Cuba
Les vieux ennemis échangent leurs souvenirs
Une conférence historique s’est tenue ce week-end à La Havane. Quarante ans après la crise des fusées, Russes, Américains et Cubains se sont retrouvés pour essayer d’éclairer, documents déclassés à l’appui, l’une des plus grande crise de l’histoire contemporaine, qui a failli provoquer une guerre nucléaire mondiale.
De notre correspondante à La Havane
Qui aurait pu imaginer, il y a quarante ans, alors que le monde était au bord d’une guerre nucléaire, que les vieux ennemis se retrouveraient un jour assis à la même table pour analyser, calmement, les heures terribles de la crise des fusées. Dans la grande salle du palais des conventions de La Havane, Cubains et américains s’observent. D’un côté, Fidel Castro entouré de vieux généraux couverts de médailles, de l’autre Robert McNamara, secrétaire de la Défense de l’administration Kennedy accompagné de trois conseillers présidentiel de l’époque et d’ex-membres de la CIA. Les quelques participants russes, invités à titre personnel et non officiel comme les américains, ont été installés sur les bas-côtés. Dans un pays où la forme en dit long sur le fond, la conférence internationale sur la crise d’octobre avait des aires de rencontre bilatérale.
Cuba prend sa revanche
Si en 1962, Américains et Soviétiques négociaient en tête-à-tête, excluant Cuba de toutes résolutions, aujourd’hui, Fidel Castro, seul dirigeant de l’époque encore au pouvoir, a bien l’intention de régler ses comptes. Dès le premier jour de la conférence, les Cubains ont insisté sur les erreurs de l’URSS ayant abouti à la crise. Notamment le choix de Khrouchtchev d’installer secrètement les fusées à Cuba, malgré les conseils de Fidel Castro. À l’époque, le chef de la révolution cubaine encourageait son homologue soviétique à signer un accord bilatéral de défense, arguant qu’aucune loi internationale n’interdisait le stationnement de fusées dans un pays tiers. Le mensonge de Khrouchtchev lorsque Kennedy lui demanda (photos de la CIA en main) s’il y avait bien des fusées soviétiques à 160 kilomètres des côtes américaines a, d’une part inquiété les Américains puis a placé l’URSS en position de faiblesse lors des négociations. Mais, les Américains n’ont pas échappé aux critiques.
Selon Cuba, c’est à cause des incessantes agressions américaines contre l’île, que les fusées auraient été installées, mais cela uniquement dans un but défensif. Pour appuyer cette thèse, les autorités cubaines ont fait allusion à l’invasion ratée de la Baie des Cochons de 1961, et surtout au plan Mangouste mené par la CIA durant l’année 1962, aussitôt découvert par la sécurité cubaine. Mangouste prévoyait une aide logistique pour fomenter une insurrection contre-révolutionnaire, l’assassinat de Fidel Castro et de hauts dirigeants de l’île, ainsi qu’une invasion américaine en cas d’échec. Robert McNamara s’est défendu en rétorquant que le président Kennedy n’avait jamais donné son accord pour une autre invasion de l’île, «Mais je dois reconnaître qu’a la place des Cubains, j’aurais aussi interprété le plan Mangouste comme un danger pour la sécurité nationale».
«L’Occident a raté l’opportunité de créer un monde meilleur».
Le dernier jour de la conférence a été consacré aux leçons à tirer d’une telle crise. Pour la partie américaine, Robert McNamara a insisté sur l’importance à accorder aux points de vue de l’adversaire. Il a également appelé les responsables politiques et militaires du monde entier à éviter les erreurs pouvant causer la mort d’innocents, «comme cela c’est déjà malheureusement produit en Afghanistan».
Fidel Castro à lui rappelé l’importance de l’éthique et de la morale dans la vie publique. Puis, analysant la fin de la Guerre froide a conclu, pessimiste: «La disparition du camp socialiste a été un véritable cadeau du ciel pour les Américains (...) Mais l’Occident a raté l’opportunité de créer un monde meilleur. Depuis dix ans, les crédits économisés auraient dû être utilisés à des fins essentiels et nécessaires, aussi bien d’un point de vue humain que politique et éthique. Cela n’a pas été réalisé et aujourd’hui le monde se trouve dans une situation de catastrophe économique internationale et personne, ni même tous les prix Nobel d’économie réunies, ne connaissent de solution à cette crise».
Qui aurait pu imaginer, il y a quarante ans, alors que le monde était au bord d’une guerre nucléaire, que les vieux ennemis se retrouveraient un jour assis à la même table pour analyser, calmement, les heures terribles de la crise des fusées. Dans la grande salle du palais des conventions de La Havane, Cubains et américains s’observent. D’un côté, Fidel Castro entouré de vieux généraux couverts de médailles, de l’autre Robert McNamara, secrétaire de la Défense de l’administration Kennedy accompagné de trois conseillers présidentiel de l’époque et d’ex-membres de la CIA. Les quelques participants russes, invités à titre personnel et non officiel comme les américains, ont été installés sur les bas-côtés. Dans un pays où la forme en dit long sur le fond, la conférence internationale sur la crise d’octobre avait des aires de rencontre bilatérale.
Cuba prend sa revanche
Si en 1962, Américains et Soviétiques négociaient en tête-à-tête, excluant Cuba de toutes résolutions, aujourd’hui, Fidel Castro, seul dirigeant de l’époque encore au pouvoir, a bien l’intention de régler ses comptes. Dès le premier jour de la conférence, les Cubains ont insisté sur les erreurs de l’URSS ayant abouti à la crise. Notamment le choix de Khrouchtchev d’installer secrètement les fusées à Cuba, malgré les conseils de Fidel Castro. À l’époque, le chef de la révolution cubaine encourageait son homologue soviétique à signer un accord bilatéral de défense, arguant qu’aucune loi internationale n’interdisait le stationnement de fusées dans un pays tiers. Le mensonge de Khrouchtchev lorsque Kennedy lui demanda (photos de la CIA en main) s’il y avait bien des fusées soviétiques à 160 kilomètres des côtes américaines a, d’une part inquiété les Américains puis a placé l’URSS en position de faiblesse lors des négociations. Mais, les Américains n’ont pas échappé aux critiques.
Selon Cuba, c’est à cause des incessantes agressions américaines contre l’île, que les fusées auraient été installées, mais cela uniquement dans un but défensif. Pour appuyer cette thèse, les autorités cubaines ont fait allusion à l’invasion ratée de la Baie des Cochons de 1961, et surtout au plan Mangouste mené par la CIA durant l’année 1962, aussitôt découvert par la sécurité cubaine. Mangouste prévoyait une aide logistique pour fomenter une insurrection contre-révolutionnaire, l’assassinat de Fidel Castro et de hauts dirigeants de l’île, ainsi qu’une invasion américaine en cas d’échec. Robert McNamara s’est défendu en rétorquant que le président Kennedy n’avait jamais donné son accord pour une autre invasion de l’île, «Mais je dois reconnaître qu’a la place des Cubains, j’aurais aussi interprété le plan Mangouste comme un danger pour la sécurité nationale».
«L’Occident a raté l’opportunité de créer un monde meilleur».
Le dernier jour de la conférence a été consacré aux leçons à tirer d’une telle crise. Pour la partie américaine, Robert McNamara a insisté sur l’importance à accorder aux points de vue de l’adversaire. Il a également appelé les responsables politiques et militaires du monde entier à éviter les erreurs pouvant causer la mort d’innocents, «comme cela c’est déjà malheureusement produit en Afghanistan».
Fidel Castro à lui rappelé l’importance de l’éthique et de la morale dans la vie publique. Puis, analysant la fin de la Guerre froide a conclu, pessimiste: «La disparition du camp socialiste a été un véritable cadeau du ciel pour les Américains (...) Mais l’Occident a raté l’opportunité de créer un monde meilleur. Depuis dix ans, les crédits économisés auraient dû être utilisés à des fins essentiels et nécessaires, aussi bien d’un point de vue humain que politique et éthique. Cela n’a pas été réalisé et aujourd’hui le monde se trouve dans une situation de catastrophe économique internationale et personne, ni même tous les prix Nobel d’économie réunies, ne connaissent de solution à cette crise».
par Karen DONADEL
Article publié le 15/10/2002