Côte d''Ivoire
L’impasse diplomatique
Alors que les rebelles «gueïstes» tiennent toujours d’importantes positions dans l’ouest du pays, les négociations de Lomé entre le pouvoir et les rebelles du MPCI sont visiblement dans l’impasse, et la CEDEAO, plus que jamais secouée par des rivalités nationales, a été contrainte de reporter son sommet prévu pour ce week-end.
Le général Gnassingbé Eyadéma, de plus en plus agacé par les tergiversations des rebelles du MPCI, a pratiquement été obligé de jeter l’éponge : plus d’un mois après le début des pourparlers il a annoncé mercredi qu’il fallait désormais se tourner vers les grands partis politiques, pour les impliquer dans la résolution de la crise ivoirienne, sans préciser lesquels. Il ne peut s’agir que du «quatuor» connu : le FPI de Gbagbo, le PDCI de Bédié, le RDR de Ouattara et, peut-être, ce qui reste du parti de Robert Gueï. Mais dans ce cas, quelle sera la réaction du MPCI, voire des deux autres partis qui ont revendiqué les attaques du Grand Ouest (le MPIGE et MJP), qui ensemble occupent près de la moitié du territoire?
Le médiateur togolais tente visiblement de botter en touche une crise qui ne cesse de se compliquer. Lors de la visite éclair à Lomé du ministre français Dominique de Villepin, les rebelles ont été mis devant une évidence : le gouvernement de Laurent Gbagbo issu des urnes, mais aussi la CEDEAO et la France, ne pourront jamais accepter de discuter sur l’avenir de la Côte d’Ivoire avec des militaires, de surcroît des rebelles. D’où le dialogue de sourd qui s’est installé à Lomé: d’un côté la délégation gouvernementale exige le dépôt des armes en échange d’une amnistie pour les mutins, et de l’autre les rebelles parlent tantôt du départ de Gbagbo, tantôt d’un «nouvel ordre politique» impliquant notamment la tenue d’élections générales anticipées.
Et pourtant, un véritable «projet d’accord» très détaillé a été mis au point dernièrement à Lomé, mais les rebelles continuent de refuser de le signer. C’est cet accord que Eyadéma a vraisemblablement décidé de faire parvenir aux «grands partis». Avec des résultats mitigés : le président du PDCI Henri Konan Bédié aurait adhéré à la proposition du président togolais, le président de la République Laurent Gbagbo (pour le FPI) n’aurait quant à lui pas fermé la porte, tandis que le président du RDR Alassane Ouattara - en exil à Libreville - n’aurait pas fait connaître sa réaction.
La confrontation continue entre Wade et Eyadéma
Mais la solution de la crise ivoirienne se heurte toujours aux querelles intestines qui opposent les principaux négociateurs de la CEDEAO, à savoir le Sénégal et le Togo. Mercredi, au moment même où Eyadéma avouait son incapacité à faire accepter un accord aux deux parties, le ministre sénégalais des Affaires étrangères Cheikh Tidiane Gadio jugeait « inacceptable » d’écarter son pays de la médiation ouest-africaine, alors que le Sénégal assure toujours la présidence de la CEDEAO et, surtout, est parvenu à imposer un cessez-le-feu qui n’a pas été remis en cause. Le Sénégal reproche notamment au Togo et au groupe de contact de la CEDEAO présidé par Eyadéma de n’avoir manifesté «aucune reconnaissance des efforts» du Sénégal. Plus grave, selon Gadio «les mutins ne comprennent pas que le Sénégal les ait convaincus de signer un accord de cessez-le-feu et d’engager le dialogue politique avec le gouvernement légal et constitutionnel du président Gbagbo, pour disparaître ensuite des radars, comme ils disent. Ils nous demandent de nous réimpliquer dans le dossier».
Face à cette nouvelle polémique, la CEDEAO n’a pu que constater l’impasse et renvoyer à plus tard la réunion du groupe de contact prévue pour ce week-end, qui doit normalement précéder un sommet de cette organisation régionale. Ce renvoi signifie aussi que la force-tampon de la CEDEAO qui doit remplacer l’armée française est elle-même dans l’incapacité de poursuivre sa mise en place, et semble désormais obligée de revoir sa propre composition comme sa stratégie. Car, entre temps, deux autres mouvements rebelles ont fait leur apparition, dans l’ouest du pays, en occupant Man et deux autres petites villes. Ce qui signifie que la CEDEAO devra désormais tenter d’obtenir un cessez-le-feu entre ces nouveaux rebelles «gueïstes» et les FANCI (Forces armées nationales), avant même de remplacer les soldats français sur les deux fronts.
Une tâche qui s’annonce plus que délicate, car les combats ne semblent pas terminés, notamment à Man, où les forces loyalistes ont certes marqué des points, selon une organisation humanitaire ; mais, selon des témoins, des dizaines de morts gisaient toujours dans les rues de la «capitale» du Grand Ouest, ce jeudi matin.
Enfin, la rencontre tant attendue entre Gbagbo et Compaoré, mardi dernier à Bamako, a finalement accouché une déclaration commune qui «condamne les tentatives de déstabilisation de la Côte d’Ivoire». Les deux frères-ennemis se sont engagés à «privilégier le dialogue», «à s’abstenir de tout acte d’agression et d’interdire l’utilisation de leurs territoires respectifs pour des actions de déstabilisation», et «à prendre des mesures appropriées pour la protection des ressortissants de chaque pays sur le territoire de l’autre, ainsi que la sauvegarde de leurs biens». Des engagements de principe qui ont l’air de satisfaire Abidjan, mais qui ne sont guère contraignants.
Le médiateur togolais tente visiblement de botter en touche une crise qui ne cesse de se compliquer. Lors de la visite éclair à Lomé du ministre français Dominique de Villepin, les rebelles ont été mis devant une évidence : le gouvernement de Laurent Gbagbo issu des urnes, mais aussi la CEDEAO et la France, ne pourront jamais accepter de discuter sur l’avenir de la Côte d’Ivoire avec des militaires, de surcroît des rebelles. D’où le dialogue de sourd qui s’est installé à Lomé: d’un côté la délégation gouvernementale exige le dépôt des armes en échange d’une amnistie pour les mutins, et de l’autre les rebelles parlent tantôt du départ de Gbagbo, tantôt d’un «nouvel ordre politique» impliquant notamment la tenue d’élections générales anticipées.
Et pourtant, un véritable «projet d’accord» très détaillé a été mis au point dernièrement à Lomé, mais les rebelles continuent de refuser de le signer. C’est cet accord que Eyadéma a vraisemblablement décidé de faire parvenir aux «grands partis». Avec des résultats mitigés : le président du PDCI Henri Konan Bédié aurait adhéré à la proposition du président togolais, le président de la République Laurent Gbagbo (pour le FPI) n’aurait quant à lui pas fermé la porte, tandis que le président du RDR Alassane Ouattara - en exil à Libreville - n’aurait pas fait connaître sa réaction.
La confrontation continue entre Wade et Eyadéma
Mais la solution de la crise ivoirienne se heurte toujours aux querelles intestines qui opposent les principaux négociateurs de la CEDEAO, à savoir le Sénégal et le Togo. Mercredi, au moment même où Eyadéma avouait son incapacité à faire accepter un accord aux deux parties, le ministre sénégalais des Affaires étrangères Cheikh Tidiane Gadio jugeait « inacceptable » d’écarter son pays de la médiation ouest-africaine, alors que le Sénégal assure toujours la présidence de la CEDEAO et, surtout, est parvenu à imposer un cessez-le-feu qui n’a pas été remis en cause. Le Sénégal reproche notamment au Togo et au groupe de contact de la CEDEAO présidé par Eyadéma de n’avoir manifesté «aucune reconnaissance des efforts» du Sénégal. Plus grave, selon Gadio «les mutins ne comprennent pas que le Sénégal les ait convaincus de signer un accord de cessez-le-feu et d’engager le dialogue politique avec le gouvernement légal et constitutionnel du président Gbagbo, pour disparaître ensuite des radars, comme ils disent. Ils nous demandent de nous réimpliquer dans le dossier».
Face à cette nouvelle polémique, la CEDEAO n’a pu que constater l’impasse et renvoyer à plus tard la réunion du groupe de contact prévue pour ce week-end, qui doit normalement précéder un sommet de cette organisation régionale. Ce renvoi signifie aussi que la force-tampon de la CEDEAO qui doit remplacer l’armée française est elle-même dans l’incapacité de poursuivre sa mise en place, et semble désormais obligée de revoir sa propre composition comme sa stratégie. Car, entre temps, deux autres mouvements rebelles ont fait leur apparition, dans l’ouest du pays, en occupant Man et deux autres petites villes. Ce qui signifie que la CEDEAO devra désormais tenter d’obtenir un cessez-le-feu entre ces nouveaux rebelles «gueïstes» et les FANCI (Forces armées nationales), avant même de remplacer les soldats français sur les deux fronts.
Une tâche qui s’annonce plus que délicate, car les combats ne semblent pas terminés, notamment à Man, où les forces loyalistes ont certes marqué des points, selon une organisation humanitaire ; mais, selon des témoins, des dizaines de morts gisaient toujours dans les rues de la «capitale» du Grand Ouest, ce jeudi matin.
Enfin, la rencontre tant attendue entre Gbagbo et Compaoré, mardi dernier à Bamako, a finalement accouché une déclaration commune qui «condamne les tentatives de déstabilisation de la Côte d’Ivoire». Les deux frères-ennemis se sont engagés à «privilégier le dialogue», «à s’abstenir de tout acte d’agression et d’interdire l’utilisation de leurs territoires respectifs pour des actions de déstabilisation», et «à prendre des mesures appropriées pour la protection des ressortissants de chaque pays sur le territoire de l’autre, ainsi que la sauvegarde de leurs biens». Des engagements de principe qui ont l’air de satisfaire Abidjan, mais qui ne sont guère contraignants.
par Elio Comarin
Article publié le 05/12/2002