Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Proche-Orient

Bush ménage Sharon

La visite à Washington du Premier ministre israélien avait été présentée comme une convocation de la Maison blanche, visiblement agacée par la politique sécuritaire d’Ariel Sharon vis-à-vis des Palestiniens. Le président Bush, soucieux de s’allier les pays arabes de la région dans le cas d’une éventuelle offensive contre l’Irak, devait en effet demander au chef de l’exécutif israélien de «lâcher du lest» sur les Palestiniens. Washington avait d’ailleurs ces dernières semaines adressé plusieurs rappels à l’ordre à l’Etat hébreu après notamment des incursions sanglantes de l’armée israélienne qui avaient provoqué la mort de dizaines de civils palestiniens. Mais contre toute attente, le président Bush a choisi de ménager son partenaire et si des critiques ont été formulées, elles l’ont été à huis clos. Un nouveau document sur un règlement politique du conflit israélo-palestinien a par ailleurs été remis au Premier ministre israélien. Il prévoit notamment la création d’un Etat palestinien à l’horizon 2005-2006.
Quelques minutes avant la rencontre Bush-Sharon, le porte-parole de la Maison blanche affirmait encore qu’il était de «la responsabilité de l’Etat d’Israël de tenir compte des besoins humanitaires du peuple palestinien». Ari Fleischer soulignait même que l’Etat hébreu se devait d’effectuer le transfert de l’argent dû aux Palestiniens, soit l’équivalent de 420 millions de dollars correspondant à la TVA et aux droits de douanes prélevés sur les produits transitant par Israël. Pourtant au cours de la conférence de presse du président américain, tenue à l’issue de sa rencontre avec Ariel Sharon, George Bush s’est bien gardé d’exercer des pressions publiques sur son allié pour qu’il allège les sanctions infligées à la population palestinienne. Il a en effet choisi de centrer ses propos sur le dossier irakien en affirmant notamment que si Bagdad attaquait l’Etat hébreu, ce dernier aurait toute latitude pour réagir car, a-t-il souligné, «Israël a le droit de se défendre». Ariel Sharon peut donc afficher sa satisfaction. Son porte-parole, Raanan Gissin s’est d’ailleurs ouvertement félicité du fait que Washington n’ait exercé «aucune pression sur la question palestinienne». Il a même affirmé que l’administration Bush «était la plus favorable à Israël de toutes les récentes administrations américaines».

Sur le plan militaire en outre, Ariel Sharon s’est vu promettre que les Etats-Unis préviendront Israël «plus de deux jours à l’avance», dans le cas d’une offensive militaire contre le régime de Saddam Hussein. L’Etat hébreu pourra ainsi se préparer à d’éventuels tirs de missiles irakiens. Lors de la guerre du Golfe en 1991, Bagdad avait en effet tiré 39 missiles Scud vers Israël tuant deux personnes et faisant des centaines de blessés. A l’époque l’Etat hébreu, sous la pression des Etats-Unis, n’avait pas lancé de représailles. Aujourd’hui le cas de figure semble bien différent et un responsable israélien a d’ores et déjà affirmé que «les Etats-Unis se sont engagés à déployer tous les efforts pour empêcher des attaques contre Israël». Cette attitude de Washington n’a pas été sans conséquences sur le terrain. Alors que l’armée israélienne s’était abstenue d’engager une quelconque offensive contre les Palestiniens avant le départ pour les Etats-Unis d’Ariel Sharon, les militaires israéliens ont lancé jeudi une attaque contre le camp de réfugiés de Rafah. Six Palestiniens, dont un enfant de quatre ans, ont ainsi été tués par des chars israéliens qui ont tiré trois obus et ouvert le feu à la mitrailleuse. Trente personnes dont plusieurs enfants, ont également été blessés.

Vers nouveau plan de règlement

La presse israélienne a révélé jeudi qu’un document américain portant sur un règlement politique du conflit israélo-palestinien avait été remis au Premier ministre Ariel Sharon lors de sa visite à Washington. Selon ce document, l’arrêt des violences et les réformes de l’Autorité palestinienne, devraient être au centre d’une première étape qui devrait s’étaler jusqu’en juin 2003. Au cours de cette période, la levée du blocus des territoires palestiniens et l’amélioration de la situation humanitaire des populations seraient également être pris en compte. Le projet américain prévoit ensuite une deuxième étape au cours de laquelle, à l’issue d’élections générales palestiniennes, un Etat provisoire serait proclamé et une conférence internationale convoquée à l’horizon du mois de juin 2004. Enfin la dernière étape de ce plan de règlement, prévoit la création fin 2005 d’un Etat palestinien avec des négociations sur la fin du conflit auxquelles participeraient les pays arabes de la région.

Ce projet doit être présenté aux différentes parties par le secrétaire d’Etat adjoint chargé du Proche-Orient, William Burns qui a entamé mercredi une tournée qui doit le mener dans une douzaine de pays de la région. «Il ne s’agit que d’un projet que nous n’avons pas eu le temps d’étudier», a toutefois tenu à préciser un responsable israélien. Une réunion du quartette (Etats-Unis/UE/Russie/ONU) s’est par ailleurs tenue jeudi à l’ambassade américaine à Paris. Mais aucune indication sur l’objet de cette rencontre décidée à la dernière minute n’a été communiquée. William Burn devait rencontrer à cette occasion Miguel Angel Moratinos, l’envoyé spécial de l’UE pour le Proche-Orient et Terje Roed-Larsen, le coordinateur de l’ONU dans la région.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 17/10/2002