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Irak

La guerre n’est pas pour tout de suite

Douze ans après l’invasion du Koweït, la guerre contre l’Irak est toujours à l’ordre du jour. Le président américain George Bush, qui accuse Bagdad d’abriter des terroristes d’al Qaïda et de développer des armes de destruction massive, semble en effet plus que jamais déterminé à renverser le régime de Saddam Hussein. Une détermination qui ne fait pourtant pas l’unanimité au sein de l’administration américaine et qui se heurte également à l’opposition des alliés arabes et européens de Washington. Si elle était arrêtée, une intervention contre l’Irak ne serait en outre pas à l’ordre du jour avant l’automne prochain. Sans doute soucieux de conforter les nombreuses réticences à une attaque américaine, Bagdad a annoncé vendredi être prêt à accueillir Hans Blix, le chef des inspecteurs en désarmement des Nations Unies, afin de discuter d’une éventuelle reprise des missions d’inspection en Irak.
«Saddam Hussein est un homme qui empoisonne son propre peuple, qui menace ses voisins et qui développe des armes de destruction massive». Autant de raisons qui justifient, selon George Bush, une intervention destinée à renverser le régime irakien. Mais cette détermination du président américain, ne fait toutefois pas l’unanimité aux Etats-Unis, à commencer au sein de sa propre administration. Si Dick Cheney, le vice-président et Donald Rumsfeld, le secrétaire à la Défense, sont en effet favorables à des frappes militaires tactiques limitées, la plupart des hauts responsables de l’armée, ainsi que le chef de la diplomatie Colin Powell, adoptent pour leur part une position beaucoup plus prudente, s’inquiétant notamment des conséquences d’une telle intervention sur toute la région. Cette inquiétude est également partagée par de nombreux sénateurs démocrates et républicains. Joseph Biden, qui préside la commission des Affaires étrangères au sénat, a ainsi estimé que «les Etats-Unis ne pouvaient se permettre de remplacer un despote par le chaos». Il a également souligné que dans le cas d’une intervention en Irak, Washington devrait s’engager sur le long terme pour la reconstruction du pays. Une reconstruction qui coûteraient, selon des experts, des milliards de dollars et qui impliquerait la présence prolongée d’une force de maintien de la paix civile et militaire.

La perspective d’une nouvelle guerre du Golfe, destinée à renverser le régime de Saddam Hussein, a également été accueillie avec réticence par les alliés de Washington. L’Europe, par la voix de son représentant pour la politique étrangère Javier Solana, a ainsi affirmé «ne pas vouloir la guerre» contre l’Irak, même si elle continue à multiplier les mises en demeure au président Saddam Hussein. Les présidents allemand et français ont pour leur part souligné qu’une intervention militaire contre l’Irak devaient nécessairement être fondée sur un mandat de l’ONU, tandis qu’à Rome le ministre de la Défense, Antonio Martino, affirmait ne pas être convaincu des «intentions belliqueuses de l’Irak». Plus réticents encore, les pays arabes estiment qu’une action contre l’Irak pourrait embraser la région et sonner le glas de leurs efforts pour la paix dans le conflit israélo-palestinien. Et l’Arabie saoudite, pourtant principale alliée de Washington dans la région, a clairement signifié son opposition à une telle intervention. La presse officielle saoudienne, beaucoup plus virulente que de coutume, a en effet accusé les Etats-Unis de chercher à «occuper l’Irak et imposer leur hégémonie» dans la région.

L’Irak lâche du lest

Les autorités irakiennes ont créé la surprise jeudi en annonçant qu’elles étaient prêtes à recevoir, à Bagdad, Hans Blix, le chef des inspecteurs en désarmement de l’Onu, pour discuter d’une éventuelle reprise des missions d’inspection en Irak. Dans un message adressé à Kofi Annan, le secrétaire général des Nations-Unies, le ministre irakien des Affaires étrangères Naji Sabri a ainsi affirmé que son gouvernement souhaitait accueillir M. Blix «aussitôt que possible et à une date convenue» d’un accord commun pour «établir une base solide susceptible de dresser les grandes lignes d’une prochaine étape de contrôle et d’inspections». Cette nouvelle position équivaut à un retournement de situation puisque la veille encore, plusieurs responsables irakiens affirmaient en effet vouloir un règlement «global» du dossier avec en premier lieu la levée de l’embargo qui frappe l’Irak depuis douze ans et non pas limiter leurs discussions à la seule reprise des inspections de son armement.

En acceptant le principe d’un retour en Irak des inspecteurs de l’Onu, Bagdad pourrait isoler un peu plus les Etats-Unis dans leur détermination à intervenir militairement dans la région. Et même si les autorités américaines estiment qu’il s’agit d’une nouvelle manœuvre de diversion de la part du régime irakien, elles peuvent difficilement justifier une attaque immédiate alors que l’Irak fait preuve officiellement de bonne volonté. D’autant plus que la Russie, qui a droit de veto au conseil de sécurité de l’Onu, a déjà qualifié de «pas important» l’invitation à Bagdad de Hans Blix. Les missions d’inspection des Nations-Unies en Irak ont été suspendues en décembre 1998 à la veille d’une campagne de raids intensifs américano-britanniques et Bagdad soumettait depuis le retour des inspecteurs de l’Onu à un règlement global du dossier irakien.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 02/08/2002