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Proche-Orient

Arafat de nouveau assiégé

La trêve n’aura été que de courte durée. L’Etat hébreu, qui avait été épargné depuis le 4 août par les attaques terroristes, a de nouveau été frappé en moins de vingt-quatre heures par deux attentats sanglants qui ont fait au total huit morts et une soixantaine de blessés. Quelques heures après l’explosion d’un bus au cœur de Tel Aviv, à quelques mètres à peine de la grande synagogue, les autorités israéliennes ont décidé d’isoler le président Arafat dans son quartier général de Ramallah. Les soldats de Tsahal ont également mené des incursions dans la bande de Gaza et les principales villes de Cisjordanie sont désormais soumises à un couvre-feu. Si les attentats contre l’Etat hébreu ont été vivement condamnés par la communauté internationale, la riposte israélienne a en revanche été jugée «contre-productive» par les autorités françaises et vivement dénoncée par Moscou.
Il ne reste pratiquement plus rien de la Mouqataa, le quartier général du président Arafat à Ramallah. Les bulldozers de l’armée israélienne se sont en effet acharnés à détruire les derniers bâtiments encore debout, n’épargnant que les bureaux où sont réfugiés depuis jeudi soir le chef de l’Autorité palestinienne et ses proches collaborateurs. Quelques heures après avoir réuni son cabinet de sécurité, le Premier ministre israélien Ariel Sharon a donc décidé, en représailles à l’attentat de Tel Aviv, d’isoler le président Arafat du monde extérieur. Le gouvernement israélien exige en effet la reddition d’une vingtaine de Palestiniens retranchés dans la Mouqataa aux côtés du vieux leader. Deux personnes sont particulièrement visées, le général Taoufik Tiraoui, le chef des services de renseignements en Cisjordanie et Mahmoud Damra, le commandant de la force 17, la garde rapprochée du président Arafat. Ces deux hommes sont accusés par Israël d’«implication dans le terrorisme».

L’Etat hébreu a par ailleurs une nouvelle fois accusé le président Arafat de «ne rien faire pour enrayer les attaques terroristes et de continuer à inciter à la violence contre Israël». Pourtant la direction palestinienne avait très vivement condamné l’attentat suicide de Tel Aviv. Elle avait également tenté d’imposer une trêve aux groupes islamistes radicaux mais en vain. La riposte israélienne est par ailleurs d’une telle ampleur que plusieurs responsables palestiniens ont appelé la communauté internationale à intervenir pour «sauver la vie du président Arafat». «Nous appelons le quartette et les puissances mondiales à intervenir d’urgence pour obtenir la fin de cette agression visant le président», a notamment déclaré Saëb Erakat, le ministre palestinien des Collectivités locales.

L’Etat hébreu sous très haute surveillance

Sur le plan internationale, la France a jugé «contre-productive» l’opération menée par l’armée israélienne contre le QG de Yasser Arafat. «Les restrictions apportées à la liberté de mouvement des autorités palestiniennes entravent gravement les réformes qu’elles ont engagées avec la communauté internationale», a notamment affirmé un porte-parole du quai d’Orsay, soulignant qu’il fallait «encourager» ces réformes et non pas les «freiner». La Russie a de son côté dénoncé la riposte israélienne estimant qu’en encerclant le QG de Yasser Arafat, Tsahal ne faisait qu’«affaiblir les possibilités de l’administration palestinienne de lutter contre le terrorisme». Déjà en mars dernier l’armée israélienne avait lancé, à la suite d’une série d’attentats meurtriers, une vaste offensive en Cisjordanie, imposant un siège de plus d’un mois au QG de Yasser Arafat. Ce n’est que grâce à une médiation américaine que la crise avait pu être résolue.

Le nouveau siège imposé depuis jeudi soir au président palestinien semble confirmer l’impuissance de l’Etat hébreu à empêcher les attentats suicide sur son territoire. Avant même l’explosion du bus à Tel Aviv, le chef de la police israélienne, le commandant Shlomo Aharonichki, avait mis en garde la population contre l’existence de «menaces terroristes». «Les dernières semaines, avait-il déclaré à la radio israélienne, ont donné une fausse impression de calme, alors que le terrorisme n’a pas baissé les bras et qu’il y a constamment des tentatives d’attentats». La sécurité a depuis jeudi été renforcée en Israël et des milliers de policiers ont été déployés en renfort dans les lieux publics et les synagogues par crainte de nouveaux attentats suicide à l’occasion de la fête juive du Souccot qui débute vendredi soir.

Les mouvements radicaux palestiniens du Jihad islamique et du Hamas, qui ont revendiqué les deux attentats suicide qui ont frappé en vingt-quatre heures l’Etat hébreu, ont par ailleurs prédit une nouvelle vague d’opérations kamikaze. Un responsable du Jihad a ainsi affirmé que «le succès de l’attaque de Tel Aviv prouvait l’échec des tentatives israéliennes d’étouffer l’Intifada palestinienne». Dans les milieux palestiniens proches du président Arafat, on estime par ailleurs que la politique répressive menée par le Premier ministre Ariel Sharon ne fait qu’encourager les attentats suicide. «Les mesures de sécurité israéliennes créent un environnement qui accroît l’hostilité, la colère et l’esprit de revanche des Palestiniens contre les Israéliens», a ainsi affirmé l’ancien ministre du Travail Gassan al-Khatib. «le Fatah, le Hamas et tous les autres mouvements ne pourront jamais proclamer un cessez-le-feu unilatéral», a-t-il souligné. «Soit le cessez-le-feu sera mutuel, soit il n’y en aura jamais».



par Mounia  Daoudi

Article publié le 20/09/2002