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Attentats

La France a peut-être évité une attaque biochimique

L’arrestation, dans la banlieue parisienne, de quatre islamistes présumés soupçonnés de préparer un attentat à l’arme biochimique, vient rappeler que le risque terroriste est toujours aussi présent. L’offensive menée depuis les attentats du 11 septembre et le renforcement des dispositifs de surveillance dans les pays occidentaux ont permis, selon les Etats-Unis, «de capturer ou de tuer un tiers des dirigeants d’Al Qaïda» identifiés avant les attentats contre New York et Washington. Malgré ces résultats, le réseau d’Oussama Ben Laden possède encore, aux quatre coins de la planète, de nombreuses cellules dormantes prêtes à être réactivées et à tuer.
Le matériel retrouvé dans l’appartement de la cité des 4000 de la Courneuve où résidaient, sous de fausses identités, les quatre personnes arrêtées lundi par la police française, n’était certainement pas là par hasard. Deux bonbonnes de butanes de 13 kilos vides, deux flacons contenant des substances liquides et solides suspectes, une combinaison de protection contre les risques nucléaire, chimique, bactériologique, un ordinateur, de la documentation islamiste, 5000 dollars et 20 000 euros en liquides, à quoi tout cela pouvait-il servir si ce n’est à préparer un attentat ?

Le contenu de deux flacons est d’ailleurs en cours d’analyse dans le laboratoire militaire spécialisé du Bouchet dans l’Essonne pour vérifier notamment si l’un d’eux contient bien du perchlorure de fer comme cela était indiqué sur une étiquette. Cette substance, en vente libre, n’en est pas moins dangereuse. Elle peut, en effet, si elle est mélangée à du mercure, devenir un produit particulièrement toxique pour les individus qui l’ingéreraient ou l’inhaleraient. Elle peut aussi permettre d’amplifier une explosion.

Le curriculum vitae des personnes interpellées renforce l’hypothèse de la préparation d’un acte terroriste. Parmi elles, figure Mirouane Ben Ahmed, un Franco-Alégrien de 29 ans, lié au groupe dit de «Francfort», démantelé alors qu’il préparait un attentat contre la cathédrale de Strasbourg en 2000. Cet homme, déjà bien connu des services de renseignement, a suivi toutes les étapes de formation d’un militant d’Al Qaïda, séjour en Afghanistan et formation religieuse compris. Il a aussi été en relation avec des responsables islamistes en Europe, comme l’Algérien Rabah Kadri, alias «Toufik», récemment interpellé à Londres alors qu’il projetait, selon la presse britannique, de perpétrer un attentat au cyanure dans le métro. Les trois autres personnes arrêtées sont un Algérien, un Marocain et la femme de Ben Ahmed.

Al Qaïda disposerait encore de 10 000 agents

Ce coup de filet des services de la Direction de la sécurité intérieure (DST) a eu lieu dans le cadre d’une information judiciaire ouverte, le 13 novembre, par le juge anti-terroriste Jean-Louis Bruguière sur les filières islamistes tchétchènes. Ben Ahmed et ses complices présumés étaient sous surveillance depuis plusieurs semaines. Leur garde à vue est prolongée jusqu’à jeudi, au terme du délai légal dans les affaires liées au terrorisme.

Depuis quelques mois, la police française a procédé à plusieurs interpellations de terroristes présumés, notamment dans le cadre des suites de l’enquête sur l’attentat contre la synagogue de Djerba. Pour le ministre de la Justice, Dominique Perben, ces opérations «déstabilisent» les réseaux terroristes installés sur le territoire national. Mais elles montrent aussi que malgré tous les efforts, un certain nombre de terroristes sont toujours opérationnels.

Le constat est le même dans les autres pays européens. En Grande-Bretagne, ce mercredi, la police a encore procédé à sept interpellations, trois à Edimbourg et quatre à Londres. Dans ce pays, principal allié des Etats-Unis dans la lutte contre le terrorisme, les autorités ont admis que l’alerte était maintenue à un niveau «élevé». En Italie, Silvio Berlusconi, le président du conseil, a déclaré que 116 arrestations avaient été réalisées depuis le 11 septembre 2001 mais que le risque terroriste était en train «de grimper dangereusement».

Le rapport, publié mardi, par la commission de surveillance sur le terrorisme mise en place par le conseil de sécurité des Nations unies après le 11 septembre, va dans le même sens. Les cinq experts internationaux qui l’ont rédigé estiment que l’organisation Al Qaïda dispose encore de 10 000 agents dispersés dans le monde et constitue une menace «substantielle». D’autant plus qu’il semble que les camps d’entraînement de l’organisation d’Oussama Ben Laden, en Afghanistan, dans lesquels avaient notamment transité les terroristes qui ont participé aux attentats du 11 septembre, sont en train de se reconstituer dans l’Est du pays. D’autre part, la commission met l’accent sur le fait qu’Al Qaïda semble avoir changé de tactique comme l’ont montré les attentats de Bali et de Mombasa. «Des cibles faciles, de préférence avec un nombre maximum de victimes, semblent être désormais à l’ordre du jour».

Ecouter également
Gilles Perez, journaliste à RFI au micro de Philippe Cergel, 18/12/2002, 6'22



par Valérie  Gas

Article publié le 18/12/2002