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Politique française

La délicate rentrée de Jean-Pierre Raffarin

Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, issu des élections du printemps dernier, a fait sa rentrée, il y a quelques jours. Elle devrait être plus difficile que prévu dans une conjoncture moins bonne qu’envisagée. Le Premier ministre va ainsi devoir rendre des arbitrages délicats entre promesses électorales et impératifs budgétaires.
Même s’il ne cesse de dire que lui et son gouvernement sont «sereins», le Premier ministre va être contraint de revoir à la baisse certains de ses objectifs. En deux jours, il vient de se mettre à dos les syndicats d’enseignants et le patronat (Medef) après quelques couacs survenus cet été entre des ministres de la société civile et ceux issus du sérail politique.

Après une lune de miel qui n’aura duré que deux mois, Ernest-Antoine Seillière, le président du Medef, a déterré la hache de guerre contre le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin. A l’issue d’un entretien, le 2 septembre, avec le ministre des Affaires sociales et du Travail, il a rejeté en bloc les propositions de François Fillon sur l’assouplissement de la loi des 35 heures et l’harmonisation du Smic. «La situation est très préoccupante» a estimé le patron des patrons, furieux de ne pas voir aboutir ses propositions. Une déclaration qui est intervenue au lendemain de la polémique sur les effectifs de l’Education nationale.

En effet, le week-end dernier, la communication gouvernementale a de nouveau été mise à mal avec le faux pas des ministres en charge de l’Education nationale. Dimanche, Xavier Darcos, le ministre délégué à l’Enseignement scolaire annonçait «2 000 à 3 000 emplois en moins» dans l’Education nationale dès la rentrée 2003. Quelques heures plus tard, son ministre de tutelle, Luc Ferry, tentait de balayer toute confusion en soulignant que ces suppressions d’emplois porteraient sur des «emplois administratifs» et non pas sur «des postes enseignants». Ce qui d’ordinaire aurait pu paraître comme une banale fausse note est aujourd’hui perçu comme un accroc de plus dans la communication gouvernementale.

Une série de maladresses

Depuis plusieurs semaines, le scénario est immuable : déclaration ambiguë d’un ministre, mise au point par un autre, donnant le sentiment que l’équipe Raffarin n’est pas au diapason ou pilote à vue. Jusqu’ici les cafouillages avaient porté sur l’économie, plus précisément sur les impôts et sur le Smic auquel le Premier ministre avait refusé de donner un «coup de pouce». Jean-Pierre Raffarin avait maladroitement annoncé sa décision avant même la traditionnelle consultation des partenaires sociaux. En juillet, le ministre délégué au Budget, Alain Lambert annonçait une reconduction de la baisse de l'impôt sur le revenu en 2003. Une déclaration aussitôt démentie par son ministre de tutelle, Francis Mer.

Même scénario s’agissant de l’augmentation de la redevance télé, réclamée par le ministre de la Culture, Jean-Jacques Aillagon, avant que ne soit prise la décision définitive par Matignon. Après cette série d’incidents, mise sur le compte de l’inexpérience, la consigne était donc claire pour l’ensemble des ministres : discrétion jusqu’à la présentation du projet de loi des finances, le 25 septembre en Conseil des ministres.

Même si les maladresses se succèdent, l’avantage de Jean-Pierre Raffarin est qu’il peut compter sur un Parlement entièrement dévoué à sa cause après la débâcle de la gauche et le triomphe correspondant de la droite à la présidentielle et aux législatives du printemps dernier. Le Premier ministre, expert en communication, qui depuis son arrivée au pouvoir cultive l’image d’homme de proximité à l’égard de la «France d’en bas», va devoir résoudre, dans les semaines qui viennent, une difficile quadrature du cercle.



par Clarisse  Vernhes

Article publié le 03/09/2002