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Proche-Orient

Une colombe à la tête du parti travailliste

En choisissant leur nouveau chef, les quelque
110 000 membres du parti travailliste ont également désigné leur candidat au poste de Premier ministre lors des élections législatives de janvier prochain. C'est la colombe Amram Mitzna qui l'a emporté. Certains voient en lui l’homme susceptible de reconstruire un parti laminé par ses dissensions internes et qui a perdu, après vingt mois de cohabitation au sein du gouvernement d’union nationale d’Ariel Sharon, beaucoup de son assise au sein de la société israélienne.
Un seul tour aura suffi pour faire d’Amram Mitzna le nouveau chef du parti travailliste. Le maire de Haïfa a en effet été élu avec 53,9% des voix, devançant ainsi son principal challenger, l’ancien ministre de la Défense Benyamin Ben Eliezer, de quinze points. Soucieux de préserver la cohésion au sein du parti travailliste, Amram Mitzna a, immédiatement après son élection triomphante, appelé ses rivaux à l’unité. «Je remercie les milliers de militants qui m’ont épaulé ces trois derniers mois pour assurer ma victoire et mon objectif est d’unifier le parti afin qu’il se présente en force face au Likoud», a-t-il notamment déclaré. C’est dans cette optique que le maire de Haïfa a proposé à Benyamin Ben Eliezer de devenir le numéro 2 du parti. Fidèle à ses idéaux pacifistes, celui qui se réclame de l’héritage de l’ancien Premier ministre Itzhak Rabin, s’est par ailleurs empressé d’appeler à travailler en direction de la paix. «Le parti travailliste sait comment apporter la sécurité et la paix, comment vivre en paix avec nos voisins et avec nos ennemis», a-t-il notamment rappelé.

En choisissant Amram Mitzna pour diriger leur parti et les représenter au poste de Premier ministre aux législatives de janvier, les travaillistes ont souhaité renforcer le camp de la paix. Car «le général colombe» était le seul des trois candidats à préconiser une reprise immédiate des négociations avec les Palestiniens, dut-il le faire avec le président Yasser Arafat. Amram Mitzna s’était également prononcé pour le démantèlement des colonies israéliennes de la bande de Gaza et des implantations isolées de Cisjordanie. Il s’était même engagé à rechercher une formule de compromis sur la partie arabe de Jérusalem, annexée en 1967 par l’Etat hébreu. Lors d'un récent débat télévisé qui l’a opposé à ses deux challengers, Amram Mitzna avait par ailleurs promis aux Israéliens une séparation avec les Palestiniens qui prendrait l’aspect concret d’une ligne défensive qui suivrait plus ou moins le tracé de la «ligne verte» de démarcation avec la Cisjordanie.

Tous ces engagements, situés à l’opposé de ceux préconisés par le bouillant Benyamin Ben Eliezer, compromis par vingt mois passés au sein du gouvernement d’union nationale d’Ariel Sharon, ont fait d’Amram Mitzna, quasi inconnu en politique il y a seulement trois mois, le favori des travaillistes. Beaucoup estiment en effet qu’il pourrait être l’homme providentiel pour sauver un parti en crise d’identité depuis l’échec cuisant essuyé en 2000 par son ancien dirigeant Ehud Barak face au candidat du Likoud Ariel Sharon.

Duel Sharon-Mitzna en perspective

Mais si Amram Mitzna a remporté haut la main les primaires du parti travailliste, il aura en revanche beaucoup de mal à contrer, lors des législatives de janvier, le candidat du Likoud, que ce soit Ariel Sharon ou Benyamin Netanyahu. Selon un récent sondage, le grand parti de la droite nationaliste est quasiment assuré de doubler le nombre de ses élus à la Knesset et obtenir 34 ou 35 sièges tandis que les travaillistes ne réussiraient eux à faire élire que 19 députés. Car malgré la dégradation de la situation économique et l’échec de la politique sécuritaire du gouvernement d’union nationale, la cote de popularité de l’actuel chef de file du Likoud n’a pas été entamée. Même la surenchère nationaliste et les promesses de relance économique de son ennemi de toujours, Benyamin Netanyahu, n’ont pas réussi à convaincre les Israéliens pour qui Ariel Sharon fait désormais figure de leader «responsable».

Amram Mitzna risque donc d’avoir beaucoup de mal à inverser cette tendance à moins de deux mois et demi du scrutin. Son discours pacifiste ne le rend pas en outre populaire auprès d’une opinion publique poussée vers la droite nationaliste par la poursuite des attentats suicide. Mais le maire de Haïfa, qui bénéficie d’une image d’intégrité, pourrait limiter les dégâts pour son parti et incarner à long terme une réelle politique alternative à celle d’Ariel Sharon.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 19/11/2002