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Kenya

Al-Qaïda promet d’autres «<i>attaques plus graves</i>»

Une fois n’est pas coutume, al-Qaïda, le réseau d’Oussama ben Laden, a ouvertement revendiqué les attaques terroristes de Mombasa, dirigées pour la première fois contre des intérêts israéliens. Souleiman Abou Ghaïth, le porte-parole officiel de l’organisation terroriste, a en effet non seulement affirmé que les deux opérations du Kenya était «l’œuvre d’al-Qaïda», mais également précisé que «la prochaine étape sera plus grande et plus grave». Ce changement de stratégie de communication de la nébuleuse islamiste, qui s’était jusqu’à présent bien gardée de revendiquer directement des attaques terroristes, incite a penser, comme l’a d’ailleurs souligné Souleiman Abou Ghaïth, que l’organisation se trouve actuellement «dans des circonstances meilleures».
Depuis la revendication dimanche par l’organisation d’Oussama ben Laden des attaques terroristes de Mombasa, l’armée et la police kenyanes sont en état d’alerte maximale. Il est vrai que les termes utilisés par Souleiman Abou Ghaïth, dans un enregistrement sonore diffusé dimanche par un site islamiste, encouragent à la prudence. Le porte-parole officiel d’al-Qaïda affirme en effet qu’«il faut utiliser l’arme de l’épouvante contre l’ennemi en menant des opérations éclair et précises partout dans le monde pour qu’il sente le danger, l’insécurité et l’instabilité sur terre, sur mer et dans les airs». «Si Dieu le veut, l'alliance judéo-croisée, où qu'elle se trouve, ne sera plus désormais à l'abri des attaques des Moudjahidine», a-t-il également prévenu sur un ton lourd de menaces, en prédisant que son mouvement allait bientôt «frapper ses articulations essentielles et ses projets stratégiques par tous les moyens» en sa possession. Après deux attentats meurtriers sur son sol –en 1998 contre l’ambassade des Etats-Unis et récemment contre un hôtel appartenant à un groupe financier israélien–, Nairobi avait donc tout lieu de s’inquiéter.

Les récents développements de l’enquête tendent, en outre, à accréditer la thèse de l’implication de cellules islamistes, qui pourraient être liées au réseau du milliardaire saoudien. Treize suspects sont ainsi toujours détenus et interrogés par la police kenyane. Parmi eux se trouvent quatre Somaliens et six Pakistanais détenteurs de passeports somaliens. Ils étaient arrivés au Kenya le 25 novembre dernier, soit trois jours avant les attaques de Mombassa, à bord d’un boutre en provenance de la Somalie voisine. Les enquêteurs, qui ont réussi à retrouver rapidement les lance-missiles qui avaient servi à l’attaque manquée contre le charter israélien, affirment en outre qu’ils étaient peints en bleu vif, d’une «couleur similaire à elle qui recouvrait le fond du bateau» des suspects. Des échantillons de peinture sont toutefois en cours d’analyse et le rapprochement éventuel entre les deux matériaux n’a toujours pas été opéré. La police kenyane a par ailleurs largement diffusé les portraits-robots de deux suspects impliqués, selon elle, dans l’attaque aux missiles contre l’avion israélien, les trois kamikazes à l’origine de l’attentat à la voiture piégée contre l’hôtel Paradise étant morts sur le coup.

Al-Qaïda change de stratégie de communication

«La nature de notre action nous a interdit dans la phase précédente de revendiquer nos opérations de Jihad contre l'alliance croisée, mais nous nous trouvons aujourd'hui dans des circonstances meilleures nous permettant de le faire». Simple propagande ou menaces réelles ? Dans tous les cas, les paroles de Souleiman Abou Ghaïth sonnent comme l’annonce d’un renouveau pour le réseau terroriste d’Oussama ben Laden. Il apparaît en effet aujourd’hui plus structuré et plus formel depuis sa fusion annoncée avec le Jihad islamique de l’Egyptien Ayman al-Zawahri, un des principaux suspects dans les attentats du 11 septembre. Souleiman Abou Ghaïth s’est en effet exprimé au nom du «bureau politique d’al-Qaïda-Jihad», une structure semble-t-il nouvellement mise en place qui pourrait s’apparenter à une sorte d’état-major général du terrorisme islamiste international. Le porte-parole a d’ailleurs affirmé dans l’enregistrement diffusé qu’il était désormais erroné de «confiner le djihad à une seule organisation» et a appelé «les hommes de l'Oumma -la communauté musulmane-, les prédicateurs, les penseurs, les commerçants, les jeunes et toutes les autres composantes de la société» à «se préparer pour la prochaine étape qui sera la plus dangereuse et la plus importante».

Outre le besoin d’affirmer qu’il est toujours opérationnel, le réseau d’Oussama ben Laden semble donc décidé à s’imposer comme la référence pour toutes les cellules islamistes dormantes à travers le monde. Sa nouvelle stratégie de communication semble en outre accréditer le fait qu’il veuille se rallier l’opinion arabe au sujet de «la guerre contre le terrorisme» menée par George Bush. Souleiman Abou Ghaïth a en effet évoqué pour la première fois le dossier irakien lors de sa revendication des attentats de Monbassa. «Ce que les Etats-Unis et leurs alliés préparent contre l'Irak et son peuple ne se limite pas au renversement d'un régime apostat et oppressif», a-t-il notamment affirmé en précisant que l’objectif de Washington se résumait surtout «à diviser ce grand pays, à piller ses ressources et à occuper une position vitale dans le monde arabe qui lui permettra de protéger directement les occupants juifs (de la Palestine) qui pourront ainsi bâtir leur grand Etat, s'étendant du Nil à l'Euphrate». Une menace contre laquelle il a appelé la Oumma (nation) islamique à se battre.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 09/12/2002