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Proche-Orient

L’ONU condamne Israël, Washington s’abstient

Il aura fallu seize heures de débats et d’intenses consultations pour parvenir enfin à l’adoption d’une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies condamnant l’opération «question de temps» lancée jeudi par l’armée israélienne dans les territoires palestiniens. Cette opération, outre la destruction de la quasi-totalité de la Mouqataa, le quartier général de Yasser Arafat, a déjà fait une vingtaine de victimes dans les territoires occupés et dans la bande de Gaza. Les Etats-Unis se sont abstenus de voter la résolution onusienne, estimant qu’elle ne condamnait pas les actions terroristes palestiniennes. Sommé par les Nations unies de lever le siège du président Arafat et de se retirer des villes palestiniennes, Israël a d’ores et déjà annoncé qu’elle poursuivrait son offensive tandis que le négociateur palestinien Saëb Erakat accusait l’Etat hébreu de «conduire la région vers un point de non retour».
«L'ONU peut demander ce qu'elle veut, Israël continuera son opération jusqu'à ce que ses objectifs soient atteints». Cette déclaration d’un haut responsable israélien prouve une fois encore l’incapacité de la communauté internationale à intervenir dans le conflit israélo-palestinien. Il est vrai qu’en s’abstenant de voter une résolution pourtant adoptée par quatorze des quinze membres du Conseil de sécurité, les Etats-Unis ont implicitement apporté leur soutien à l’Etat hébreu. Washington a ainsi justifié sa décision par son refus de soutenir une résolution qui ne condamnait pas explicitement les attentats suicide palestiniens. James Cunningham, l’ambassadeur adjoint des Etats-Unis à l’ONU a, en effet, indiqué que son pays avait espéré que le Conseil de sécurité allait adopter «une attitude claire contre les actions de groupes terroristes comme le Hamas, le Jihad islamique ou les Brigades des martyrs d’al-Aqsa». Washington avait d’ailleurs menacé d’opposer son veto à toute résolution exigeant la levée du siège de Yasser Arafat et ce n’est que le passage du texte adopté intimant l’ordre à l’Autorité palestinienne de «faire en sorte que les auteurs d’attentats terroristes comparaissent en justice» qui les en a dissuadé.

Malgré ce refus de Washington de voter la résolution condamnant Israël, la direction palestinienne s’est félicitée du texte adopté par le Conseil de sécurité. «Nous saluons cette décision, c’est un pas dans la bonne direction», a notamment affirmé l’un des proches conseillers de Yasser Arafat, Nabil Abou Roudeina, estimant toutefois qu’il était «important d’insister pour qu’Israël applique cette résolution et se retire immédiatement» du QG du président palestinien. «Il s’agit d’un véritable test, a-t-il souligné, et nous exhortons de Conseil de sécurité à faire pression sur l’Etat hébreu pour qu’il applique non seulement cette résolution mais également toutes les autres». Outre la levée du siège de la Mouqataa, le texte adopté par l’ONU, exige également «l’arrêt total de tous les actes de violence, y compris les opérations terroristes, les provocations, l’incitation à la haine et les destructions» ainsi que «le retrait des forces d’occupation israéliennes des villes palestiniennes à leurs positions d’avant septembre 2000».

Vers une nouvelle conférence de paix ?

L’armée israélienne, qui a imposé le couvre-feu dès jeudi dans les principales agglomérations de Cisjordanie, a lancé dans la nuit de lundi à mardi une vaste offensive dans la bande de Gaza. Près d’une centaine de blindés, appuyés par des hélicoptères d’assauts, ont causé d’importants dégâts dans deux quartiers de la ville, tuant neufs personnes et blessant une vingtaines d’autres. Ce déploiement de force, accompagné d’une escalade de violence, inquiète vivement l’Union européenne qui a demandé, mais en vain, le redéploiement immédiat de l’armée israélienne. Le Premier ministre danois Anders Fogh Rasmussen, dont le pays assure la présidence de l’UE, s’est entretenu mardi au téléphone avec le président Arafat pour l’assurer que l’Union faisait le maximum pour permettre à son émissaire spécial Miguel Moratinos de le rencontrer en compagnie d’un diplomate danois. Lundi le gouvernement israélien avait refusé d’autoriser une telle rencontre.

Le président français Jacques Chirac, en visite à Copenhague pour le quatrième sommet Europe-Asie, s’est déclaré pour sa part «consterné par la situation au Proche-Orient». Il a affirmé que la France était intervenue à plusieurs reprises ses derniers jours auprès du gouvernement israélien «pour faire cesser les opérations en cours contre l’Autorité palestinienne». «Je crois que ces méthodes n’aboutiront à rien, que le siège de la Mouqataa doit être levé et que M. Arafat doit recouvrer sa pleine liberté de circulation», a également affirmé Jacques Chirac.

Le Britannique Tony Blair, sans doute soucieux de se concilier les pays arabes en cas d’attaque contre l’Irak, a par ailleurs appelé mardi à la convocation d’«une nouvelle conférence de paix au Proche-Orient». Faisant le lien avec le dossier irakien au sujet duquel il affirme que «le monde arabe sait qu’il serait beaucoup mieux sans Saddam Hussein», le Premier ministre a ainsi déclaré qu’«il existe un vrai ressentiment de ces pays en ce qui concerne l’état du processus de paix au Proche-Orient». «Les gens veulent voir la communauté internationale poursuivre avec la même vigueur ce processus», a-t-il souligné en faisant référence aux efforts déployés par Washington et Londres pour mobiliser le monde sur la question irakienne. «Nous avons besoin d’une nouvelle conférence sur le processus de paix au Proche-Orient basée sur des principes jumeaux, un Etat israélien en sécurité et un Etat palestinien viable», a ainsi affirmé Tony Blair.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 24/09/2002