Liberia
Prince Johnson: «pourquoi je veux rentrer au pays»
Le chef de guerre exilé au Nigeria explique sur RFI les raisons de son retour annoncé au Liberia où il souhaite prendre part à la prochaine élection présidentielle. Portrait et interview.
Un jour en treillis, le lendemain en soutane, Prince Yormie Johnson prétend n'avoir pour seules préoccupations que Dieu et le Liberia. Le jour de Noël 1989 marque son premier fait d'arme. Avec quelques miliciens, il conduit, à partir de la frontière ivoirienne, la première attaque du NPFL (National Patriotic Front of Liberia) contre le régime de Samuel Doe. C'est officiellement le début des 7 années de guerre civile libérienne.
Très rapidement, Prince Johnson entre en conflit avec Charles Taylor, son ancien mentor rencontré en Libye; et fonde sa propre faction: le NPFL indépendant. Dès lors, le nouveau seigneur de la guerre n'aura que deux missions : chasser le président Samuel Doe du pouvoir et empêcher Charles Taylor de s'installer dans le palais présidentiel de Monrovia.
En septembre 90, deux semaines après l'arrivée de l'ECOMOG à Monrovia, celui que l'on surnomme déjà le prince de la Kalach tend un piège au jeune et naïf président. La folie de Prince Johnson apparaît au grand jour. Devant les caméras de télévision, Samuel Doe est supplicié à mort avec 64 membres de sa garde.
«Je rentre pour aider mon pays»
Prince Johnson devient alors le symbole de la nouvelle barbarie libérienne. Ses hommes accusés de vol, de viol ou de tout type d'exaction à l'encontre des civils sont systématiquement abattus par le chef. Une façon pour lui d'obtenir l'appui d'une population lassée de la soldatesque de Doe.
Malgré le soutien américain et la bienveillance de l'ECOMOG (la force d’interposition ouest-africaine), il ne pourra en revanche jamais mener à bien son entreprise contre Charles Taylor. En octobre 1992, Prince Johnson dépose les armes après l'assaut lancé par les forces du NPFL sur la capitale. Seule solution pour ne pas connaître le même sort que Samuel Doe, il se réfugie au Nigeria où il entame une carrière d'évangéliste. Entre la dévotion religieuse et le goût du pouvoir, Prince Johnson semble finalement avoir fait son choix. Pour la plus grande inquiétude des libériens.
Aujourd’hui Prince Johnson entend rentrer au Liberia. Il vient de créer son propre parti, le Parti du développement citoyen, et il souhaite briguer le fauteuil présidentiel lors de l'élection de 2003. Le gouvernement libérien et la CEDEAO (Communuaté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest) lui ont donné l'autorisation de revenir, il ne lui manque plus que l'aval de la commission électorale libérienne. Pour le moment Prince Johnson se trouve toujours à Lagos, où Cyril Bensimon l’a interrogé.
RFI: Avez-vous des regrets concernant votre passé de chef de guerre?
Prince Yormie Johnson: C'est certain je regrette. Même si nous avons pris les armes uniquement pour nous débarrasser de Samuel Doe. Doe était la cause de la guerre. Je regrette car quand deux éléphants se confrontent dans la forêt, c'est la terre, le peuple, qui souffre. Doe était incontrôlable, complètement corrompu, c'était un pur dictateur, un tyran. Tout le monde lui a demandé de se retirer, il a toujours refusé. Des hommes d'église lui ont rendu visite pour s'entretenir avec lui, beaucoup ont été incarcérés, beaucoup sont morts. Je dois donc dire aux Libériens que je suis désolé si nos armes les ont blessé dans notre combat pour chasser DOE du pouvoir. Beaucoup d'innocents sont morts mais il était impossible de se débarrasser de DOE par des voies démocratiques. Doe ne croyait que dans les armes, il nous fallait donc utiliser des armes plus puissantes que les siennes pour le battre. Ceux qui n'avaient pas d'endroit pour fuire, pour se cacher ont souffert à cause de notre lutte. Je suis donc désolé et je demande pardon au peuple libérien.
RFI : Pourquoi voulez-vous rentrer au Liberia ?
Prince Yormie Johnson: Aujourd'hui, je suis un serviteur du Christ, un évangéliste, mais malgré cela j'ai pour ambition de rentrer au Liberia pour participer à l'élection présidentielle de 2003. Je rentre pour aider mon pays et, comme vous le savez, la seule façon pour moi de contribuer au redressement du Liberia est de présenter mon programme lors de la présidentielle. Notre pays est divisé par la guerre, il a besoin d'unité, notre parti va donc se battre pour la réconciliation nationale et pour une restructuration de l'armée. Nous voulons servir notre peuple, nous ne rentrons pas pour être servi. Nous voulons amener le développement à notre peuple, c'est pour cela que notre parti s'appelle le Parti du développement citoyen.
RFI : Quels sont vos liens avec les rebelles du LURD (Libériens unis pour la réconciliation et la démocratie) ?
Prince Yormie Johnson: Je n'ai pas de contacts directs avec le LURD. Cependant je peux vous dire que l'un de ses porte-parole m'a téléphoné une fois pour savoir si je voulais les rejoindre pour chasser du pouvoir le gouvernement de Charles Taylor. Je leur ai répondu qu'il n'en était pas question, que je ne suis plus intéressé par la guerre. Je leur ai, par contre, demandé s'ils voulaient me rejoindre au sein d'un parti pour combattre politiquement Charles Taylor. A chaque fois qu'éclate une guerre, c'est le peuple qui souffre. J'ai donc écris une lettre au LURD pour leur demander d'accepter le plan de paix de la CEDEAO pour le Liberia, de se rendre à Abuja plutôt que de prendre les armes. Ils m'ont répondu «non». Nous, nous pensons que la guerre n'est cette fois pas nécessaire. Nous pensons que nous pouvons chasser Taylor du pouvoir par des biais démocratiques.
Très rapidement, Prince Johnson entre en conflit avec Charles Taylor, son ancien mentor rencontré en Libye; et fonde sa propre faction: le NPFL indépendant. Dès lors, le nouveau seigneur de la guerre n'aura que deux missions : chasser le président Samuel Doe du pouvoir et empêcher Charles Taylor de s'installer dans le palais présidentiel de Monrovia.
En septembre 90, deux semaines après l'arrivée de l'ECOMOG à Monrovia, celui que l'on surnomme déjà le prince de la Kalach tend un piège au jeune et naïf président. La folie de Prince Johnson apparaît au grand jour. Devant les caméras de télévision, Samuel Doe est supplicié à mort avec 64 membres de sa garde.
«Je rentre pour aider mon pays»
Prince Johnson devient alors le symbole de la nouvelle barbarie libérienne. Ses hommes accusés de vol, de viol ou de tout type d'exaction à l'encontre des civils sont systématiquement abattus par le chef. Une façon pour lui d'obtenir l'appui d'une population lassée de la soldatesque de Doe.
Malgré le soutien américain et la bienveillance de l'ECOMOG (la force d’interposition ouest-africaine), il ne pourra en revanche jamais mener à bien son entreprise contre Charles Taylor. En octobre 1992, Prince Johnson dépose les armes après l'assaut lancé par les forces du NPFL sur la capitale. Seule solution pour ne pas connaître le même sort que Samuel Doe, il se réfugie au Nigeria où il entame une carrière d'évangéliste. Entre la dévotion religieuse et le goût du pouvoir, Prince Johnson semble finalement avoir fait son choix. Pour la plus grande inquiétude des libériens.
Aujourd’hui Prince Johnson entend rentrer au Liberia. Il vient de créer son propre parti, le Parti du développement citoyen, et il souhaite briguer le fauteuil présidentiel lors de l'élection de 2003. Le gouvernement libérien et la CEDEAO (Communuaté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest) lui ont donné l'autorisation de revenir, il ne lui manque plus que l'aval de la commission électorale libérienne. Pour le moment Prince Johnson se trouve toujours à Lagos, où Cyril Bensimon l’a interrogé.
RFI: Avez-vous des regrets concernant votre passé de chef de guerre?
Prince Yormie Johnson: C'est certain je regrette. Même si nous avons pris les armes uniquement pour nous débarrasser de Samuel Doe. Doe était la cause de la guerre. Je regrette car quand deux éléphants se confrontent dans la forêt, c'est la terre, le peuple, qui souffre. Doe était incontrôlable, complètement corrompu, c'était un pur dictateur, un tyran. Tout le monde lui a demandé de se retirer, il a toujours refusé. Des hommes d'église lui ont rendu visite pour s'entretenir avec lui, beaucoup ont été incarcérés, beaucoup sont morts. Je dois donc dire aux Libériens que je suis désolé si nos armes les ont blessé dans notre combat pour chasser DOE du pouvoir. Beaucoup d'innocents sont morts mais il était impossible de se débarrasser de DOE par des voies démocratiques. Doe ne croyait que dans les armes, il nous fallait donc utiliser des armes plus puissantes que les siennes pour le battre. Ceux qui n'avaient pas d'endroit pour fuire, pour se cacher ont souffert à cause de notre lutte. Je suis donc désolé et je demande pardon au peuple libérien.
RFI : Pourquoi voulez-vous rentrer au Liberia ?
Prince Yormie Johnson: Aujourd'hui, je suis un serviteur du Christ, un évangéliste, mais malgré cela j'ai pour ambition de rentrer au Liberia pour participer à l'élection présidentielle de 2003. Je rentre pour aider mon pays et, comme vous le savez, la seule façon pour moi de contribuer au redressement du Liberia est de présenter mon programme lors de la présidentielle. Notre pays est divisé par la guerre, il a besoin d'unité, notre parti va donc se battre pour la réconciliation nationale et pour une restructuration de l'armée. Nous voulons servir notre peuple, nous ne rentrons pas pour être servi. Nous voulons amener le développement à notre peuple, c'est pour cela que notre parti s'appelle le Parti du développement citoyen.
RFI : Quels sont vos liens avec les rebelles du LURD (Libériens unis pour la réconciliation et la démocratie) ?
Prince Yormie Johnson: Je n'ai pas de contacts directs avec le LURD. Cependant je peux vous dire que l'un de ses porte-parole m'a téléphoné une fois pour savoir si je voulais les rejoindre pour chasser du pouvoir le gouvernement de Charles Taylor. Je leur ai répondu qu'il n'en était pas question, que je ne suis plus intéressé par la guerre. Je leur ai, par contre, demandé s'ils voulaient me rejoindre au sein d'un parti pour combattre politiquement Charles Taylor. A chaque fois qu'éclate une guerre, c'est le peuple qui souffre. J'ai donc écris une lettre au LURD pour leur demander d'accepter le plan de paix de la CEDEAO pour le Liberia, de se rendre à Abuja plutôt que de prendre les armes. Ils m'ont répondu «non». Nous, nous pensons que la guerre n'est cette fois pas nécessaire. Nous pensons que nous pouvons chasser Taylor du pouvoir par des biais démocratiques.
par Propos recueillis par Cyril Bensimon
Article publié le 22/07/2002