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Mexique

Tolérance zéro à Mexico

Au Mexique, le maire de la capitale cherche a réduire la délinquance et prend modèle sur l’exemple new-yorkais en matière de lutte contre la criminalité. Rudolph Giuliani, l’ancien maire de New York qui est le promoteur de la politique de tolérance zéro, est appelé à la rescousse.
De notre correspondant à Mexico

Le maire de Mexico vient d’embaucher un nouveau collaborateur. Il s’agit ni plus ni moins que de Rodolph Giuliani, l’ancien maire de New York. On se souvient que grâce à une politique de tolérance zéro, celui-ci était parvenu à réduire de 60 % la délinquance new-yorkaise.
Rudolph Giuliani qui a quitté la politique, le 31 décembre dernier, comme un héros après avoir galvanisé le moral des Américains à la suite des attentats du 11 septembre, a décidé de mettre à profit sa renommée et son savoir-faire. La société de conseils Giuliani et Associés qu’il vient de créer, propose ses services aux entreprises en difficultés, aux gouvernements et aux maires des grandes villes confrontés aux problèmes de l’insécurité.

Il vient de signer un premier contrat d’un an renouvelable avec la ville de Mexico. La délinquance et la criminalité sont le problème numéro un de cette mégapole de 20 millions d’habitants et l’insécurité est devenue un motif d’angoisse pour la population qui ne croit plus dans la police, ni dans la justice.

Cette initiative revient à un groupe de riches industriels, menés par le milliardaire Carlos Slim qui, lassés de l’incapacité de la police mexicaine à baisser les chiffres de la délinquance, ont proposé au maire de Mexico de tenter l’expérience Giuliani, acceptant de financer l’opération.

4,3 millions de dollars d’honoraires

Pour 4,3 millions de dollars d’honoraires, le «shérif Rudy» devra réaliser un diagnostic, réviser les informations, les chiffres et les statistiques de la police de la capitale et faire des recommandations qui pourraient aller jusqu’à sa totale restructuration. Les 15 collaborateurs de l’ancien maire, parmi lesquels Bernard Kerik, ex-commissaire de la police de New York, et Thomas Von Essel, ex-commandant des pompiers, devraient superviser la mise en place d’une politique de «tolérance zéro» similaire à celle appliquée à New York. La méthode consiste à réprimer avec sévérité le moindre délit pour empêcher les délinquants de progresser dans la violence ou la criminalité.
Pour la presse, faire appel à Giuliani c’est reconnaître que le maire de Mexico, Andrès Manuel Lopez Obrador, qui appartient au centre gauche, n’a pas d’autre option à proposer. Mais sa faiblesse réside aussi dans le fait d’avoir accepté l’idée et l’appui du patronat qui veut imposer une solution conservatrice au problème de l’insécurité dans la ville : la répression. Or, l’insécurité à Mexico n’a pas du tout le même profil que celle de New York, les méthodes appliquées par Giuliani risquent d’être un échec.

L’opération tolérance zéro avait pour objectif d’élever la qualité de la vie des new-yorkais, elle s’appliquait dans une des cités les plus riches du monde, contre les infractions mineures : faire disparaître des rues les mendiants, les laveurs de pare-brises, faire arrêter ceux qui boivent, urinent, provoquent des scandales sur la voie publique, en un mot, se débarasser de la petite délinquance. Mexico est une capitale du tiers monde, 50% de la population vit avec moins de 2 dollars par jour, la crise économique et les politiques néolibérales ont engendré une économie informelle qui produit la moitié du PIB de la ville. Certains craignent donc que cette politique de tolérance zéro ne bénéficie qu’aux classes aisées soulignant que les sources d’insécurité les plus graves sont évacuées du débat, sans parler des énormes détournements de fonds et escroqueries qui sont légions au Mexique, ni des personnes poussées au suicide par une société profondément injuste (environ 100 000 tentatives par an et 12 000 morts).

D’autre part, on peut craindre que cette opération ne soit qu’une chasse aux pauvres qui se traduise par une augmentation de la population dans les prisons qui sont déjà au bord de l’explosion et d’un engorgement des tribunaux, eux aussi saturés, ce qui ne fera qu’augmenter la corruption. D’autres craignent qu’avec une police mal payée, corrompue, peu entraînée, sans éducation et dont les représentants ont déjà la gâchette facile, on aille bien au-delà des bavures de la police new-yorkaise qui avaient scandalisé le monde. La première mesure, tout aussi coûteuse, qu’aurait pu proposer Manuel Lopez Obrador, aurait pu être simplement, d’apprendre leur métier aux policiers.



Article publié le 26/10/2002