains (Sama). «Nous prenons part à un système qui commet un génocide», a-t-il ajouté. A Johannesburg, une manifestation d’étudiants a été organisée hier pour la première fois contre le sida. Son mot d’ordre : «briser le silence» et demander une politique plus active de prévention et de dépistage, de même que l’accès des malades aux médicaments.
Briser le silence
La dernière polémique en date, autour d’une aide de 600 millions de rands apporté à la province du Kwazulu Natal par le Fonds global des Nations unies sur le sida, a valu à la ministre de la Santé des critiques plus virulentes que jamais. Outre plusieurs partis d’opposition, l’archevêque anglican du Cap, Njongonkulu Ndungane, a demandé la démission de Manto Tshabalala-Msimang. Soutenue par l’ANC, la ministre, elle, n’en démord pas : toute aide doit passer par les canaux officiels, sans possibilité d’aller directement à une province particulière.
Une manière pour le gouvernement de régler ses comptes avec le Kwazulu Natal. Dans cette province, la plus touchée du pays par l’endémie, le gouvernement local a en effet décidé de ne pas s’en tenir à la politique officielle du pays, en commençant à distribuer des antirétroviraux dans les hôpitaux provinciaux. Aussi l’association TAC s’est-elle inquiétée de voir l’aide promise par les Nations unies diluée entre les neuf provinces du pays, sans servir à ce qui était l’un de ses buts initiaux dans le Kwazulu Natal, l’achat de traitements antirétroviraux.
Zackie Achmat redoutait que Nelson Mandela insiste, comme ses proches, pour qu’il prenne des antirétroviraux. «Tout le monde le sait, il est difficile de refuser quelque chose à Mandela», a-t-il confié après avoir reçu la visite de l’ancien président, samedi dernier, à son domicile du Cap. Le président de Campagne d’action pour les traitements (TAC), l’association la plus militante du pays contre le sida, n’a pas reçu des remontrances. Nelson Mandela était venu lui prêter une oreille attentive, lui demandant à quelles conditions il accepterait de se soigner. Zachie Achmat a souvent répété qu’il ne se résoudrait à prendre lui-même des antirétroviraux, disponibles au prix fort dans les pharmacies, que lorsque la majorité de ses concitoyens, trop pauvres pour se les acheter, y auraient accès à moindre coût dans les hôpitaux publics. «Cela va au-delà de ma propre santé, a-t-il déclaré, beaucoup de gens meurent».
En Afrique du Sud, un pays où 11 % de la population est contaminée (5 millions de personnes), quelque 300 000 personnes mourront du sida cette année. Autant de vies, répète TAC, qui auraient pu être prolongées.
Pour la première fois, Nelson Mandela s’est directement impliqué dans le dossier du sida. A plusieurs reprises, ces dernières années, il a appelé le gouvernement et son propre parti à arrêter les «débats futiles», pour enfin passer à l’action contre l’endémie. Conciliant, Mandela n’a pas voulu faire de commentaire sur la politique du gouvernement, et a défendu la nécessité de mener des études scientifiques pour savoir «si les conclusions tirées en Europe sont applicables à notre peuple, considérant la pauvreté et les conditions non hygiéniques dans lesquelles les gens vivent ici». Il n’empêche : l’ancien héros de la lutte contre l’apartheid aura rendu hommage à l’actuel héros de la lutte contre le sida en Afrique du Sud. Et promis de porter son message au président Thabo Mbeki.
L’initiative de cette rencontre est venue de TAC, qui cherche à faire pression sur le gouvernement pour qu’il distribue à grande échelle les versions génériques des trithérapies. Son idée : faire de Nelson Mandela un médiateur avec Thabo Mbeki, pour qu’il «reconnaisse l’utilité des antirétroviraux et que des projets pilotes soient mis en place avant un accès universel aux traitements».
Les autorités se retranchent souvent derrière l’argument financier, de même qu’un principe égalitaire «d’accès universel» qui l’empêche de d’apporter des traitements à quelques-uns, et pas à tous.
La réponse du porte-parole de la présidence n’a pas été très encourageante. «Le président ne sait pas de quoi il s’agit et l’ancien président ne lui a parlé de cette question», a déclaré Bheki Khumalo après l’entretien de Nelson Mandela et Zackie Achmat. Le refus du gouvernement d’apporter des antirétroviraux exaspère de plus en plus en Afrique du Sud. «Nous sommes le seul pays à ne pas avoir de politique en matière de traitements», a tempêté le 27 juillet dernier Kgosi Letlape, le président de l’Association des médecins sud-africains (Sama). «Nous prenons part à un système qui commet un génocide», a-t-il ajouté. A Johannesburg, une manifestation d’étudiants a été organisée hier pour la première fois contre le sida. Son mot d’ordre : «briser le silence» et demander une politique plus active de prévention et de dépistage, de même que l’accès des malades aux médicaments.
Briser le silence
La dernière polémique en date, autour d’une aide de 600 millions de rands apporté à la province du Kwazulu Natal par le Fonds global des Nations unies sur le sida, a valu à la ministre de la Santé des critiques plus virulentes que jamais. Outre plusieurs partis d’opposition, l’archevêque anglican du Cap, Njongonkulu Ndungane, a demandé la démission de Manto Tshabalala-Msimang. Soutenue par l’ANC, la ministre, elle, n’en démord pas : toute aide doit passer par les canaux officiels, sans possibilité d’aller directement à une province particulière.
Une manière pour le gouvernement de régler ses comptes avec le Kwazulu Natal. Dans cette province, la plus touchée du pays par l’endémie, le gouvernement local a en effet décidé de ne pas s’en tenir à la politique officielle du pays, en commençant à distribuer des antirétroviraux dans les hôpitaux provinciaux. Aussi l’association TAC s’est-elle inquiétée de voir l’aide promise par les Nations unies diluée entre les neuf provinces du pays, sans servir à ce qui était l’un de ses buts initiaux dans le Kwazulu Natal, l’achat de traitements antirétroviraux.
par Sabine Cessou
Article publié le 30/07/2002