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Madagascar

Elections pour un pays en quête de stabilité politique

Elections législatives, ce dimanche à Madagascar. Des élections anticipées, organisées pour clarifier l’échiquier politique après la grave crise du premier semestre 2002. Pour le nouveau régime du président Ravalomanana, il s’agit de confirmer et renforcer son assise.
De notre correspondant à Madagascar

Il y a un an, le 16 décembre 2001, les Malgaches se rendaient aux urnes pour élire leur président. Ce scrutin aux résultats contestés allait se transformer en grave crise politique durant le premier semestre 2002. Grâce à un très large soutien populaire, Marc Ravalomanana a réussi à accéder à la tête de l’Etat malgache, obligeant, de fait, le président sortant Didier Ratsiraka à l’exil.

Lors des différentes tentatives de médiation durant la crise, la communauté internationale, notamment l’Organisation de l’unité africaine (devenue depuis l’Union africaine), avait laissé entendre qu’il serait souhaitable d’organiser une nouvelle consultation populaire pour clarifier la situation, mettre en évidence les nouveaux rapports de force politique.

Cette demande des pays partenaires de Madagascar a été réitérée à plusieurs reprises. Si le nouveau régime a été reconnu par la communauté internationale, il ne reste que l’Union africaine qui tarde à officialiser cette reconnaissance. Ce qui devrait intervenir justement à l’issue de cette consultation populaire. Marc Ravalomanana s’est donc plié à ce que certains, dans son camp, considèrent comme une exigence des bailleurs de fonds : l’organisation d’élections… des élections législatives anticipées.

«On en a marre des politiciens d’avant»

«D’après moi, le peuple attend beaucoup de ces élections, explique une mère de famille dans la capitale. Avec le nouveau président, on connaît une ère nouvelle, alors, je voudrais que ça continue». La crise politique du premier semestre a mis en évidence la soif de changement de la population. Volonté d’un renouveau de la vie politique, fondée sur davantage de transparence et d’honnêteté. «On en a marre du blabla des politiciens d’avant», déclare un vieil homme. Une passante ajoute : «maintenant, j’espère que les députés, pour les 5 prochaines années, c’est la pensée du peuple qu’ils vont emmener à l’assemblée».

Marc Ravalomanana a réussi à incarner l’aspiration populaire à la tête de l’Etat. Reste qu’il lui manque une majorité à l’Assemblée nationale pour mettre réellement en œuvre sa politique de «développement rapide et durable de Madagascar».

L’union sacrée des citoyens et des partis politiques rassemblés durant la crise derrière Marc Ravalomanana, s’est fissurée. A l’approche des élections législatives, les querelles de partis ont resurgi même au sein de la mouvance présidentielle. Dans le paysage politique, une nouvelle formation a vu le jour, Tiako i Madagasikara (TIM), émanation de l’association populaire qui avait soutenu Marc Ravalomanana dans son accession au pouvoir. Ce parti est donné largement favori pour le scrutin. «On a le vent en poupe, explique Didier Rakotoarisoa, porte-parole de Tiako i Madagasikara. L’objectif pour nous est d’avoir la majorité à l’Assemblée nationale, afin qu’il y ait une assise totale pour le pouvoir du président et pour le régime actuel». Dans plusieurs des 160 circonscriptions, le TIM s’est allié avec d’autres partis de la mouvance présidentielle. Ensemble, ces formations ont été les plus actives et les plus visibles durant la campagne électorale.

En face, l’opposition est réduite à une portion congrue. L’ancien parti au pouvoir, l’AREMA, s’est disloqué. Son secrétaire national, Pierrot Rajaonarivelo, est en exil en France. Avec les cadres du parti et quelques personnalités politiques comme l’ancien président Albert Zafy, il appelle depuis des semaines au report de ces élections qu’il juge «inopportunes» en raison «des arrestations et des intimidations» dont l’opposition se dit être victime. Et de réclamer avant tout, une conférence de réconciliation nationale. Toujours est-il qu’une branche de l’AREMA a choisi de se présenter aux législatives.

Au total, 1312 candidats sont en lice, pour 160 sièges de députés. Pour la première fois, des observateurs internationaux, notamment européens, sont déployés pour suivre le déroulement des opérations. Ils viennent renforcer les observateurs malgaches. Autre innovation pour donner davantage de crédibilité au vote : l’utilisation d’urnes transparentes. Malgré tout, les citoyens ne manifestent pas beaucoup d’enthousiasme, à l’image de la campagne électorale, plutôt terne, sans réels débats d’idées, sans grands programmes au sein des partis. La population, en ville comme à la campagne, semble davantage préoccupée par les difficultés socio-économiques qui persistent. Les opérateurs économiques, avant de réinvestir à Madagascar, ne demandent qu’un retour à la stabilité politique, garante d’un environnement serein pour les affaires. Quant à la communauté internationale, elle suit de près le processus électoral, soucieuse que la Grande Ile tourne définitivement la page de la période tourmentée de ces derniers mois.



par Olivier  Péguy

Article publié le 14/12/2002