Etats-Unis
La capitale américaine terrorisée par un «tireur fou»
Six personnes ont été tuées et deux autres blessées par un sniper dans la banlieue de Washington. Les autorités n'ont aucun indice sur l'identité du tueur, qui opère à distance, avec un fusil de haute précision. Les victimes semblent avoir été choisies au hasard, alors qu'elles vaquaient à leurs activités courantes.
New York, de notre correspondant
La frustration gagne les autorités. Six morts, deux blessés, et zéro témoin. Le tueur de la banlieue de Washington ne laisse aucune trace. Invisible, il opère de loin, froidement, en silence, d'une seule balle toujours parfaitement placée. La première victime est tombée le mercredi 2 octobre à 18 h 04. James Martin, 55 ans, est fauché sur un parking de supermarché à Wheaton, dans le Maryland. Le lendemain matin, non loin de là, James Buchanan, 39 ans, est abattu derrière sa tondeuse à gazon. Trente-et-une minutes plus tard, Premkumar Walekar, 54 ans, est tué alors qu'il fait le plein de son taxi. Puis c'est le tour de Sarah Ramos, 34 ans, sur un banc devant un bureau de poste, toujours dans le même secteur. A 9 h 58, Lori Lewis Rivera est tuée alors qu'elle passe l'aspirateur dans son mini van, devant une station-service. Le soir, Pascal Charlot, 72 ans, s'effondre au coin d'une rue, dans le nord de Washington. Le lendemain, en Virginie, une femme est blessée alors qu'elle charge dans sa voiture ses sacs de commissions, sur un parking de supermarché. Lundi matin, un garçon de 13 ans est grièvement blessé d'une balle en pleine poitrine, devant son école, à Bowie, dans le Maryland.
Qui sera le prochain ? La police n'a pour l'instant presque rien, si ce n'est la certitude, étude balistique à l'appui, que toutes les balles viennent d'une même arme, un fusil de chasse ou une arme de guerre, puissant et précis à plusieurs centaines de mètres de distance. Une seule fois, une douille a été retrouvée. Aucun lien n'a pu être établi entre les victimes, d'âges ou de races différentes. La seule piste: le suspect pourrait se déplacer dans plusieurs véhicules de couleur blanche. C'est dire à quel point l'enquête piétine. Le président Bush a pourtant promis de mobiliser toutes les ressources fédérales pour résoudre «cette série d'actes de violences lâches et insensés». Des centaines de policiers ont passé le secteur au peigne fin. Ils ont notamment visionné l'enregistrement d'une caméra de circulation, dans l'espoir que le tueur ait brûlé un feu rouge dans sa fuite. Une prime de 240 000 dollars est également offerte pour tout indice conduisant à la capture du tueur, qui a toujours une victime d'avance.
La dernière attaque, contre un enfant, a achevé de paniquer les habitants de la région, qui est désormais en état de siège. Tout ce que la capitale fédérale compte d'uniformes est venu à la rescousse. A Washington, dans les comtés avoisinants et jusqu'à Baltimore, les écoles ont réduit les activités en plein air des écoliers. Dans certains établissements, les fenêtres ont été recouvertes par des rideaux improvisés et les bureaux ont été écartés des endroits trop visibles. «Nos jeunes gens doivent aller à l'école», a expliqué le chef de la police locale Charles Moose. «Nous ne pouvons pas céder à ce genre de terreur», a-t-il ajouté. Mais près d'un tiers des enfants de la ville de Bowie ne sont pas allés à l'école, et des parents se sont organisés pour monter la garde aux principales intersections. Les parcs et les aires de jeu du secteur étaient déserts, plusieurs cafés ont fermé leur terrasse et l'anxiété des passants semblait palpable.
«Tir sportif sur des êtres humains»
Terroriste déterminé ? Psychopathe antisocial ? En l'absence d'indice précis, les enquêteurs n'ont guère d'autre choix que de s'en remettre au profil psychologique tracé par des agents spécialisés du FBI. Seul problème: le tueur défie les catégories établies. Le plus souvent, les tueurs en série choisissent leur victime par vengeance, en réponse à ce qu'ils perçoivent comme un tort qui leur a été causé par leur famille, leurs collègues de travail, leurs camarades de classe ou une race différente de la leur. La plupart de ces massacres sont commis à l'arme automatique. Le tireur ouvre le feu à de nombreuses reprises, tuant un maximum de personnes d'un seul coup, avant de se donner la mort ou de se laisser arrêter par la police sur le lieu du massacre.
En 1993, Colin Ferguson, un Noir persuadé que sa vie était un échec à cause du racisme des Blancs, a tué six personnes et blessé 19 autres dans un train de la banlieue new yorkaise. Il avait été maîtrisé par des passagers. En 1991, au Texas, George Hennard, persuadé d'être victime d'une conspiration de femmes blanches, avait fait 22 morts et 23 blessés dans un restaurant, avant de se donner la mort. En 1999, deux adolescents avaient ouvert le feu à Columbine High School, dans le Colorado, tuant douze étudiants et un professeur avant de se suicider.
Or, le tueur de Washington semble calme, minutieux et prudent. «Comme il n'y a aucune preuve d'un motif quelconque, ou d'une tentative de revanche sur la société, il ne reste que l'aspect «sportif» de ces meurtres», a expliqué au New York Times James Alan Fox, professeur de droit pénal. «Si il exprimait sa colère ou sa frustration, il continuerait à tirer, pour créer un bain de sang. Mais ce type choisit ses victimes calmement et froidement, il tire une fois de manière très précise, puis il s'enfuit. Je pense qu'il chasse ou qu'il pratique du tir sportif sur des êtres humains».
Les antécédents sont rares. Dans une affaire un peu similaire, près de New York, en 1994, un sniper méticuleux avait fait un mort et un blessé, en choisissant ses victimes au hasard. Il purge aujourd'hui une peine de prison à vie. Le suspect semble cette fois aussi éprouver du plaisir à exercer son pouvoir en tuant froidement, quand il le veut, où il le veut, défiant au passage la police dont la concentration dans le secteur aurait dû le dissuader de frapper de nouveau au même endroit. Il opère toujours avec sang froid et détermination, sans perdre contact avec la réalité et en prenant soin de ne pas se faire prendre. Tout semble indiquer qu'il voudra étoffer son tableau de chasse.
La frustration gagne les autorités. Six morts, deux blessés, et zéro témoin. Le tueur de la banlieue de Washington ne laisse aucune trace. Invisible, il opère de loin, froidement, en silence, d'une seule balle toujours parfaitement placée. La première victime est tombée le mercredi 2 octobre à 18 h 04. James Martin, 55 ans, est fauché sur un parking de supermarché à Wheaton, dans le Maryland. Le lendemain matin, non loin de là, James Buchanan, 39 ans, est abattu derrière sa tondeuse à gazon. Trente-et-une minutes plus tard, Premkumar Walekar, 54 ans, est tué alors qu'il fait le plein de son taxi. Puis c'est le tour de Sarah Ramos, 34 ans, sur un banc devant un bureau de poste, toujours dans le même secteur. A 9 h 58, Lori Lewis Rivera est tuée alors qu'elle passe l'aspirateur dans son mini van, devant une station-service. Le soir, Pascal Charlot, 72 ans, s'effondre au coin d'une rue, dans le nord de Washington. Le lendemain, en Virginie, une femme est blessée alors qu'elle charge dans sa voiture ses sacs de commissions, sur un parking de supermarché. Lundi matin, un garçon de 13 ans est grièvement blessé d'une balle en pleine poitrine, devant son école, à Bowie, dans le Maryland.
Qui sera le prochain ? La police n'a pour l'instant presque rien, si ce n'est la certitude, étude balistique à l'appui, que toutes les balles viennent d'une même arme, un fusil de chasse ou une arme de guerre, puissant et précis à plusieurs centaines de mètres de distance. Une seule fois, une douille a été retrouvée. Aucun lien n'a pu être établi entre les victimes, d'âges ou de races différentes. La seule piste: le suspect pourrait se déplacer dans plusieurs véhicules de couleur blanche. C'est dire à quel point l'enquête piétine. Le président Bush a pourtant promis de mobiliser toutes les ressources fédérales pour résoudre «cette série d'actes de violences lâches et insensés». Des centaines de policiers ont passé le secteur au peigne fin. Ils ont notamment visionné l'enregistrement d'une caméra de circulation, dans l'espoir que le tueur ait brûlé un feu rouge dans sa fuite. Une prime de 240 000 dollars est également offerte pour tout indice conduisant à la capture du tueur, qui a toujours une victime d'avance.
La dernière attaque, contre un enfant, a achevé de paniquer les habitants de la région, qui est désormais en état de siège. Tout ce que la capitale fédérale compte d'uniformes est venu à la rescousse. A Washington, dans les comtés avoisinants et jusqu'à Baltimore, les écoles ont réduit les activités en plein air des écoliers. Dans certains établissements, les fenêtres ont été recouvertes par des rideaux improvisés et les bureaux ont été écartés des endroits trop visibles. «Nos jeunes gens doivent aller à l'école», a expliqué le chef de la police locale Charles Moose. «Nous ne pouvons pas céder à ce genre de terreur», a-t-il ajouté. Mais près d'un tiers des enfants de la ville de Bowie ne sont pas allés à l'école, et des parents se sont organisés pour monter la garde aux principales intersections. Les parcs et les aires de jeu du secteur étaient déserts, plusieurs cafés ont fermé leur terrasse et l'anxiété des passants semblait palpable.
«Tir sportif sur des êtres humains»
Terroriste déterminé ? Psychopathe antisocial ? En l'absence d'indice précis, les enquêteurs n'ont guère d'autre choix que de s'en remettre au profil psychologique tracé par des agents spécialisés du FBI. Seul problème: le tueur défie les catégories établies. Le plus souvent, les tueurs en série choisissent leur victime par vengeance, en réponse à ce qu'ils perçoivent comme un tort qui leur a été causé par leur famille, leurs collègues de travail, leurs camarades de classe ou une race différente de la leur. La plupart de ces massacres sont commis à l'arme automatique. Le tireur ouvre le feu à de nombreuses reprises, tuant un maximum de personnes d'un seul coup, avant de se donner la mort ou de se laisser arrêter par la police sur le lieu du massacre.
En 1993, Colin Ferguson, un Noir persuadé que sa vie était un échec à cause du racisme des Blancs, a tué six personnes et blessé 19 autres dans un train de la banlieue new yorkaise. Il avait été maîtrisé par des passagers. En 1991, au Texas, George Hennard, persuadé d'être victime d'une conspiration de femmes blanches, avait fait 22 morts et 23 blessés dans un restaurant, avant de se donner la mort. En 1999, deux adolescents avaient ouvert le feu à Columbine High School, dans le Colorado, tuant douze étudiants et un professeur avant de se suicider.
Or, le tueur de Washington semble calme, minutieux et prudent. «Comme il n'y a aucune preuve d'un motif quelconque, ou d'une tentative de revanche sur la société, il ne reste que l'aspect «sportif» de ces meurtres», a expliqué au New York Times James Alan Fox, professeur de droit pénal. «Si il exprimait sa colère ou sa frustration, il continuerait à tirer, pour créer un bain de sang. Mais ce type choisit ses victimes calmement et froidement, il tire une fois de manière très précise, puis il s'enfuit. Je pense qu'il chasse ou qu'il pratique du tir sportif sur des êtres humains».
Les antécédents sont rares. Dans une affaire un peu similaire, près de New York, en 1994, un sniper méticuleux avait fait un mort et un blessé, en choisissant ses victimes au hasard. Il purge aujourd'hui une peine de prison à vie. Le suspect semble cette fois aussi éprouver du plaisir à exercer son pouvoir en tuant froidement, quand il le veut, où il le veut, défiant au passage la police dont la concentration dans le secteur aurait dû le dissuader de frapper de nouveau au même endroit. Il opère toujours avec sang froid et détermination, sans perdre contact avec la réalité et en prenant soin de ne pas se faire prendre. Tout semble indiquer qu'il voudra étoffer son tableau de chasse.
par Philippe Bolopion
Article publié le 09/10/2002