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Economie française

BNP fait toucher le gros lot à l’Etat

BNP-Paribas a remporté, haut la main, l'appel d'offres surprise du gouvernement sur ses dernières participations dans le Crédit Lyonnais. Le niveau auquel le premier groupe bancaire de la zone euro a placé la barre, 58 euros, laisse présager aux analystes qu'il ne s'en tiendra pas là. En attendant, l'Etat français qui a touché le «gros lot», bien au-delà de ses espérances, se frotte les mains.
Se vendre au plus offrant n'est pas, dans le secteur financier, une première. La Banque Hervet et le CCF ont déjà eu, dans le passé, recours à une procédure du même genre. En revanche, la rapidité et le caractère inattendu de la méthode utilisée par l'Etat français pour se défaire des 10,9% du capital du Crédit Lyonnais qu'il détenait encore, a créé la surprise. Vendredi soir, après la fermeture des marchés afin d'éviter les spéculations de dernière minute et d'éventuels délits d'initiés, on apprenait la mise en vente «aux enchères» des parts que l'Etat avait conservées dans la banque privatisée en 1999 après un scandale financier qui a coûté 15 milliards d'euros aux finances publiques. Les candidats devaient déposer leur offre dès le lendemain en précisant le nombre de titres souhaités.

Dans l'urgence, et pour éviter tout danger d'être devancé, Michel Pébereau, PDG de BNP-Paribas plaçait la barre très haut : 58 euros par action, soit 49% de plus que le dernier cours du Crédit Lyonnais qui s’établissait à un peu moins de 39 euros, et ce, sur la totalité des parts offertes. Le gouvernement avait fait savoir qu’il fonderait sa sélection sur le seul critère du prix proposé et dès lors, les choses n’ont pas traîné. Laissant loin derrière les propositions formulées par le Crédit agricole ou la Société générale, de l’ordre de 42 à 45 euros, BNP-Paribas l’a emporté haut la main.

Francis Mer, ministre de l’Economie et des Finances, n’en attendait pas tant. Là où un gain de 1,5 milliard d’euros paraissait raisonnable, il sera en fait de 2,2 milliards d’euros. Voilà qui permettra de consacrer 1,7 milliard au désendettement des entreprises publiques et 500 millions à un fonds de réserve des retraites. Ce n’est cependant pas le scénario qui avait été envisagé. «Bercy» avait en effet décidé de précipiter une opération de rapprochement entre le Crédit Lyonnais et le Crédit agricole qui s’enlisait. Depuis des mois les deux PDG concernés, Jean Peyrelevade au Lyonnais et Jean Laurent qui, au Crédit agricole détient déjà 10,15% du capital, ne parvenaient pas à s’entendre sur les conditions de reprise des parts de l’Etat. Le patron du Crédit agricole, sûr de finalement remporter l’affaire, refusait de dépasser les 44 euros par action. Le gouvernement a cherché à lui forcer la main. On connaît la suite...

En rester là ?

Le Crédit agricole, coiffé sur le poteau, oblige à remettre en question l’hypothèse de constitution d’un second pôle bancaire, Crédit agricole, Crédit Lyonnais, AGF, face au mastodonte BNP-Paribas. Par ailleurs, le prix consenti par BNP-Paribas pour devenir le premier actionnaire mais toutefois minoritaire du Crédit Lyonnais, fait douter les spécialistes de son intention d’en rester là. Michel Pébereau a beau affirmer qu’il exclut toute prise de contrôle du Crédit Lyonnais «dans l’état actuel des choses» on attend une montée en puissance dans le capital. C’est d’ailleurs le sens qu’il faut probablement accorder à la valorisation du titre Crédit Lyonnais lundi à l’ouverture des marchés.

Les organisations syndicales du Crédit Lyonnais ne s’y méprennent pas non plus. Elles dénoncent les risques pour l’emploi d’une éventuelle prise de contrôle qui entrainerait une rationalisation au sein du groupe en défaveur des salariés du Lyonnais. Une célèbre retraitée du Crédit Lyonnais appelle ses anciens collègues à se mobiliser, il s’agit d’Arlette Laguiller, porte-parole de la formation trotskiste Lutte Ouvrière.

Lire également :
Crédit Lyonnais : la patate chaude
(L'éditorial économique de Norbert Navarro)



par Francine  Quentin

Article publié le 25/11/2002