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Agriculture

L’Europe entame une réforme-marathon

La fièvre réformatrice s'est emparée de Franz Fischler, commissaire européen à l'agriculture et la pêche. Un mois après avoir lancé des propositions de réduction drastique de la flotte de pêche au sein de l'Union européenne, il a fait approuver par la Commission européenne un projet de réforme de la sacro-sainte politique agricole commune. Les premières réactions, dans les pays concernés, sont à la mesure des intérêts en jeu.
Le traité instituant la Communauté européenne, en 1957, donnait à la politique agricole commune l'objectif d'accroître la productivité en développant le progrès technique et en rationalisant la production. Depuis, l'Union européenne a atteint les limites d'une agriculture productiviste avec des crises sanitaires à répétition, vaches folles ou fièvres aphteuses, et l'explosion des dépenses communautaires destinées à ce secteur : plus de 43 milliards d'euros en 2001, soit près de 40% du budget total.

D'autant que les critiques à l’égard de la PAC ne manquent pas, tant à l’intérieur de l’UE qu’à l’extérieur. Le nouveau cycle de négociations qui a débuté dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce tend à la disparition des aides à l’agriculture afin de rétablir la concurrence libérale des échanges. De plus, les subventions agricoles sont dénoncées comme autant d’obstacles aux exportations des pays en développement. Parmi les pays membres de l’Union européenne certains dénoncent le poids excessif des dépenses agricoles et poussent à une réforme rapide, avant que l’élargissement à des pays d’Europe centrale et orientale, encore largement ruraux, ne vienne encore charger la barque. On trouve de ce côté les «contributeurs nets» de la PAC, ceux qui payent plus qu’ils ne reçoivent, avec en tête des partisans du «dégraissage» de la PAC, l’Allemagne suivie du Royaume-Uni des Pays-Bas et de la Suède.

Projets environnementaux

Mais que propose donc le commissaire Fischler ? Sur le plan financier, l’économie attendue n’est guère que de 200 millions d’euros par an en début de période, sur plus de 40 milliards annuels consacrés à la PAC, jusqu’à 600 millions d’euros en fin de période. Mais en ce qui concerne l’affectation des fonds, il préconise de sensibles modifications. Le «découplage» implique de supprimer le lien entre les quantités produites ou les superficies exploitées et le montant des aides directes, ce qui favorise les grosses exploitations. Ces aides seraient en outre plafonnées à 300 000 euros par an et par exploitation et réduites progressivement de 3% par an de 2004 à 2010. Les sommes ainsi épargnées seraient versées à un fonds pour le développement rural chargé de favoriser des projets sociaux ou environnementaux.

La réforme de la PAC n’en est cependant qu’à ses débuts et le commissaire européen se prépare davantage, comme il l’a expliqué, à un marathon qu’à un sprint. Dès lundi prochain le projet adopté par la Commission sera présenté aux ministres de l’Agriculture des Quinze qui ont, eux, directement des comptes à rendre à leurs agriculteurs nationaux. Sans attendre, plusieurs centaines de jeunes agriculteurs espagnols ont défilé mercredi devant les institutions européennes à Bruxelles, pour protester contre la mise en danger de leurs intérêts. Une manifestation qui pourrait bien ne pas être la dernière.

A écouter:

Jérôme Regnault, agriculteur au micro d'Isabelle Jammot
L'analyse de Colette Thomas



Dans l’autre camp, essentiellement des bénéficiaires de la PAC dont la France, l’Irlande et les pays du sud de l’Europe. En gros, les mêmes que ceux qui s’opposent à la démolition d’une partie de la flotte de pêche artisanale.



par Francine  Quentin

Article publié le 10/07/2002