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Australie

Le roquefort déclaré «<i>dangereux pour la santé publique</i>»

Depuis près de dix mois maintenant, 80 kg de roquefort, en provenance des Fromageries de l’Occitane, sont bloqués dans le port de Melbourne en Australie. En choisissant d’importer du roquefort au mois de janvier dernier, Will Studd, premier importateur de fromages du pays, a volontairement mis au défi les services australiens d’inspection de la quarantaine. Le fromage français de renommée mondiale constitue désormais le fer de lance pour tous les fromages non pasteurisés jusqu’ici interdits sur cette île-continent. L’ambassadeur de France en Australie, Pierre Viaux, lui a remis la médaille de l’Ordre national du mérite agricole pour son action.
De notre correspondante à Melbourne,

«Partout dans le monde, il est possible de consommer du roquefort sauf en Australie et en Nouvelle Zélande où il est déclaré dangereux pour la santé publique!» lance Will Studd, un anglais qui a fait ses classes à Rungis. L’affaire a commencé au mois de décembre de l’année dernière. Les autorités australiennes et néo-zélandaises sur la nourriture (ANZFA) annoncent une modification de la réglementation concernant les tests bactériologiques. Désormais le code autorise les procédés qui «assurent une réduction du niveau des bactéries équivalent à la pasteurisation».

Une brèche est donc ouverte pour les fromages non pasteurisés jusqu’ici interdits sur le territoire. Will Studd, premier importateur de fromages en Australie, s’y engouffre et choisit de faire venir du roquefort, un des trente-huit fromages français d’appellation d’origine contrôlée (AOC). Dès son débarquement sur le port de Melbourne, la cargaison est mise en quarantaine en attendant le jugement des autorités. La décision négative tombe cinq mois plus tard. Sans même avoir testé les produits, les autorités australiennes concluent que le roquefort est «dangereux pour la santé publique» et demandent la destruction des stocks ou leur renvoi en France. Will Studd a décidé de faire appel.

Au son de la Marseillaise

Pendant une période de quatorze ans, de 1980 à 1994, les fromages non-pasteurisés étaient importés en Australie. Mais après une plainte des producteurs locaux, qui ne sont pas autorisés à produire des fromages non pasteurisés, l’ANZFA décide d’interdire toute importation de fromages de ce type. «La France n’a pas du tout la même tradition ni les mêmes techniques de production que l’Australie», commente Will Studd. «La pasteurisation (qui consiste à bouillir le lait à 72 degrés et de le maintenir ainsi durant quinze secondes) est indispensable en Australie et en Nouvelle Zélande pour garantir la sécurité et la qualité des produits. En France, les bactéries, essentielles à la saveur du fromage, sont rendues inoffensives par la combinaison de contrôles rigoureux du lait, de la longue période de maturation, de l’acide naturel et de la quantité de sel».

En recevant la médaille de l’Ordre du mérite national agricole des mains de l’ambassadeur de France en Australie, le samedi 5 octobre, Will Studd s’est senti soutenu dans son combat mais surtout dans son action de promotion des fromages français en Australie. «Les Australiens consomment 11 kg de fromages par an, essentiellement du cheddar. Il faut juste leur donner l’occasion de découvrir des fromages plus spécifiques. Il faut savoir qu’il y a vingt ans, le fromage de chèvre n’était pas produit en Australie. Ce pays vient de loin, mais il a encore du chemin à parcourir», reconnaît le maître fromager.

«Nous allons gagner, il n’y a pas de doute. C‘est juste du bon sens. Et si ce n‘est pas en appel, ce sera sous la pression européenne et devant la cour de l’Organisation mondiale du commerce», déclare Will Studd convaincu. Cependant, en cas de confirmation du jugement, il se prépare pourtant à enterrer le stock de Roquefort au son de la Marseillaise. La décision en appel sera rendue au début du mois de décembre.



par Carole  Martin

Article publié le 03/11/2002 Dernière mise à jour le 23/09/2005 à 10:07 TU