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Monnaie unique européenne

Les jours comptés du pacte de stabilité

Les propos du président de la Commission européenne Romano Prodi sur le pacte de stabilité ont ouvert les vannes : ceux qui n’osaient le critiquer ouvertement s’en donnent à coeur joie. Mais ceux qui ont fait des efforts, parfois importants, pour s’y soumettre protestent.
Francis Mer, le ministre français de l’Economie et des Finances avait fait scandale, début octobre, en expliquant à ses homologues membres de l’eurogroupe que la France avait actuellement d’autres priorités que la discipline financière et budgétaire imposée par le pacte de stabilité européen. Les propos de Romano Prodi au quotidien français Le Monde sont venus enfoncer le clou, avec tout le caractère officiel que revêt une déclaration du président de la Commission européenne. Celui-ci a qualifié de «stupide» un pacte de stabilité fixant des objectifs rigides, alors qu’il n’existe au sein de l’Union européenne aucune autorité capable d’impulser une réelle coordination des politiques économiques nationales.

Cette mise en cause d’un accord intergouvernemental, datant de 1997 et rendu d’application difficile par une conjoncture économique mondiale peu favorable au désendettement des Etats, n’intervient cependant pas par hasard. Cette souplesse soudaine du président de la Commission européenne qui avait toutefois proposé de reporter de 2004 à 2006 l’obligation d’équilibre budgétaire, fait suite à l’annonce par le gouvernement allemand qu’il ne sera pas en mesure de se tenir à la limite de 3% du PIB des déficits publics en 2002. Pour les analystes, le nouveau gouvernement allemand a lui aussi choisi de donner la priorité à la lutte pour l’emploi, alors que l’Allemagne compte 4 millions de chômeurs. Or, on se souvient que c’est l’Allemagne qui, en 1997, au sommet européen d’Amsterdam avait imposé un pacte contraignant afin que les Etats d’Europe du Sud, soupçonnés de laxisme budgétaire, ne s’écartent pas du bon chemin.

Flexible et plus social

France et Allemagne représentent ensemble plus de la moitié du poids économique de la zone euro. La «sortie des clous» par ces deux pays rend donc à peu près caduques les exigences du pacte de stabilité et met en lumière son caractère de plus en plus hypothétique, face aux réalités économiques. D’ailleurs les premiers intéressés à cet assouplissement se sont empressés, à l’exemple de Francis Mer, de saluer les déclarations de Romano Prodi. Le ministre français de l’Economie a appelé de ses vœux un pacte faisant preuve «d’un peu plus de flexibilité et d’un peu moins de simplicité». C’est aussi l’avis de Daniel Cohn-Bendit, président du groupe écologiste au parlement européen selon lequel il faudrait discuter d’un nouveau pacte qui combinerait convergence économique et convergence sociale et où l’emploi serait au nombre des critères. Pascal Lamy, commissaire européen au Commerce a qualifié certaines règles du pacte de «médiévales» et souhaité qu’il soit modernisé voire remplacé.

En revanche, le Premier ministre danois Anders Fogh Rasmussen qui préside l’Union européenne et dont le pays n’appartient pas à la zone euro, plaide pour s’en «tenir fermement à une interprétation stricte des règles». Le chef du gouvernement espagnol Jose Maria Aznar craint une perte de crédibilité de l’Europe si elle met en cause les principes du pacte de stabilité, sentiment partagé par ses homologues luxembourgeois et autrichien. Les marchés des changes ont en effet réagi aux déclarations de Romano Prodi et l’euro a chuté, jeudi 18 octobre, avant de se ressaisir. Quant au Premier ministre français Jean-Pierre Raffarin, il estime que les «principes de bonne gestion» du pacte sont partagés par la France qui s’emploiera à stabiliser puis à réduire son déficit, mais sans fixer de date.

A écouter :
Le tollé provoqué par Prodi
Dominique de Courcelles, invitée de la Rédaction au micro de Philippe Cergel (18/10/2002).



par Francine  Quentin

Article publié le 18/10/2002