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Russie

Poutine demande «pardon»

Le nombre des otages morts à la suite de l’assaut des forces spéciales russes dans le théâtre de Moscou, où étaient retranchés des rebelles tchétchènes, augmente sans cesse depuis hier. D’après le dernier communiqué, 117 otages seraient décédés. Pour la plupart intoxiqués par le gaz diffusé avant l’intervention des forces spéciales. Le bilan est lourd. Mais le risque de carnage était tellement important que le président Poutine sort finalement renforcé de cette affaire.
«Pardonnez-nous, nous n’avons pas pu sauver tout le monde.» Vladimir Poutine est intervenu à la télévision russe, samedi soir, pour s’adresser à ses compatriotes après la libération des quelque huit cents personnes qu’un commando tchétchène avait prises en otage pendant près de 60 heures. L’intervention des forces spéciales dans le théâtre où avait lieu les représentations de la comédie musicale Nord-Ost, a permis de mettre fin à l’angoisse de toute une nation. Mais les otages ont payé le prix fort. Depuis hier, on est passé de 67 à 117 morts. Mais surtout, on a appris que seules deux personnes ont été tuées par balles. Les autres sont vraisemblablement décédées après avoir respiré le gaz incapacitant diffusé dans le théâtre pour neutraliser les membres du commando.

Aujourd’hui encore, de nombreuses familles d’otages attendent à la porte des hôpitaux de Moscou, où elles sont bloquées par la police, pour savoir ce que sont devenus leurs proches. Leur angoisse est terrible. Et les informations qui circulent sur les effets du gaz employé ne sont pas faites pour les rassurer. Les autorités soviétiques n’ont pas donné d’indication sur la substance diffusée dans la salle de spectacle. Mais selon les spécialistes, il pourrait s’agir du CS, ou chlorobenzylidène malonitrile, un gaz lacrymogène extrêmement puissant. Il peut provoquer des brûlures de la peau et des yeux, des vomissements, voire même des étouffements. Et dans certains cas, il peut même être mortel. Par exemple, lorsqu’il est surdosé mais aussi lorsqu’il est inspiré par des personnes fragiles comme les cardiaques et les asthmatiques.

«Nous avons réussi à faire pratiquement l’impossible»

Plus de cinq cents otages ont été transportés à l’hôpital après l’assaut. A l’heure actuelle, cent cinquante d’entre eux se trouvent encore dans des services de réanimation et quarante-cinq seraient dans un état grave. Le bilan est donc encore susceptible de s’alourdir dans les prochains jours. Malgré tout, le pire a été évité dans la mesure où le risque était de voir les terroristes déclencher les bombes qu’ils avaient placées dans le théâtre.

Pour Valdimir Poutine, l’honneur de la Russie est sauf. «Nous avons réussi à faire pratiquement l’impossible, sauver la vie de centaines et centaines de personnes. Nous avons prouvé qu’on ne peut pas mettre la Russie à genoux». Le président russe n’a pas cédé à des terroristes dont la détermination semblait inébranlable. Certains témoignages de rescapés font, par exemple, état de la menace proférée par les rebelles tchétchènes de les décapiter s’ils n’obtenaient pas satisfaction. Poutine a rétabli l’autorité morale de l’Etat et a montré l’efficacité des forces spéciales qui ont réussi leur intervention et n’ont à déplorer aucune perte.

La communauté internationale dans son ensemble a fait part de son soulagement après l’annonce de la libération des otages. Et nombreux sont ceux qui ont félicité directement Vladimir Poutine comme le président libanais, Emile Lahoud ou celui de l’Autorité palestinienne, Yasser Arafat. Il reste maintenant à ce dernier à gérer les suites de cette prise d’otages et ses conséquences sur la crise tchétchène. Pour de nombreux observateurs, cette affaire risque de renforcer le camp des partisans de la manière forte contre celui des adeptes des solutions politiques. Une première indication de l’état d’esprit du président russe face à la question tchétchène a été fournie par son refus annoncé de se rendre au sommet russo-danois, prévu à Copenhague, si un congrès sur la Tchétchénie, qui doit avoir lieu dans la même ville, s’y tenait finalement.



par Valérie  Gas

Article publié le 27/10/2002