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Balkans

Slovénie : élection présidentielle au centre-gauche

La Slovénie choisit dimanche son nouveau Président. Le grand favori du scrutin, Janez Drnovsek, incarne la continuité politique dans cette prospère petite république issue de l’éclatement yougoslave. La Slovénie a été invitée à rejoindre l’OTAN, et devrait adhérer à l’Union européenne dès 2004.
Quelques graffitis lacèrent les murs du petit centre-ville de Ljubljana, aux coquettes façades baroques : «Non à l’OTAN, liberté ! C’est au peuple de décider, pas à l’élite politique». La classe politique slovène est en effet presque unanime à défendre le rapprochement avec l’OTAN. Il est fort difficile de trouver des différences entre les programmes de Janez Drnovsek, depuis longtemps Premier ministre, et celui de son opposante, Barbara Brezigar, Procureure générale de la République. Le premier porte les couleurs du Parti libéral démocrate (SLD), formé à partir des anciens communistes réformés, et jouit du soutien de Milan Kucan, président de la République depuis l’indépendance du pays, en 1991. La seconde candidate appartient au Parti social-démocrate (SDP), qui a lui aussi participé à de nombreux gouvernements de coalition. Les deux formations se réclament du centre gauche, et l’art du consensus constitue la clé de la politique slovène.

Seul le Parti national (SNS, droite nationaliste) se prononce ouvertement contre l’intégration euro-atlantique du pays. Lors du premier tour des élections présidentielles, le 10 novembre, son candidat, Zmajo Jelincic Plemeniti, n’a obtenu que 8,5% des suffrages. Pourtant, selon un récent sondage d’opinion, 38% des Slovènes seulement sont favorables à l’adhésion de leur pays à l’Alliance atlantique, et 39% s’y opposent. Un référendum à l’issue incertaine doit être organisé au printemps.

«L’OTAN promet sa protection militaire au pays, mais les Slovènes ne se sentent pas menacés par leurs voisins, et regardent plutôt le coût de l’adhésion. Les dépenses militaires devront considérablement augmenter pour mettre le pays aux normes exigées par l’Alliance », explique le journaliste Bojan Kavic. La Slovénie possède une vieille tradition de pacifisme. L’Institut pour la paix se loge dans les squats de la rue Metelkova, une ancienne caserne de l’Armée yougoslave, investie par les pacifistes et les alternatifs dès 1991. L’Institut travaille cependant à la slovène, avec sérieux et rigueur. Il a édité une copieuse brochure récapitulant les arguments en faveur et en défaveur de l’adhésion à l’OTAN. «Le courant pro-OTAN se renforce peu à peu», reconnaît pourtant Dusan Rebolj, directeur-adjoint de l’Institut. « La société slovène est profondément disciplinée, elle se ralliera aux consignes des dirigeants politiques».

Une intégration européenne naturelle

La Slovénie est probablement le plus prospère des pays autrefois socialistes : le salaire moyen s’élève à 800 euros, le taux de chômage réel ne dépasse pas 6% de la population active, et le déficit budgétaire se situe en dessous de la barre des 3%. Malgré une inflation encore importante, le coût de la vie est nettement moins élevé que dans la Croatie voisine, où le salaire moyen est deux fois plus bas. Dans ces conditions, on comprend que Bruxelles soit prêt à dérouler le tapis rouge devant les Slovènes.

Si l’adhésion à l’OTAN divise le pays, l’intégration européenne paraît naturelle aux Slovènes, qui ne veulent surtout pas être confondus avec leurs voisins balkaniques. « En dix ans, la part de nos exportations vers l’Union européenne est passée de 6 à 60% des exportations totales», explique l’économiste Peter Polajnar. Pourtant, depuis deux ans, la Slovénie se tourne à nouveau vers les marchés croate, serbe ou bosniaque. « Nous avons une longue histoire commune et nous sommes donc particulièrement bien placés pour conquérir ces marchés». En somme, la Slovénie ne rechignerait pas à jouer un rôle de pont entre l’Union et les Balkans, tandis que l’adhésion à l’OTAN dérange les rêves secrets d’une bonne part des Slovènes, qui verraient bien leur pays choisir la neutralité sur le modèle suisse.



par Jean-Arnault  Dérens

Article publié le 30/11/2002