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Affaires politico-financières

Une plainte pour péché de gourmandise

La mairie de Paris a annoncé, le 29 octobre, son intention de déposer prochainement une plainte contre X avec constitution de partie civile sur les «dépenses de bouche» jugées somptuaires, autrement dits les achats alimentaires, du couple Chirac entre 1987 et 1995 quand il résidait à l'Hôtel de Ville.
Tout commence quand Bertrand Delanoë, actuel maire de Paris, commande en octobre 2001 un rapport à l'Inspection générale sur le fonctionnement de la questure, chargée notamment de régler les dépenses de collaborateurs d'élus et des frais de réception. Peu après, l'hebdomadaire satirique Le Canard Enchaîné révèle cette affaire et évoque des frais de réception et de nourriture du couple Chirac entre 1987 et 1995 d'un montant total de 14,5 millions de francs (2,21 millions d'euros) dont 9,5 millions de francs (1,45 millions d'euros) réglé en espèces. En juillet, la mairie de Paris transmet le rapport au parquet de Paris qui répond, le 15 octobre qu’il n’y a pas lieu de poursuivre : certains faits, selon lui, ne peuvent être qualifiés pénalement, d’autres sont couverts par la prescription et pour d’autres enfin, l’infraction ne peut être caractérisée.

C’est Bertrand Delanoë, en personne, en convalescence au Pays basque après son agression début octobre à l’Hôtel de Ville lors de la «Nuit blanche», qui a rédigé le texte de la plainte et ainsi décidé de relancer l’affaire. En déposant cette plainte contre X avec constitution de partie civile, le maire de Paris utilise une possibilité juridique de contourner le parquet. En effet, un juge d’instruction sera obligatoirement désigné et il pourra engager, s’il le désire, des investigations, même sans le soutien du procureur.

La droite crie au scandale

Dans l’éventualité d’une ouverture d’information judiciaire, une audition de Bernadette Chirac, épouse du chef de l’Etat, serait juridiquement possible puisque c’est elle qui a procédé à la plupart des dépenses litigieuses et qu’elle ne bénéficie pas de l’immunité. En revanche, le président français ne peut être ni entendu ni poursuivi, selon un statut pénal défini en cassation le 10 octobre 2001. Cité dans d’autres dossiers de corruption présumée remontant à l’époque où il était maire de Paris - de 1977 à 1995 -, Jacques Chirac s’est toujours refusé à témoigner au nom de l’immunité qui protège les chefs d’Etat en France.

L’annonce du dépôt de la plainte a suscité la colère de la droite. Ainsi Claude Goasguen, président du groupe UMP à la mairie de Paris a déclaré : «c’est une plainte contre Jacques Chirac, pourquoi vous cacher derrière des X peu courageux» avant de mettre en garde «ceux qui s’aventurent à être des calomniateurs». En revanche, la gauche a salué la décision du maire de Paris. «Elle est cohérente au regard des principes (...) La transparence voulue par les Parisiens en mars 2001 n'est pas qu'un discours, elle passe également par des actes», a affirmé Patrick Bloche, président du groupe socialiste et radical de gauche au Conseil de Paris.



par Clarisse  Vernhes

Article publié le 30/10/2002