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Immigration

Sangatte : fermeture anticipée

La fermeture du centre d’accueil des réfugiés de Sangatte était prévue pour avril 2003. Mais Nicolas Sarkozy a annoncé qu’elle aurait lieu plus tôt, le 30 décembre 2002. La France et la Grande-Bretagne se sont finalement mises d’accord sur les modalités d’accompagnement de cette mesure, notamment concernant la prise en charge des exilés actuellement présents dans le centre. Mais cette décision ne résout que la partie émergée de l’iceberg de l’immigration clandestine en Europe. Avec ou sans Sangatte, le flux des candidats à l’immigration vers l’Angleterre ne se tarira pas du jour au lendemain.
«Nous fermerons le centre le 30 décembre. Il sera démantelé et le terrain sera rendu à son propriétaire.» A la suite de son voyage à Londres qui lui a permis de rencontrer, lundi 2 décembre, le Premier ministre britannique, Tony Blair et son homologue, David Blunkett, Nicolas Sarkozy, le ministre français de l’Intérieur, a annoncé que le centre d’accueil de Sangatte allait fermer ses portes près de quatre mois avant la date prévue.

Les Français et les Britanniques ont finalement trouvé un terrain d’entente. Nicolas Sarkozy a accepté d’anticiper la fermeture du centre en échange de l’engagement de Londres d’accueillir plus d’un millier de réfugiés kurdes irakiens mais aussi entre 200 et 300 Afghans ayant déjà de la famille en Grande-Bretagne. Ils bénéficieront d’un visa de travail de trois mois et se verront proposer une activité professionnelle «qui correspond à leurs qualifications». C’est le Haut commissariat aux Réfugiés qui doit dresser les listes des candidats à l’installation outre-Manche.

Cette concession de la Grande-Bretagne permet de donner satisfaction à près de 80 % des réfugiés actuellement hébergés à Sangatte qui désiraient s’établir dans ce pays. Pour les autres (environ 300 ou 400 personnes), la France s’est engagée à leur accorder un titre de séjour, assorti d’une autorisation de travail.

Les trois premières familles ont rejoint l’Angleterre

Le cas de tous les exilés enregistrés ces derniers mois à Sangatte mais «non résidents» au moment de l’accord reste, par contre, en suspens. Depuis septembre 2002, les autorités estiment qu’ils ont été environ 4000 à se présenter, à obtenir une badge et à repartir du centre. Un délai de 24 heures leur a donc été accordé pour se manifester et bénéficier, eux aussi, de cet «arrangement».

C’est la France qui devra aussi régler le cas des 30 à 40 clandestins qui arrivent dans la région de Calais chaque semaine avec l’espoir de traverser la Manche et de rejoindre l’Angleterre. Nicolas Sarkozy a expliqué que ceux qui n’entrent pas dans le cadre de l’accord conclu lundi, «se verront proposer une aide au retour volontaire» dans leur pays d’origine. «Il faut avoir le courage de dire que ceux que nous ne pourrons pas accueillir sur notre territoire seront reconduits chez eux».

Les trois premières familles d’exilées admises sur le sol anglais ont quitté la France vendredi, avant même l’annonce de l’accord, et ont rejoint leurs proches déjà installés sur le territoire anglais. Les autres départs vont s’échelonner, à partir de mercredi, sous l’autorité du Home Office, le ministère britannique de l’Intérieur, qui a dépêché des agents pour veiller au bon déroulement de ces transits.

Les associations qui ont apporté leur aide aux réfugiés de Sangatte ont accueilli l’annonce des mesures d’accompagnement de la fermeture du centre avec une certaine satisfaction, puisque le désir de la plupart des exilés de se rendre en Angleterre a été satisfait. Néanmoins, elles se sont inquiétées du sort de tous les émigrés clandestins qui vont continuer à arriver dans la région dans les semaines et les mois à venir. Car la fermeture de Sangatte ne va pas, à elle seule, stopper les flux. Pour Julia Purcell, de l’association Conseil aux Réfugiés, la «solution à long terme» consiste en «une réelle harmonisation de la politique d’asile» en Europe.

C’est aussi dans ce sens que Nicolas Sarkozy souhaite aller. Il a d’ailleurs concédé que la fermeture de Sangatte ne résoudrait pas «les problèmes d’immigration que nous avons en France, en Grande-Bretagne, et en Europe». Il a aussi plaidé pour une réforme «urgente» du droit d’asile et une «harmonisation des législations des pays européens». La France et la Grande-Bretagne doivent d’ailleurs signer «sous peu» un accord international pour établir des contrôles d’immigration communs. Et elles ont engagé, ces derniers mois, une collaboration policière plus active pour démanteler les réseaux de passeurs qui font leur beurre sur le malheur des candidats à l’exil.

Dans ce contexte, la fermeture de Sangatte est un premier pas symbolique mais concret vers la mise en œuvre de mesures visant à essayer de «maîtriser les flux migratoires». «Nous mettons fin à un symbole d’appel d’air de l’immigration clandestine dans le monde», a expliqué Nicolas Sarkozy. La décision de la Grande-Bretagne de modifier sa législation et de supprimer l’autorisation immédiate de travailler accordée jusque-là à tous les demandeurs d’asile, va dans le même sens et faisait d’ailleurs partie des mesures sollicitées par la France avant d’annoncer la fermeture du centre de Sangatte.



par Valérie  Gas

Article publié le 03/12/2002