Balkans
Macédoine : l’ancien guérillero aux portes du pouvoir
La Macédoine se retrouve dans une situation politique inédite. Les anciens guérilleros de l’UCK dominent sans partage la scène politique albanaise du pays. Il est pourtant toujours difficile pour les sociaux-démocrates macédoniens d’envisager de s’entendre avec eux.
De notre envoyé spécial à Skopje
Ali Ahmeti, l’ancien guérillero, a voté dimanche pour la première fois de sa vie, dans son village natal de Zajas, dans l’ouest de la Macédoine. Il avait quitté la Macédoine en 1982, après les grandes manifestations albanaises du Kosovo, sévèrement réprimées par le pouvoir communiste de l’époque. Fortement impliqué dans les réseaux nationalistes de la diaspora, aux côtés de son oncle Fazli Veliu, tout puissant dans la communauté albanaise de Zurich, il a vécu près de vingt ans en Suisse. Ali Ahmeti a milité dans tous les groupuscules nationalistes des Albanais de Yougoslavie, souvent d’obédience marxiste-léniniste. On le retrouve aussi dans les réseaux de soutien et de financement de l’UCK du Kosovo.
Quand éclatent les premiers combats en Macédoine, en mars 2001, il devient en quelques jours l’idole des Albanais du pays, lassés par les compromissions de leurs habituels dirigeants politiques. Porte-parole de la guérilla, Ali Ahmeti n’est pas un combattant, mais un organisateur doué d’un grand sens politique, qui parvient à maintenir sous son autorité la plupart des différents groupes de combattants. Il s’engage également dans une virulente dénonciation des réseaux criminels albanais et de leurs connexions avec les milieux politiques, promettant de faire un «grand ménage» s’il accède aux responsabilités.
Discours très modéré
Paradoxalement, durant la campagne électorale, l’Union démocratique pour l’intégration (BDI) qu’il préside s’est bien gardé de faire assaut de nationalisme albanais, au profit d’un discours très modéré sur l’égalité des communautés nationales de Macédoine. Les verdicts des urnes a été sans appel: le BDI a raflé près de 80% des voix albanaises, laminant les autres partis de la communauté.
Pour les Macédoniens, il reste cependant un «terroriste», et il a même été inculpé par un Tribunal de Skopje, malgré l’amnistie accordée aux anciens guérilleros. Beaucoup mettent en doute le discours modéré d’Ali Ahmeti: «c’est un loup qui sait se déguiser en agneau sur les conseils de ses mentors occidentaux», explique un militant social-démocrate d’un village macédonien proche de Tetovo. Depuis lundi, Ali Ahmeti est devenu l’homme fort de la Macédoine, indispensable à la formation de toute majorité parlementaire. En théorie, les sociaux-démocrates pourraient peut-être former une majorité avec certains des petits partis représentés au Parlement, mais la communauté internationale milite fermement contre toute option qui exclurait tout représentant albanais de la future coalition gouvernementale, car cette hypothèse risquerait de faire replonger le pays dans la guerre civile.
Des tractations plus ou moins secrètes ont déjà commencé depuis quelques semaines entre les sociaux-démocrates et le BDI, qui se sait désormais incontournable. Cette alliance probable des sociaux-démocrates du BDI, dénoncée durant la campagne électorale par les nationalistes macédoniens du VMRO-DPMNE, pourrait provoquer des réactions violentes dans certains milieux macédoniens extrémistes. Elle n’en représente pas moins la seule possibilité de voir le pays avancer dans la consolidation fragile de la paix.
Ali Ahmeti, l’ancien guérillero, a voté dimanche pour la première fois de sa vie, dans son village natal de Zajas, dans l’ouest de la Macédoine. Il avait quitté la Macédoine en 1982, après les grandes manifestations albanaises du Kosovo, sévèrement réprimées par le pouvoir communiste de l’époque. Fortement impliqué dans les réseaux nationalistes de la diaspora, aux côtés de son oncle Fazli Veliu, tout puissant dans la communauté albanaise de Zurich, il a vécu près de vingt ans en Suisse. Ali Ahmeti a milité dans tous les groupuscules nationalistes des Albanais de Yougoslavie, souvent d’obédience marxiste-léniniste. On le retrouve aussi dans les réseaux de soutien et de financement de l’UCK du Kosovo.
Quand éclatent les premiers combats en Macédoine, en mars 2001, il devient en quelques jours l’idole des Albanais du pays, lassés par les compromissions de leurs habituels dirigeants politiques. Porte-parole de la guérilla, Ali Ahmeti n’est pas un combattant, mais un organisateur doué d’un grand sens politique, qui parvient à maintenir sous son autorité la plupart des différents groupes de combattants. Il s’engage également dans une virulente dénonciation des réseaux criminels albanais et de leurs connexions avec les milieux politiques, promettant de faire un «grand ménage» s’il accède aux responsabilités.
Discours très modéré
Paradoxalement, durant la campagne électorale, l’Union démocratique pour l’intégration (BDI) qu’il préside s’est bien gardé de faire assaut de nationalisme albanais, au profit d’un discours très modéré sur l’égalité des communautés nationales de Macédoine. Les verdicts des urnes a été sans appel: le BDI a raflé près de 80% des voix albanaises, laminant les autres partis de la communauté.
Pour les Macédoniens, il reste cependant un «terroriste», et il a même été inculpé par un Tribunal de Skopje, malgré l’amnistie accordée aux anciens guérilleros. Beaucoup mettent en doute le discours modéré d’Ali Ahmeti: «c’est un loup qui sait se déguiser en agneau sur les conseils de ses mentors occidentaux», explique un militant social-démocrate d’un village macédonien proche de Tetovo. Depuis lundi, Ali Ahmeti est devenu l’homme fort de la Macédoine, indispensable à la formation de toute majorité parlementaire. En théorie, les sociaux-démocrates pourraient peut-être former une majorité avec certains des petits partis représentés au Parlement, mais la communauté internationale milite fermement contre toute option qui exclurait tout représentant albanais de la future coalition gouvernementale, car cette hypothèse risquerait de faire replonger le pays dans la guerre civile.
Des tractations plus ou moins secrètes ont déjà commencé depuis quelques semaines entre les sociaux-démocrates et le BDI, qui se sait désormais incontournable. Cette alliance probable des sociaux-démocrates du BDI, dénoncée durant la campagne électorale par les nationalistes macédoniens du VMRO-DPMNE, pourrait provoquer des réactions violentes dans certains milieux macédoniens extrémistes. Elle n’en représente pas moins la seule possibilité de voir le pays avancer dans la consolidation fragile de la paix.
par Jean-Arnault Dérens
Article publié le 17/09/2002