Côte d''Ivoire
Gbagbo propose un référendum
Deux mois jour pour jour après le déclenchement de la rébellion, le président Laurent Gbagbo a pris l’initiative de débloquer les négociations en cours à Lomé en proposant d’organiser l’année prochaine un référendum sur la constitution adoptée en juillet 2000 par une large majorité d’Ivoiriens. «Je vais faire un référendum pour demander au peuple : ‘voulez-vous oui ou non qu’on amende la Constitution?’», a-t-il déclaré à la télévision nationale. Par cette initiative inattendue, il relance une négociation au point mort et accepte l’une des revendications des rebelles, tout en obligeant ceux-ci à se prononcer désormais clairement sur des questions aussi essentielles que l’unité du pays et la légitimité du pouvoir actuel.
Il sera en effet difficile à la rébellion de dire non à une proposition de révision constitutionnelle qu’elle réclame depuis toujours. L’actuelle constitution, adoptée du temps de la junte dirigée par le général Robert Gueï, écarte de la course à la présidence de la République le leader du RDR Alassane Ouattara, en raison de sa «nationalité douteuse». Or la plupart des leaders politiques et militaires connus de la rébellion sont - ou ont été - proches du RDR, à l’instar des généraux Koulibaly et Palenfo et du colonel Ibrahima Koulibaly (‘IB’) qui semblent en être les véritables «parrains». Cela dit, l’actuelle Constitution a été votée en juillet 2000 par l’ensemble de la classe politique : y compris par le RDR d’Alassane Ouattara et le PDCI de Henri Konan Bédié, tous deux écartés par la suite de la course présidentielle par la Cour suprême ivoirienne que dirigeait à l’époque un proche du général Gueï. Autant dire que les polémiques sur «l’ivoirité» risquent de revenir sur le devant de la scène, au moment où les questions liées à l’attribution de la carte d’identité ne semblent pas définitivement réglées.
Une toute dernière chance pour la paix
"En 2003 nous aurons bouclé tout le processus d’identification de tous les Ivoriens et de tous les non-Ivoiriens. Ainsi, soit à la fin de l’année 2003, soit au début de l’année 2004, nous allons organiser un référendum pour demander au peuple si oui ou non il est d’accord pour qu’on procède à une modification de la Constitution," a dit à ce propos Laurent Gbagbo. En attendant, le gouvernement entend faire des reformes au niveau de l’Office national de l’identification (ONI) «pour accélérer le processus d’attribution des cartes nationales d’identité» et compte créer «un groupe d’éthique comprenant des personnalités émanant des principaux partis politiques pour veiller à la bonne exécution de l’opération d’identification». Une opération à la fois délicate et indispensable, dans un pays de 15,3 millions d’habitants, dont près de 4,5 millions d’étrangers, qui conditionne le paysage électoral de la Côte d’Ivoire et qui n’a jamais été véritablement affrontée depuis sa naissance. Mais c’est aussi une question remise tragiquement à l’ordre du jour par la mutinerie du 19 septembre, vite apparue comme une véritable rébellion.
A ce propos Laurent Gbagbo a fait un aveu rare dans la bouche d’un chef d’Etat : il a avoué que sa «plus grande erreur aura été d’avoir ignoré la dimension militaire » dans sa stratégie de gouvernement. Désormais il est convaincu «qu’il il ne peut y avoir de prospérité économique sans puissance militaire, assise elle-même sur une industrie militaire». Des propos qui tranchent nettement avec les choix de Félix Houphouët-Boigny, qui n’avait jamais doté le pays d’une armée à la hauteur des ambitions du pays, préférant faire confiance aux soldats français basés à Port-Bouet en cas de besoin.
La proposition de référendum constitutionnel répond en quelque sorte au récent rejet par les rebelles du compromis mis au point par la CEDEAO, mais aussi à leurs dernières contre-propositions, jugées «plus réalistes» à Lomé. Selon la presse ivoirienne, la rébellion ne demande désormais plus le départ de Gbagbo, mais elle n’accepterait d’être désarmée qu’après la signature d’un «accord politique global», l’élaboration d’un nouveau code de la nationalité et l’arrêt de l’opération d’identification en cours.
Enfin, après l’arrivée à Lomé d’un envoyé spécial français, en la personne de Christian Dutheil de la Rochère, ancien ambassadeur en Côte d’Ivoire, c’est autour d’un autre «médiateur» de faire son apparition : la Communauté de Sant’Egidio, présente depuis longtemps en Côte d’Ivoire et réputée pour ses bons offices dans différents conflits de la planète. Cette «ONU des pauvres» est désormais représentée dans la capitale togolaise par Mario Giro, un spécialiste des questions africaines qui dans le passé a souvent rencontré le président Gbagbo, ainsi que le colonel Kadhafi, notamment lorsque celui-ci souhaitait jouer le médiateur entre les belligérants du Congo démocratique.
Toutes ces initiatives semblent indiquer qu’une toute «dernière chance» est laissée à la paix, au moment où le contingent de la CEDEAO censé contrôler la ligne de cessez-le-feu à la place de l’armée française commence à débarquer à Abidjan
Une toute dernière chance pour la paix
"En 2003 nous aurons bouclé tout le processus d’identification de tous les Ivoriens et de tous les non-Ivoiriens. Ainsi, soit à la fin de l’année 2003, soit au début de l’année 2004, nous allons organiser un référendum pour demander au peuple si oui ou non il est d’accord pour qu’on procède à une modification de la Constitution," a dit à ce propos Laurent Gbagbo. En attendant, le gouvernement entend faire des reformes au niveau de l’Office national de l’identification (ONI) «pour accélérer le processus d’attribution des cartes nationales d’identité» et compte créer «un groupe d’éthique comprenant des personnalités émanant des principaux partis politiques pour veiller à la bonne exécution de l’opération d’identification». Une opération à la fois délicate et indispensable, dans un pays de 15,3 millions d’habitants, dont près de 4,5 millions d’étrangers, qui conditionne le paysage électoral de la Côte d’Ivoire et qui n’a jamais été véritablement affrontée depuis sa naissance. Mais c’est aussi une question remise tragiquement à l’ordre du jour par la mutinerie du 19 septembre, vite apparue comme une véritable rébellion.
A ce propos Laurent Gbagbo a fait un aveu rare dans la bouche d’un chef d’Etat : il a avoué que sa «plus grande erreur aura été d’avoir ignoré la dimension militaire » dans sa stratégie de gouvernement. Désormais il est convaincu «qu’il il ne peut y avoir de prospérité économique sans puissance militaire, assise elle-même sur une industrie militaire». Des propos qui tranchent nettement avec les choix de Félix Houphouët-Boigny, qui n’avait jamais doté le pays d’une armée à la hauteur des ambitions du pays, préférant faire confiance aux soldats français basés à Port-Bouet en cas de besoin.
La proposition de référendum constitutionnel répond en quelque sorte au récent rejet par les rebelles du compromis mis au point par la CEDEAO, mais aussi à leurs dernières contre-propositions, jugées «plus réalistes» à Lomé. Selon la presse ivoirienne, la rébellion ne demande désormais plus le départ de Gbagbo, mais elle n’accepterait d’être désarmée qu’après la signature d’un «accord politique global», l’élaboration d’un nouveau code de la nationalité et l’arrêt de l’opération d’identification en cours.
Enfin, après l’arrivée à Lomé d’un envoyé spécial français, en la personne de Christian Dutheil de la Rochère, ancien ambassadeur en Côte d’Ivoire, c’est autour d’un autre «médiateur» de faire son apparition : la Communauté de Sant’Egidio, présente depuis longtemps en Côte d’Ivoire et réputée pour ses bons offices dans différents conflits de la planète. Cette «ONU des pauvres» est désormais représentée dans la capitale togolaise par Mario Giro, un spécialiste des questions africaines qui dans le passé a souvent rencontré le président Gbagbo, ainsi que le colonel Kadhafi, notamment lorsque celui-ci souhaitait jouer le médiateur entre les belligérants du Congo démocratique.
Toutes ces initiatives semblent indiquer qu’une toute «dernière chance» est laissée à la paix, au moment où le contingent de la CEDEAO censé contrôler la ligne de cessez-le-feu à la place de l’armée française commence à débarquer à Abidjan
par Elio Comarin
Article publié le 20/11/2002