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Irak

Rhétorique guerrière à Bagdad

Face au déploiement de moyens engagés par les Etats-Unis pour convaincre le reste du monde de la nécessité de renverser le régime de Saddam Hussein, Bagdad, qui jusqu’à présent se contentait d’adresser des critiques, certes virulentes, à l’administration américaine, a appelé mardi «les masses arabes» à frapper les intérêts américains et britanniques partout dans le monde. Les autorités irakiennes, convaincues de l’imminence d’une attaque américaine, ont déjà commencé à préparer la population et la presse officielle. Devançant le discours du président Bush devant l’Assemblée générale de l’ONU, Bagdad a d’ores et déjà prévenu que cette allocution sera truffée de «mensonges vils» pour justifier une telle agression. Sur le terrain et malgré l’embargo, l’armée irakienne se préparerait discrètement à la guerre en tentant notamment de se procurer des pièces détachées pour ses chars et ses avions.
«Nous appelons les masses arabes à combattre les intérêts matériels et humains des agresseurs où qu’ils soient». Jusqu’à présent virulentes, les critiques des autorités irakiennes à l’encontre de l’administration américaine sont montées d’un cran avec cet appel mardi du vice-président Taha Yassine Ramadan. Pressentant sans doute l’imminence d’une attaque américaine, Bagdad a une nouvelle fois plaidé non-coupable concernant les accusations de Washington sur ses présumés stocks d’armes de destruction massive. L’Irak qui se dit prêt à accepter un retour des inspecteurs en désarmement de l’Onu dans le cadre d’«un règlement global» du dossier irakien, a ainsi accusé les Etats-Unis de «fermer la porte» à toute solution pacifique. Selon en effet Naji Sabri, le chef de la diplomatie irakienne, «l’administration américaine ferme à chaque fois la porte à toute proposition de dialogue en vue d’une solution conforme aux résolutions du Conseil de sécurité».

Devançant le très attendu discours du président Bush lors de l’Assemblée générale de l’Onu, la presse irakienne s’en est violemment prise à l’administration américaine. «Bush veut se servir de l’Onu pour mettre à exécution ses complots agressifs contre l’Irak», a ainsi affirmé le journal As-Saoura, organe du parti Baas au pouvoir. Al-Joumhourya écrit pour sa part que l’allocution du président américain au siège des Nations unies sera «pleine de mensonges vils qui n’ont pas de justifications crédibles». Ce quotidien gouvernemental accuse également l’équipe Bush de «chercher par ses déclarations mensongères à maintenir le monde dans un état d’hystérie pour couvrir son agression contre l’Irak». Profondément affectés par douze années d’embargo, les Irakiens semblent toujours aussi solidaires de leur président et interprètent les menaces américaines comme une volonté de «faire peur au peuple irakien, entamer son moral et l’obliger à renoncer à son indépendance».

Préparatifs militaires discrets

Sur le plan militaire, l’armée irakienne, présentée en 1991 comme la quatrième armada de tous les temps, se prépare vaille que vaille à une offensive qui semble inévitable. L’embargo qui frappe l’Irak depuis plus de dix ans a considérablement affaibli ses capacités et selon certains experts en armement, Bagdad chercherait à renouveler discrètement ses stocks de pièces de rechanges. Une commande portant notamment sur une trentaine de moteurs et des chenilles destinées à équiper 750 chars russes de type T62 aurait ainsi été effectuée via l’Egypte. Or ce pays ne possède pas ce type de chars qui forment l’essentiel des blindés lourds de l’armée de Saddam Hussein. D’autres commandes, toujours selon ces experts, auraient également été effectuées via l’Iran ou la Roumanie pour obtenir des pièces détachées d’hélicoptères alouette ou des optiques de chars.

Si les autorités irakiennes ont à plusieurs reprises affirmé être est en mesure de résister à une attaque américaine, elles ont également souligné qu’elles préféraient éviter une confrontation avec les Etats-Unis. Lors d’une intervention télévisée, le président Saddam Hussein avait en effet déclaré le 4 septembre dernier que «les Irakiens souhaitent voir Dieu leur épargner ce mal et faire en sorte qu’ils évitent le combat». Mais, avait-il menacé, «si une guerre leur est imposée, ils combattront d’une manière qui réjouira leurs amis et irritera leurs ennemis».



par Mounia  Daoudi

Article publié le 12/09/2002