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Australie

Prisons dès dix ans pour les mineurs

En Australie, un adolescent, dès l’âge de dix ans, peut être condamné et emprisonné, selon les règles de la justice pour mineurs (juvenile justice). Mais s’il existe une «loi commune» identique pour toute la fédération, chaque Etat a un système judiciaire qui lui est spécifique. Les Etats du Territoire-du-Nord et de l’Australie-de-l’Ouest appliquent ainsi la règle impitoyable de la «sentence obligatoire» qui condamne à une incarcération minimale prédéfinie, quel que soit le délit ou l’histoire personnelle du délinquant. L’état du Victoria, quant à lui, applique une batterie de moyens préventifs afin d’éviter l’emprisonnement des adolescents.
De notre correspondante en Australie

Le 10 février 2000, Johnno, un jeune garçon aborigène âgé de 15 ans est mort à l’Hôpital de Darwin. Il s’est pendu dans sa cellule lors de son séjour en détention, à la suite d’un vol de crayons et de peinture. La même année, un autre jeune, Wurramara, a été condamné à un an de prison ferme pour le vol d’une boite de biscuits. Ces cas ont déclenché une série de critiques de la part des associations de droits de l’Homme, ainsi que de la part des Nations Unies et notamment de son secrétaire général Kofi Annan. Mais le gouvernement conservateur de John Howard a rejeté en bloc ces critiques et a rappelé la suprématie des gouvernements locaux dans ce domaine. En effet, chaque Etat bénéficie des pleins pouvoirs en termes de police et de justice.

Les Etats du Territoire-du-Nord et de l’Australie-de-l’Ouest appliquent le «mandatory sentencing» (la sentence obligatoire). Le principe en est simple : au premier délit, le jeune est condamné à une peine minimale de 14 jours, au second à une peine d’au 28 jours et au troisième, et quel que soit le délit, à une condamnation d’un an de prison ferme. Johnno était condamné pour son deuxième délit. Il s’est suicidé lors de son 24ème jour de détention. Quant à Wurramara, le vol d’une boite de biscuits lui a valu un an d’emprisonnement. Le gouvernement de l’Etat du Victoria n’hésite pas à condamner cette pratique et à parler «d’un principe injuste, raciste et immoral constituant un affront à l’indépendance judiciaire». Il admet pourtant que pour «certains délinquants, l’incarcération apparaît comme la seule solution possible, même si celle-ci ne doit intervenir qu’en dernier ressort».

Tentatives de réforme de la justice

L’état du Victoria conduit une politique novatrice dans le domaine de la justice pour mineurs. Cette démarche pourrait bien influencer les autres territoires puisque le taux de délinquance juvénile de cet Etat est le plus bas d’Australie pour les adolescents âgés de 10 à 16 ans. C’est également le seul territoire à avoir étendu la compétence des tribunaux pour enfants aux adolescents âgés de 17 à 20 ans. Les lois du Victoria autorisent ainsi un juge à diriger un jeune vers un centre spécialisé, s’il considère que l’adolescent a de bonnes chances de réhabilitation ou s’il estime qu’il serait trop vulnérable dans une prison pour adultes.

La population carcérale du Victoria, composée d’environ 1200 jeunes, âgés entre 10 et 20 ans , dont 87 % d’hommes, est regroupée dans les 4 centres pour mineurs de l’Etat. Mais seulement 20% d’entre eux sont réellement en détention, 80 % vivant dans des centres tout en restant au contact de la collectivité et bénéficiant d’un programme personnalisé. Malgré des résultats satisfaisants, il faut noter toutefois l’accroissement du nombre de délinquants âgés de 17 à 21 ans, la forte augmentation des délits commis par de jeunes femmes, et la sur-représentation des jeunes aborigènes et d’origine vietnamienne ou cambodgienne. Afin d’éviter qu’un jeune n’aille plus loin dans le système judiciaire, le gouvernement du Victoria a mis en place une série d’outils de prévention, de réhabilitation et de suivi, en partenariat avec la police, les associations et les communautés d’origine.

En Australie, on peut donc se demander si les différents systèmes judiciaires des Etats donnent aux mineurs délinquants les mêmes chances de s’en sortir.


Liens utiles (en anglais):
www.humanrights.gov.au
www.dhs.vic.gov.au



par Carole  Martin

Article publié le 11/08/2002