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Russie

Russes, qui êtes-vous ?

Le premier recensement de l’ère post-soviétique débute aujourd’hui en Russie. Alors que le pays connaît une croissance démographique négative, cette opération de grande ampleur doit permettre d’obtenir des informations sur les conditions de vie mais aussi l’origine ethnique des habitants qui peuplent un territoire particulièrement vaste.
C’est par les régions les plus éloignées de l’Extrême Orient russe, dans la péninsule du Kamchatka et à Valdivostok, que les recenseurs ont commencé leur travail. Ils doivent ainsi interroger les quelque sept millions de personnes qui habitent ces zones étendues sur environ six millions de kilomètres carrés. Mais d’ici le 16 octobre, l’ensemble de la population vivant en Russie devra être interrogée, même les cosmonautes de la station spatiale internationale qui recevront aussi le formulaire par vaisseau spécial. En Tchétchénie, une zone particulièrement sensible où la guerre oppose les indépendantistes au pouvoir central depuis trois ans, les opérations se dérouleront sur deux jours (12 et 13 octobre) sous la surveillance de 6500 militaires.

Le dernier recensement remonte à la période soviétique (1989). Et depuis cette époque, la Russie a beaucoup changé. La population actuelle est estimée à 143,6 millions de personnes mais on note un recul démographique depuis 1992. En 2001, la croissance démographique a été négative puisque l’on a compté 1,3 million de naissances pour 2,2 millions de décès. Au-delà des données statistiques, il s’agit, selon les autorités, «de tracer le portrait d’un individu nouveau avec une mentalité nouvelle et qui vit dans une nouvelle société démocratique». Bref de voir l’impact sur la population des bouleversements majeurs qui ont marqué la Russie durant les dix dernières années, sur le plan politique, économique et social.

Vladimir Poutine donne l’exemple

Cette ambition semble légitime. D’ailleurs, 92% des Russes affirment qu’ils participeront à l’opération. Malgré tout, 3% des habitants du pays affichent un refus catégorique car ils se méfient des conditions dans lesquelles ce recensement va se dérouler mais aussi de l’utilisation des données qui vont être recueillies. C’est donc pour motiver la population et encourager les Russes à répondre au questionnaire que le président Vladimir Poutine a donné l’exemple. Il a, en effet, reçu chez lui et sous l’oeil des caméras, une étudiante qui lui a posé les questions d’usage. Ces images ont été diffusées sur la télévision nationale pour montrer aux inquiets qu’il n’y avait pas de danger à ouvrir sa porte aux recenseurs.

Pour ceux qui craignent d’être abusés par des voleurs qui se feraient passer pour des recenseurs, un système de rechange a été prévu. Il est possible de répondre au questionnaire par téléphone ou de se rendre dans des centres mis en place pour l’occasion. Le gouvernement a, d’autre part, garanti la confidentialité des réponses à ceux qui craignaient que les services fiscaux ou d’immigration ne se servent des informations recueillies. Si certaines questions concernent les ressources, elles doivent permettre d’en déterminer la «source» mais pas les «montants». Les noms des personnes interrogées ne figureront pas sur les formulaires de réponses mais seulement leurs initiales. Et ces feuilles, remplies à la main, seront détruites une fois les informations transcrites sur une base de données informatique. Le ministre de l’Intérieur, Nikolaï Perchoutkine, a confirmé que dans tous les cas «les recenseurs n’aideraient pas la police». Les immigrés clandestins n’ont donc, en principe, aucune raison d’essayer d’échapper à cette collecte d’informations.

Grâce à ce recensement, le gouvernement espère obtenir des données susceptibles de lui permettre de connaître le visage de la Russie actuelle tant au niveau des conditions de vie des habitants, que de la répartition ethnique des populations. Les 600 000 recenseurs recrutés pour mener à bien cette opération doivent interroger les gens sur leur logement, la langue qu’ils pratiquent, leur niveau d’éducation mais aussi leur ethnie (on estime qu’il y a 800 ethnies sur le territoire) et leur nationalité. Par contre, aucune question sur la religion n’est prévue. Ce domaine étant jugé trop intime. Le gouvernement espère aussi avoir des statistiques réalistes sur le nombre d’étrangers présents sur le territoire, notamment les immigrés clandestins. Les premiers résultats de ce recensement sont attendus pour mi-2003. Les experts tablent sur une marge d’erreur de trois pour cent même si, selon un récent sondage de la Fondation de l’opinion publique, un Russe sur quatre affirme qu’il ne dira pas toute la vérité.



par Valérie  Gas

Article publié le 09/10/2002