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Rwanda

Un des principaux «génocidaires» arrêté en Angola

Le général Augustin Bizimungu, ancien chef d'état-major des forces armées rwandaises (FAR), accusé de génocide et réclamé par le tribunal pénal international des Nations Unies pour le Rwanda, a finalement été arrêté en Angola et devrait être emmené à Arusha, siège du TPIR, afin de comparaître pour les crimes qui lui sont reprochés.
Augustin Bizimungu se cachait parmi les soldats démobilisés de l'UNITA et c'est l'actuel chef du mouvement rebelle Paulo Lukamba Gato qui en informé aussi bien les autorités angolaises que des observateurs étrangers, en particulier les Américains, lors de la tournée qu'il a effectué aux États-Unis et en Europe en juin-juillet dernier.

L'aveu quelque peu embarrassé que des anciens FAR dont le général Bizimungu et des anciens membres des forces armées zaïroises (FAZ) étaient dans les camps de regroupement de l'UNITA a ému les Américains. Leur ambassadeur itinérant pour les crimes de guerre Pierre-Richard Prosper a lancé en juin dernier une campagne de «récompense pour la justice» (Rewards for Justice) promettant jusqu'à cinq millions de dollars en échange de renseignements permettant d'arrêter les organisateurs du génocide rwandais de 1994. Augustin Bizimungu figurait d'ailleurs parmi les neuf personnalités les plus recherchées dont les photos ont été publiées par les Américains. .

Le sous-secrétaire d'Etat américain chargé des Affaires africaines Walter Kansteiner avait évoqué le sujet avec le président angolais José Eduardo dos Santos lors de son passage à Luanda en juillet, selon des sources informées angolaises. Une fois l'homme repéré dans un des camps établis pour accueillir les soldats démobilisés de l'UNITA et leurs famille, les autorités angolaises ont décidé de l'arrêter. Deux enquêteurs du TPIR sont arrivés début août à Luanda avec les documents concernant le mandat d'arrêt et les accusations portées contre lui. Ils devraient l'escorter à Arusha pour le remettre entre les mains de la justice.

Le gouvernement angolais a annoncé lundi qu'il allait «exécuter» le mandat d'arrêt international lancé contre le général Bizimungu, précisant qu'il était l'un des 68 militaires de nationalité rwandaise qui, avec 538 autres militaires originaires de la RDC, constituaient des forces étrangères «se trouvant illégalement sur le territoire national et combattaient les institutions de l'Etat angolais». Le communiqué officiel précise aussi que le gouvernement a décidé de recommander aux organes judiciaires d'agir en conformité avec la loi angolaise et des conventions internationales pertinentes afin de mener l'incriminé devant le TPIR qui est reconnu par l'Angola.

Une bonne carte aux yeux des Américains

Il ajoute que le reste des forces étrangères sera mis à la disposition des Nations Unies, selon les dispositions du protocole d'accord signé le 4 avril dernier entre les forces armées angolaises et celles de l'UNITA qui a marqué la fin d'une guerre civile de 27 ans et la défaite militaire du mouvement de Jonas Savimbi tué le 22 février dernier.

La présence du général Bizimungu et ses compatriotes a clairement gêné les dirigeants de l'UNITA au moment où l'ancien mouvement armé cherche à établir sa crédibilité en tant que parti politique devant opérer dans un cadre démocratique. «Nous les avons accueilli pour des raisons humanitaires car ils s'étaient réfugiés dans nos zones», confie en privé un responsable de l'UNITA. Il admet toutefois qu'ils sont arrivés «avec armes et bagages». Il nie que ces Rwandais et Congolais aient été recrutés par l'UNITA mais convient qu'ils ont pu participer aux combats pour se défendre lorsqu'ils ont été pris sous le feu.

Le gouvernement angolais qui a lui aussi besoin d'améliorer son image de marque, a «très bien joué le jeu international» et peut avancer l'argument que l'UNITA avait accueilli des «génocidaires», soulignent des observateurs diplomatiques. Ils estiment que Luanda dispose ainsi d'une bonne carte aussi bien auprès des Américains que du président rwandais Paul Kagame qui vient de conclure un protocole d'accord avec son homologue congolais Joseph Kabila prévoyant le désarmement et le rapatriement des milices Interahamwe impliquées dans le génocide se trouvant en RDC contre le retrait des troupes rwandaises qui occupent l'est du pays.



par Marie  Joannidis

Article publié le 14/08/2002