Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Etats-Unis

Bush veut un Congrès à son image

Les Américains votent mardi pour renouveler la chambre des répresentants, une partie de leur Sénat et des gouverneurs des Etats. Au terme d'une campagne sans grande passion, les Républicains devraient conserver leur majorité à la Chambre des représentants, et peut-être remporter le Sénat.
New York, de notre correspondant

Les Américains devraient se rendre mardi aux urnes sans grande conviction. Les traditionnelles «mid-term elections» qui vont redéfinir le paysage politique jusqu'à la prochaine présidentielle dans deux ans, n'ont donné lieu qu'à des débats sans passion. En plus d'une multitude de postes électifs locaux (juges, administrations locales...), les électeurs vont renouveler les 435 sièges de la Chambre des représentants, un tiers du Sénat (soit 34 sièges) et 36 des gouverneurs des 50 Etats américains. Le président Bush s'est jeté corps et âme dans la bataille électorale, faisant campagne pour ses candidats dans les Etats les plus disputés.

Le véritable enjeu de l'élection se joue au Sénat, où les Démocrates disposent pour l'instant d'une courte majorité d'un siège. Selon les derniers sondages, au moins six sièges sont susceptibles de basculer dans un camp ou dans l'autre. Pour les remporter, Républicains et Démocrates se sont lancés dans une course acharnée de dernière minute, faisant un usage immodéré des distributions de tracts, des appels téléphoniques chez les électeurs et du porte-à-porte. Les grands noms des deux partis ont également multiplié les apparitions aux côtés des candidats, alors que les télévisions diffusaient des spots télévisés de plus en plus agressifs.

Les analystes estiment que les Démocrates pourraient conserver le contrôle du Sénat, mais tout dépendra des résultats dans le Missouri, le Colorado, l'Arkansas, le South Dakota, le New Hampshire et le Minnesota, où la mort accidentelle du sénateur Paul Wellstone a bouleversé la donne. Des surprises ne sont pas exclues dans d'autres Etats. Les Républicains ont perdu le contrôle du Sénat l'an dernier quand le sénateur James Jeffords, un indépendant du Vermont, a fait défection aux Républicains pour voter avec les Démocrates. Pour le président Bush, le contrôle de cette chambre est déterminant. Il l'a fait comprendre en répétant à l'envi qu'il ne voulait plus d'un Congrès obstructionniste qui lui donne du fil à retordre sur la mise en place de son nouveau super-ministère de la Sécurité intérieure, la nomination des juges fédéraux ou la réforme fiscale.

Ne pas effaroucher les électeurs

Il est en revanche peu probable que le parti présidentiel perde la majorité dont il jouit à la Chambre des représentants. Comme tous les deux ans, les 435 sièges sont remis en jeu. La majorité républicaine (223 sièges, contre 208 pour les Démocrates et un indépendant) semble confortablement assise, et moins de 10% des sièges sont l'enjeu de luttes farouches. Si ce résultat est confirmé, il viendra contredire une tendace historique qui voit le parti du président perdre des sièges à la Chambre des représentants lors des élections de "mid-term". Il semble même probable que les Républicains augmentent leur majorité de manière significative. Pour ce qui concerne les postes de gouverneur, les Démocrates devraient gagner du terrain. Actuellement, les Républicains disposent de 27 des 50 postes de gouverneur, mais sur les 36 postes soumis à renouvellement, plusieurs pourraient tomber entre les mains de l'opposition. George Bush craint tout particulièrement pour son frère, Jeb Bush, gouverneur de l'Etat de Floride sérieusement menacé par le Démocrate Bill McBride.

Jouissant toujours d'une popularité dépassant les 60% d'opinions favorables et d'un soutien ferme alors que la guerre contre l'Irak approche, George Bush a tout fait pour donner un coup de pouce décisif aux candidats Républicains les plus menacés. Il devait terminer lundi au Texas une tournée électorale menée tambours battants dans une dizaine d'Etats à haut risque. Pour ne pas être en reste, l'ancien président Bill Clinton a lui aussi soutenu les Démocrates dans huit Etats, prenant garde de ne pas se rendre dans les Etats les plus conservateurs où son soutien pourrait se transformer en handicap pour les candidats démocrates qui s'attacheraient son image sulfureuse.

Globalement, la campagne a été décevante. Les Démocrates ont mollement poussé leurs thèmes de prédilection (éducation, santé, économie) sans pour autant franchement contrer le président en matière de politique étrangère et notamment sur le dossier irakien -qui par ailleurs n'intéresse guère les électeurs, dont deux tiers ignorent comment ont voté leurs représentants au parlement sur ce dossier. Dans plusieurs Etats du sud réputés conservateurs, les candidats démocrates ont presque occulté le soutien de leur parti et des ténors libéraux (les Clinton, le chef de la majorité du Sénat Tom Daschle...) et se sont gardés de critiquer le président, de peur d'effaroucher les électeurs. Un étrange consensus a également régné sur la question terroriste et la sécurité nationale. Le débat s'est souvent résumé à des attaques personnelles vicieuses, les candidats n'hésitant pas à dépenser des millions de dollars pour entamer l'image et la crédibilité de leurs opposants dans des clips télévisés. Dans ce contexte, il n'est guère surprenant que les électeurs se soient désintéressés de la campagne. Une majorité d'entre eux estiment qu'aucun des deux partis n'offre de projet pour l'avenir du pays.

Il est possible que les résultats définitifs du vote de mardi ne soient pas connus avant plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Dans le Minnesota, près de trois millions de voix devront être comptées à la main. En Louisianne, le résultat risque de ne pas être connu avant fin décembre. Et dans les deux camps, on se prépare à contester les résultats les plus serrés, en demandant au besoin de nouveaux décomptes, comme ce fut le cas pour l'élection présidentielle.



par Philippe  Bolopion

Article publié le 05/11/2002