Commerce mondial
L’Europe renégocie ses accords avec les 77 pays ACP
Les 77 pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) renégocient avec l’Union européenne leurs accords commerciaux pour se mettre en conformité avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
De notre correspondante à Bruxelles
Des négociations commerciales entre l'Union européenne et les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique signataires de l'accord de Cotonou s'ouvrent le 27 septembre à Bruxelles.C'est le début d'un long processus devant aboutir à la conclusion d'Accords de partenariat économique (APE) entre l'UE et les ACP. Ensemble les deux parties représentent la moitié des membres de l'Organisation mondiale du commerce. L'enjeu est donc énorme. Il concerne le rôle de l'Europe sur la scène internationale mais aura surtout d'importantes répercussions sur l'avenir économique et social des 77 pays ACP.
Les accords de partenariat économique signifieront à terme la disparition des préférences commerciales unilatérales octroyées depuis trente ans par l'Europe à ses anciennes colonies. Ce système qui autorise les pays ACP à exporter plus de 95% de leurs produits sans droits de douane sur le marché européen tout en taxant les importations en provenance d'Europe, n'a pas donné les résultats espérés. Seule une petite minorité de pays dont l'Ile Maurice a été en mesure d'en profiter. La part des ACP dans le commerce de l'UE a même diminué et correspond à 4% à peine actuellement des échanges mondiaux européens.
Par ailleurs, la relation privilégiée entre l'Europe et les ACP a commencé à être attaquée par d'autres pays auprès de l'OMC. La condamnation, suite aux plaintes des Etats-Unis et de pays latino-américains, du système préférentiel accordé par l'UE aux producteurs de bananes ACP a servi de premier avertissement.
Libre-échange et/ou développement
Européens et ACP sont donc obligés de revoir de fond en comble leurs relations commerciales à l'occasion de la grande négociation qui s'ouvre cette semaine et qui devra déboucher vers 2008 sur un nouveau partenariat compatible avec les règles libérales de l'Organisation mondiale du commerce.
L'Europe souhaite, après une première phase de discussions globales, commencer rapidement à négocier des accords séparés avec les différentes régions de l'ensemble ACP: Afrique de l'Ouest, centrale, orientale, australe, groupe Caraïbes et groupe Pacifique. Ces régions, dont certaines comme la zone UEMOA/CEDEAO sont plus avancées que d'autres dans leur processus d'intégration, sont invitées à accelérer le mouvement pour abolir les barrières douanières à leurs échanges internes.
Dans un second temps, il leur faudra ouvrir peu à peu leurs marchés aux produits européens. Mais pas de panique rassure le Français Pascal Lamy, Commissaire européen au Commerce et chef de file des négociateurs européens, assisté de son collègue danois responsable du Développement, Poul Nielson: «Nous n'avons pas l'objectif de bâtir avec les ACP des accords commerciaux de libéralisation classiques. Il ne s'agit pas d'ouvrir à toute force les marchés africains, des Caraïbes et du Pacifique à des armées d'exportateurs européens en train de saliver sur leurs starting blocks devant des perspectives formidablement prometteuses... Nous voulons nous assurer que la libéralisation des échanges contribue effectivement au développement de ces pays».
Il n'empêche que chez les ACP, certaines appréhensions fortes demeurent. «J'ai l'impression indique le secrétaire-général du groupe ACP le Gabonais Jean-Robert Goulongana, que ces accords de partenariat économique sont des accords de libre-échange destinés à libéraliser les échanges commerciaux, même si le mandat de l'Union européenne dit qu'ils devront stimuler le développement».
Les ACP tiennent donc à obtenir avant d'entamer les négociations par régions, un certain nombre de garanties écrites. Comme un engagement de l'UE à compenser les pertes de recettes financières qui résulteraient, au début, des réductions de leurs droits de douane. «Il faut à tout prix, explique le secrétariat-général des ACP, éviter à nos pays un coût social et un risque de paupérisation identiques à ceux causés à l'époque par les politiques d'ajustement structurel.»
Bruxelles a déjà laissé entendre que certaines régions ACP dont l'intégration est plus avancée, seraient pressées de commencer à négocier avec l'Europe sans attendre les retardataires. Le discours officiel ACP insiste en revanche sur la nécéssité de préserver la cohésion du groupe.
78ème membre du groupe ACP, Cuba est le seul à ne pas avoir encore adhéré à l'Accord de Cotonou, estimant que les conditions politiques auxquelles l'Europe lui demande de souscrire sont plus sévères que celles exigées des autres pays ACP. La Havane souhaite toutefois participer aux négociations UE/ACP qui débutent vendredi en tant qu'observateur.
A écouter également
Pascal Lamy, commissaire européen au Commerce. Il est interrogé par Anne-Marie Mouradian. (27/09/2002, 5'22)
Des négociations commerciales entre l'Union européenne et les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique signataires de l'accord de Cotonou s'ouvrent le 27 septembre à Bruxelles.C'est le début d'un long processus devant aboutir à la conclusion d'Accords de partenariat économique (APE) entre l'UE et les ACP. Ensemble les deux parties représentent la moitié des membres de l'Organisation mondiale du commerce. L'enjeu est donc énorme. Il concerne le rôle de l'Europe sur la scène internationale mais aura surtout d'importantes répercussions sur l'avenir économique et social des 77 pays ACP.
Les accords de partenariat économique signifieront à terme la disparition des préférences commerciales unilatérales octroyées depuis trente ans par l'Europe à ses anciennes colonies. Ce système qui autorise les pays ACP à exporter plus de 95% de leurs produits sans droits de douane sur le marché européen tout en taxant les importations en provenance d'Europe, n'a pas donné les résultats espérés. Seule une petite minorité de pays dont l'Ile Maurice a été en mesure d'en profiter. La part des ACP dans le commerce de l'UE a même diminué et correspond à 4% à peine actuellement des échanges mondiaux européens.
Par ailleurs, la relation privilégiée entre l'Europe et les ACP a commencé à être attaquée par d'autres pays auprès de l'OMC. La condamnation, suite aux plaintes des Etats-Unis et de pays latino-américains, du système préférentiel accordé par l'UE aux producteurs de bananes ACP a servi de premier avertissement.
Libre-échange et/ou développement
Européens et ACP sont donc obligés de revoir de fond en comble leurs relations commerciales à l'occasion de la grande négociation qui s'ouvre cette semaine et qui devra déboucher vers 2008 sur un nouveau partenariat compatible avec les règles libérales de l'Organisation mondiale du commerce.
L'Europe souhaite, après une première phase de discussions globales, commencer rapidement à négocier des accords séparés avec les différentes régions de l'ensemble ACP: Afrique de l'Ouest, centrale, orientale, australe, groupe Caraïbes et groupe Pacifique. Ces régions, dont certaines comme la zone UEMOA/CEDEAO sont plus avancées que d'autres dans leur processus d'intégration, sont invitées à accelérer le mouvement pour abolir les barrières douanières à leurs échanges internes.
Dans un second temps, il leur faudra ouvrir peu à peu leurs marchés aux produits européens. Mais pas de panique rassure le Français Pascal Lamy, Commissaire européen au Commerce et chef de file des négociateurs européens, assisté de son collègue danois responsable du Développement, Poul Nielson: «Nous n'avons pas l'objectif de bâtir avec les ACP des accords commerciaux de libéralisation classiques. Il ne s'agit pas d'ouvrir à toute force les marchés africains, des Caraïbes et du Pacifique à des armées d'exportateurs européens en train de saliver sur leurs starting blocks devant des perspectives formidablement prometteuses... Nous voulons nous assurer que la libéralisation des échanges contribue effectivement au développement de ces pays».
Il n'empêche que chez les ACP, certaines appréhensions fortes demeurent. «J'ai l'impression indique le secrétaire-général du groupe ACP le Gabonais Jean-Robert Goulongana, que ces accords de partenariat économique sont des accords de libre-échange destinés à libéraliser les échanges commerciaux, même si le mandat de l'Union européenne dit qu'ils devront stimuler le développement».
Les ACP tiennent donc à obtenir avant d'entamer les négociations par régions, un certain nombre de garanties écrites. Comme un engagement de l'UE à compenser les pertes de recettes financières qui résulteraient, au début, des réductions de leurs droits de douane. «Il faut à tout prix, explique le secrétariat-général des ACP, éviter à nos pays un coût social et un risque de paupérisation identiques à ceux causés à l'époque par les politiques d'ajustement structurel.»
Bruxelles a déjà laissé entendre que certaines régions ACP dont l'intégration est plus avancée, seraient pressées de commencer à négocier avec l'Europe sans attendre les retardataires. Le discours officiel ACP insiste en revanche sur la nécéssité de préserver la cohésion du groupe.
78ème membre du groupe ACP, Cuba est le seul à ne pas avoir encore adhéré à l'Accord de Cotonou, estimant que les conditions politiques auxquelles l'Europe lui demande de souscrire sont plus sévères que celles exigées des autres pays ACP. La Havane souhaite toutefois participer aux négociations UE/ACP qui débutent vendredi en tant qu'observateur.
A écouter également
Pascal Lamy, commissaire européen au Commerce. Il est interrogé par Anne-Marie Mouradian. (27/09/2002, 5'22)
par Anne-Marie Mouradian
Article publié le 27/09/2002