Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Côte d''Ivoire

Les «affaires Dakoury» conditionnent les négociations

Suspendues samedi soir dernier par les rebelles, les négociations de Lomé devraient reprendre ce mercredi: leur porte-parole Guillaume Soro a affirmé lundi soir qu’ils étaient de nouveau «disponibles pour reprendre à tout moment le dialogue». Au centre de ce revirement, les deux «affaires Dakoury» : d’un côté le ralliement de Louis Dakoury-Tabley dans le camp des rebelles et de l’autre l’assassinat à Abidjan du Docteur Benoît. La famille Dakoury-Tabley a rencontré lundi le président Gbagbo, avant de publier un communiqué qui éclaire un peu ces deux affaires qui semblent conditionner l’avenir du pays.
Le président togolais Gnassingbé Eyadéma devait recevoir ce mardi deux envoyés spéciaux de la présidence ivoirienne, pour relancer des négociations suspendues par les rebelles samedi soir, à la suite de la découverte du cadavre du docteur Benoît Dakoury-Tabley, enlevé deux jours plus tôt à Abidjan. Auparavant Eyadéma avait reçu à plusieurs reprises une délégation des rebelles et, si l’on croit le quotidien privé ivoirien L’Inter, le président togolais a vertement reproché à Guillaume Soro l’exploitation qu’il venait de faire de l’assassinat du docteur Dakoury en décidant d’interrompre les négociations et de rentrer aussitôt à Bouaké, en compagnie de deux autres leaders rebelles : l’adjudant Tuho Fozié et le colonel Michel Gueu.

Signe de la colère présidentielle, la télévision togolaise, qui avait «couvert» la conférence de presse des rebelles, a passé sous silence les déclarations de Soro, et les membres de la délégation restés à Lomé ont été «convoqués» dimanche matin au palais présidentiel de Lomé. Ce qui a permis de clore l’incident. Mais pas de décider qui dirigera la délégation des rebelles : Guillaume Soro, Michel Gueu ou Louis Dakouly-Tabley?

«Tentatives de récupération»

Le ralliement de celui-ci à la rébellion a aussitôt déclenchée une véritable tempête politique à Abidjan comme au sein des Dakoury-Tabley, una grande famille bourgeoise originaire (comme le président Gbagbo) de la région de Gagnoa, en pays bété. Mais c’est l’assassinat de son jeune frère, le docteur Benoît Dakoury-Tabley, qui est à l’origine d’une démarche inattendue de la famille toute entière. Après avoir rencontré lundi le président Gbagbo elle a publié un communiqué de presse consacré aux deux «affaires», dans lequel elle déclare que le docteur Benoît a été enlevé à son cabinet par «des individus non identifiés et en tenues civiles». La famille Dakoury trouve par ailleurs «totalement inadmissibles les tentatives de récupération de ce drame par la rébellion dans le cadre des discussions de Lomé» et «dénie à quiconque le droit de se servir de ce prétexte pour endeuiller davantage le peuple ivoirien». Enfin, elle souhaite que l’enquête «aboutisse, afin de découvrir les auteurs de ce crime odieux, dont la responsabilité est portée par les commanditaires des tristes événements du 19 septembre».

Concernant le ralliement à la rébellion de Louis, la famille Dakoury-Tabley accuse celui-ci «d’endosser ipso facto la paternité de la rébellion armée qui endeuille la Côte d’Ivoire depuis le 19 septembre dernier», avant de lui adresser les questions suivantes : «Notre frère sait-il que Boga Doudou (ministre de l’intérieur) a été assassiné dans on lit ? Sait-il que les colonels Dagrou, Dali et Yodé ont été froidement abattus devant leurs enfants ? Que des gendarmes ont été liquidés dans leurs maisons à Abidjan, à Bouaké, à Korhogo, à Vavoua et ailleurs ? Que les rebelles ont massacrés des Ivoiriens enfermés dans les cellules de Bouaké?». Cette grande famille, qui compte entre autres membres un procureur et un évêque, reproche surtout à Louis d’avoir décidé de «prendre les armes pour régler des problèmes politiques».



par Elio  Comarin

Article publié le 12/11/2002