Côte d''Ivoire
L’Afrique de l’Ouest dans l'incertitude
Le Sénégal estime que les négociations de Lomé ont échoué et propose de reprendre l’initiative. Parallèlement, la formation de la force ouest-africaine est sur le point d’aboutir. Mais en l’état des discussions, les rebelles n’en veulent pas.
Les dernières déclarations sénégalaises ont bousculé le scénario des négociations de Lomé. Ce n’est pas encore un coup de théâtre, mais c’est au moins un pavé dans la mare ouest-africaine. En visite à Paris, où il devait rencontrer ce samedi le président de la République, le chef de l’Etat sénégalais s’est déclaré disposé à reprendre la main sur le dossier. Selon lui, le processus de Lomé, entamé le 30 octobre, a fait long feu. «Je n’ai besoin de personne pour régler ce conflit. Donnez-moi un mandat clair pour régler le problème et je le règlerai», a déclaré Abdoulaye Wade qui propose de déplacer le lieu de la négociation en terre ivoirienne. Il est vrai que, depuis jeudi, les délégations ont pris toute la mesure de la profondeur du fossé qui continue de les séparer. Après deux semaines de discussions autour du président togolais, à Lomé, ils n’ont guère pu franchir l’obstacle du règlement politique de la crise. Seule le volet «corporatiste» des revendications présentées par la rébellion a été finalisé. En revanche, en l’état, pour la délégation gouvernementale ivoirienne, les exigences politiques demeurent inacceptables.
Les rebelles continuent en effet à réclamer le départ du président Laurent Gbagbo, dont il ne reconnaissent pas la légitimité, la convocation de nouvelles élections et une modification de la Constitution. Ils envisagent les différents volets de la négociation comme un ensemble indissociable ; c’est à dire qu’ils ne conçoivent pas de déposer les armes sans avoir obtenu satisfaction sur l’ensemble des chapitres en discussion. Ils s’opposent également à tout déploiement de la force d’interposition ouest-africaine tant qu’un accord global n’aura pas été conclu. Dans une déclaration publiée vendredi à Lomé, ils estiment que les dernières propositions qui leur ont été faites «ne se résument qu’à permettre au gouvernement de M. Gbagbo d’assurer son contrôle sur l’ensemble du territoire».
Pourtant le fil n’est pas rompu. Aucune des deux parties n’a quitté Lomé. Elles poursuivent le travail et continuent de rechercher, à la demande du général Gnassingbe Eyadema, la formule qui sortira le pays de l’impasse. Et la France va dépêcher un émissaire dans la capitale togolaise, ancien ambassadeur en Côte d’Ivoire. En tout cas les dernières déclarations sénégalaises n’ont reçu qu’un accueil poli. Le chef de la délégation gouvernementale ivoirienne s’est déclaré «surpris». «Il n’y a pas d’échec à Lomé», a déclaré Laurent Dona Fologo. «Nous sommes pour notre part tout à fait satisfaits du déroulement de ces négociations et de la manière dont le président Eyadema les conduit», a-t-il souligné. Pas de réaction officielle en revanche de la présidence togolaise. Mais on imagine que le constat d’échec formulé par Abdoulaye Wade, qui assure actuellement la présidence tournante de la Cedeao, a du résonner comme un désaveu.
Nouvelle semaine d’incertitudes en perspective
Depuis le début de la crise, le 19 octobre, Dakar a, à maintes reprises, manifesté son souci de prendre toute sa place dans la résolution du conflit. C’est à l’initiative du président Wade qu’un cessez le feu, toujours en vigueur, avait été signé le 17 octobre. Cette fois, outre la proposition de reprendre en main la négociation, c’est sur le terrain militaire que le Sénégal s’engage. Vendredi à Paris, un conseiller à la présidence sénégalaise a annoncé qu’à la demande de Paris et Washington son pays avait accepté de porter de 650 à 700 hommes ses effectifs au sein de la future force que l’Afrique de l’Ouest s’efforce de rassembler, avec le Ghana, le Togo, le Niger et le Bénin afin de relever leurs homologues français dans leur mission de surveillance de la trêve. Moyennant quoi, elle passerait sous commandement sénégalais. Cette force sera dotée d’un effectif total de 1264 hommes et son financement et sa logistique seront partiellement fournis par la France, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, les Pays-Bas, la Belgique, le Canada et l’Allemagne. Une réunion technique de coordination a eu lieu cette semaine à Paris et les premiers éléments de ce contingent, une vingtaine de personnes, devraient arriver dès ce week-end à Abidjan pour préparer l’arrivée de cette force. Dont, rappelons-le, les rebelles qui continuent de contrôler militairement la moitié du pays, ne veulent pas entendre parler tant qu’aucun accord global n’aura pas été conclu. Bien qu’ils accusent en effet les soldats français de ne pas les avoir laissé conquérir Abidjan, en contribuant à geler les positions sur le terrain, ils continuent à leur manifester une confiance qu’ils n’accordent pas aux forces ouest-africaines en préparation.
C’est donc une nouvelle semaine d’incertitudes qui va s’ouvrir pour la Côte d’Ivoire et toute la sous-région affectée par cette crise ivoirienne. Incertitude politique sur la question de savoir si le processus de Lomé pourra rebondir ou si la piste offerte par la proposition sénégalaise constituera une véritable alternative. Incertitude militaire en raison du constat d’enlisement de la situation et de la nécessité de remplacer les soldats français présent sur le terrain pratiquement depuis le début du coup d’Etat manqué du 19 octobre.
Les rebelles continuent en effet à réclamer le départ du président Laurent Gbagbo, dont il ne reconnaissent pas la légitimité, la convocation de nouvelles élections et une modification de la Constitution. Ils envisagent les différents volets de la négociation comme un ensemble indissociable ; c’est à dire qu’ils ne conçoivent pas de déposer les armes sans avoir obtenu satisfaction sur l’ensemble des chapitres en discussion. Ils s’opposent également à tout déploiement de la force d’interposition ouest-africaine tant qu’un accord global n’aura pas été conclu. Dans une déclaration publiée vendredi à Lomé, ils estiment que les dernières propositions qui leur ont été faites «ne se résument qu’à permettre au gouvernement de M. Gbagbo d’assurer son contrôle sur l’ensemble du territoire».
Pourtant le fil n’est pas rompu. Aucune des deux parties n’a quitté Lomé. Elles poursuivent le travail et continuent de rechercher, à la demande du général Gnassingbe Eyadema, la formule qui sortira le pays de l’impasse. Et la France va dépêcher un émissaire dans la capitale togolaise, ancien ambassadeur en Côte d’Ivoire. En tout cas les dernières déclarations sénégalaises n’ont reçu qu’un accueil poli. Le chef de la délégation gouvernementale ivoirienne s’est déclaré «surpris». «Il n’y a pas d’échec à Lomé», a déclaré Laurent Dona Fologo. «Nous sommes pour notre part tout à fait satisfaits du déroulement de ces négociations et de la manière dont le président Eyadema les conduit», a-t-il souligné. Pas de réaction officielle en revanche de la présidence togolaise. Mais on imagine que le constat d’échec formulé par Abdoulaye Wade, qui assure actuellement la présidence tournante de la Cedeao, a du résonner comme un désaveu.
Nouvelle semaine d’incertitudes en perspective
Depuis le début de la crise, le 19 octobre, Dakar a, à maintes reprises, manifesté son souci de prendre toute sa place dans la résolution du conflit. C’est à l’initiative du président Wade qu’un cessez le feu, toujours en vigueur, avait été signé le 17 octobre. Cette fois, outre la proposition de reprendre en main la négociation, c’est sur le terrain militaire que le Sénégal s’engage. Vendredi à Paris, un conseiller à la présidence sénégalaise a annoncé qu’à la demande de Paris et Washington son pays avait accepté de porter de 650 à 700 hommes ses effectifs au sein de la future force que l’Afrique de l’Ouest s’efforce de rassembler, avec le Ghana, le Togo, le Niger et le Bénin afin de relever leurs homologues français dans leur mission de surveillance de la trêve. Moyennant quoi, elle passerait sous commandement sénégalais. Cette force sera dotée d’un effectif total de 1264 hommes et son financement et sa logistique seront partiellement fournis par la France, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, les Pays-Bas, la Belgique, le Canada et l’Allemagne. Une réunion technique de coordination a eu lieu cette semaine à Paris et les premiers éléments de ce contingent, une vingtaine de personnes, devraient arriver dès ce week-end à Abidjan pour préparer l’arrivée de cette force. Dont, rappelons-le, les rebelles qui continuent de contrôler militairement la moitié du pays, ne veulent pas entendre parler tant qu’aucun accord global n’aura pas été conclu. Bien qu’ils accusent en effet les soldats français de ne pas les avoir laissé conquérir Abidjan, en contribuant à geler les positions sur le terrain, ils continuent à leur manifester une confiance qu’ils n’accordent pas aux forces ouest-africaines en préparation.
C’est donc une nouvelle semaine d’incertitudes qui va s’ouvrir pour la Côte d’Ivoire et toute la sous-région affectée par cette crise ivoirienne. Incertitude politique sur la question de savoir si le processus de Lomé pourra rebondir ou si la piste offerte par la proposition sénégalaise constituera une véritable alternative. Incertitude militaire en raison du constat d’enlisement de la situation et de la nécessité de remplacer les soldats français présent sur le terrain pratiquement depuis le début du coup d’Etat manqué du 19 octobre.
par Georges Abou
Article publié le 16/11/2002