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Politique française

Les premières difficultés du gouvernement Raffarin

Alors que depuis six mois, Jacques Chirac a retrouvé la plénitude de ses prérogatives présidentielles - il a été réélu le 5 mai dernier avec plus de 82% des voix et son camp a largement gagné les élections législatives -, son Premier ministre Jean-Pierre Raffarin doit affronter la fronde de l'opposition mais surtout celle de la majorité sur son projet de loi constitutionnelle relative à la décentralisation.
Alors qu'en 1995, il avait paru oublier assez rapidement ses promesses électorales centrées alors sur la réduction de la «fracture sociale», Jacques Chirac s'attache aujourd'hui à tenir ses engagements de campagne en dépit d'un horizon économique morose. Et c'est à son chef de gouvernement que revient cette tâche difficile et ardue. Six mois après avoir été nommé Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin qui jouit toujours d'une forte cote de popularité (67% selon un sondage IFOP publié dans Le Figaro du 5 novembre ) voit pourtant son travail se compliquer avec un climat économique et social plutôt terne et une fronde venue de son propre camp contre sa réforme phare : la décentralisation qui marque la volonté politique de modifier les rapports entre l’Etat et les collectivités territoriales.

Après avoir mis sur les rails les lois sur la justice, la sécurité, la baisse des impôts puis la réforme des 35 heures et un budget pour 2003 des plus optimistes, le gouvernement se retrouve confronté à des dossiers plus délicats. Dans un pays de tradition jacobine, Jean-Pierre Raffarin a pu se rendre compte, depuis quelques jours, que sa réforme de la décentralisation, l’un des grands chantiers de son gouvernement, n’est pas si facile à mettre en œuvre. Plus périlleuse encore s’annonce celle des retraites début 2003.

La décentralisation «ce n’est pas le bazar»

Il rêvait d’en faire le grand œuvre de son passage à Matignon. Contesté jusque dans ses propres rangs, le Premier ministre pourrait se voir contraint de corriger son projet de loi sur la décentralisation dont le Sénat a repris l’examen, le 4 novembre. Un véritable camouflet pour Jean-Pierre Raffarin. En effet, le débat a pris une nouvelle tournure après la mise en garde de Jean-Louis Debré, pourtant membre de la même mouvance politique. La décentralisation, «ce n’est pas le bazar, ce n’est pas une grande braderie qui laisserait la République en morceaux», a déclaré la semaine dernière le président UMP de l’Assemblée nationale. Le 4 novembre, Jean-Pierre Raffarin, qui a fait écho aux propos de ce dernier, s’est efforcé de limiter l’impact politique des critiques contre sa réforme, se déclarant «déterminé» à garder le cap et affirmant agir «au nom du président de la République». «Que le président de l’Assemblée prenne la parole sur ce sujet est tout à fait souhaitable et je n’y vois aucun inconvénient», a déclaré le Premier ministre en déplacement à Besançon.

Outre Jean-Louis Debré, Charles Pasqua, ancien ministre de l’Intérieur et actuel président du Rassemblement pour la France (RPF) a commenté cette réforme : «pour le moment, tout cela manque un peu de clarté», a-t-il dit avant d’exprimer ses inquiétudes sur un texte qui «porte en germe ou risque de porter en germe la désagrégation de la Nation». Jusqu’ici, seule la gauche avait émis de sérieuses critiques sur ce projet de loi. Il semblerait que depuis quelques jours, la majorité s’entraîne à ce genre d’exercice.

Cette réforme s’annonce donc plus difficile à maîtriser que prévu pour le chef du gouvernement. Le Sénat, pourtant largement acquis à la droite et connu pour sa volonté décentralisatrice, a décidé de batailler ferme. Outre la gauche, minoritaire, qui s’est ressoudée à l’occasion pour dénoncer ce projet, la majorité, plus particulièrement au sein de la Commission des Lois, multiplie les amendements. Et, l’examen à l’Assemblée nationale, le 19 novembre prochain, pourrait s’avérer tout aussi ardu.

Lire également :
La décentralisation dans la douleur
(L’éditorial politique de Geneviève Goëtzinger)



par Clarisse  Vernhes

Article publié le 05/11/2002