Yémen
Les Scuds étaient destinés au Yémen
La marine espagnole, appuyée par l’US Navy, a arraisonné au large du Yémen un navire qui transportait des missiles Scud en provenance de Corée du Nord. Le Yémen a protesté après l’arraisonnement de cette cargaison qui lui était destinée.
Les quinze missiles étaient dissimulés sous une cargaison de 40 000 sacs de ciment, dans un navire marchant croisant en mer d’Oman, au large des côtes yéménites. Lundi, deux frégates espagnoles ont intercepté le So San, avec l’appui des forces navales américaines, en patrouille dans cette partie de l’Océan indien dans le cadre de l’opération «Liberté immuable», lancée par les États-Unis contre le terrorisme.
Le bâtiment, qui naviguait sans pavillon permettant d’identifier sa nationalité, est immatriculé à Phnom Penh et son équipage est nord-coréen. Sous les sacs de ciments, répartis entre 23 conteneurs, les marins espagnols ont découvert les quinze missiles entreposés, séparés de leurs ogives.
Le So San, à l’évidence, n’a pas été arraisonné au hasard pour défaut de pavillon. Tout semble indiquer que les services américains l’ont suivi à la trace depuis son appareillage dans un port nord-coréen et c’est à l’approche des côtes yéménites que la décision aurait été prise d’interrompre son périple.
L’origine paraît donc ne pas faire de doute : la Corée du Nord, ce qui ne va pas contribuer à détendre les relations entre les États-Unis et ce pays que George Bush a classé parmi les membres de l’«axe du mal», aux côtés de l’Iran et de l’Irak. La Corée du Nord est en effet l’un des pays qui produisent ce missile, d'origine soviétique, et baptisé Scud par la nomenclature de l’OTAN. La version coréenne du Scud s’appelle le Hwasong et son exportation est l’une des rares sources de devises de la Corée du nord, qui en a déjà vendu à plusieurs pays du Moyen-Orient, notamment l’Iran et le Yémen.
Le Scud est un missile balistique, c’est-à-dire suivant une trajectoire hyperbolique fonction de sa vitesse, de son cap et de son poids, et donc assez imprécis puisqu’il n’est pas guidé. Si sa charge utile n’est pas trop lourde, il a une portée assez longue, de 500 à 800 kilomètres, ce qui en fait avait tout une arme de terreur psychologique contre les populations civiles, ainsi qu’on l’a vu en 1984 lors de la guerre des villes entre l’Iran et l’Irak, ou en 1914 lorsque ce dernier a tiré quelques Scuds contre Tel Aviv et Ryad.
Un incompréhensible impair
Le Yémen, après avoir observé le mutisme de longues heures après que la nouvelle eut été annoncée mardi soir par le Pentagone, a protesté contre l’arraisonnement du navire et de sa cargaison qui «lui appartenait». Le Yémen, qui possède des Scud et qui lors de la guerre civile de 1994 en a d’ailleurs fait usage contre les forces séparatistes, était à la recherche de pièces de rechange. En août dernier, le président yéménite, Ali Abdallah Saleh, avait évoqué une commande à la Corée du Nord. Le gouvernement Bush avait d’ailleurs pris des sanctions contre Pyongyang, notamment parce que cette dernière avait vendu des pièces de Scud au Yémen.
La protestation officielle du gouvernement de Sanaa a donc fait tomber d’autres hypothèses qui circulaient depuis que mardi soir, le Pentagone a révélé la capture du So San. On évoquait notamment la possibilité que ces missiles soient destinés aux partisans d’Oussama Ben Laden, soit au Yémen, soit en Somalie. Dans les deux hypothèses, la signification aurait été considérable quant au degré d’équipement et à la logistique d’Al Qaïda, ainsi qu’à la menace que cette dernière aurait été en mesure de faire peser soit sur la base de Djibouti ou les villes saoudiennes riveraines de la Mer Rouge, soit sur d’autres villes d’Arabie Saoudite ou les émirats du golfe arabo-persique. Cette éventualité étant abandonnée, tous les mystères n’en ont pas disparu pour autant. Pourquoi le Yémen a-t-il besoin, aujourd’hui, de missiles à longue portée et contre quelle menace entend-t-il se prémunir ? Pourquoi, surtout, se les faire livrer clandestinement à un moment où toute la région, et le Yémen en particulier, sont sous haute surveillance de la part des États-Unis, tout particulièrement depuis l’attentat contre le pétrolier français au large du port yéménite de Mukalla en octobre dernier, et ainsi que l’a montré l’assassinat d’un responsable d’Al Qaïda, tué en novembre par un missile lancé par un drone, un avion sans pilote parti de Djibouti et télécommandé depuis le siège de la CIA près de Washington.
Le président Ali Abdallah Saleh, qui après le 11 septembre 2001, avait tenté de coller au plus près des États-Unis et dont George W. Bush a plusieurs fois vanté le rôle dans la lutte contre le terrorisme ne pouvait certainement pas imaginer berner les services américains d’une façon aussi grossière. Certes, comme beaucoup d’autres alliés des États-Unis, anciens ou récents, le Yémen avait témoigné d’une déception croissante devant la politique américaine au Proche-Orient et vis-à-vis de l’Irak. Mais sachant parfaitement que son pays était placé par les faucons du Pentagone et de la Maison-Blanche parmi ceux qui devaient être les prochaines cibles, après l’Irak, dans la guerre contre le terrorisme, le président yéménite avait toutes les raisons de ne pas commettre cet impair.
Le bâtiment, qui naviguait sans pavillon permettant d’identifier sa nationalité, est immatriculé à Phnom Penh et son équipage est nord-coréen. Sous les sacs de ciments, répartis entre 23 conteneurs, les marins espagnols ont découvert les quinze missiles entreposés, séparés de leurs ogives.
Le So San, à l’évidence, n’a pas été arraisonné au hasard pour défaut de pavillon. Tout semble indiquer que les services américains l’ont suivi à la trace depuis son appareillage dans un port nord-coréen et c’est à l’approche des côtes yéménites que la décision aurait été prise d’interrompre son périple.
L’origine paraît donc ne pas faire de doute : la Corée du Nord, ce qui ne va pas contribuer à détendre les relations entre les États-Unis et ce pays que George Bush a classé parmi les membres de l’«axe du mal», aux côtés de l’Iran et de l’Irak. La Corée du Nord est en effet l’un des pays qui produisent ce missile, d'origine soviétique, et baptisé Scud par la nomenclature de l’OTAN. La version coréenne du Scud s’appelle le Hwasong et son exportation est l’une des rares sources de devises de la Corée du nord, qui en a déjà vendu à plusieurs pays du Moyen-Orient, notamment l’Iran et le Yémen.
Le Scud est un missile balistique, c’est-à-dire suivant une trajectoire hyperbolique fonction de sa vitesse, de son cap et de son poids, et donc assez imprécis puisqu’il n’est pas guidé. Si sa charge utile n’est pas trop lourde, il a une portée assez longue, de 500 à 800 kilomètres, ce qui en fait avait tout une arme de terreur psychologique contre les populations civiles, ainsi qu’on l’a vu en 1984 lors de la guerre des villes entre l’Iran et l’Irak, ou en 1914 lorsque ce dernier a tiré quelques Scuds contre Tel Aviv et Ryad.
Un incompréhensible impair
Le Yémen, après avoir observé le mutisme de longues heures après que la nouvelle eut été annoncée mardi soir par le Pentagone, a protesté contre l’arraisonnement du navire et de sa cargaison qui «lui appartenait». Le Yémen, qui possède des Scud et qui lors de la guerre civile de 1994 en a d’ailleurs fait usage contre les forces séparatistes, était à la recherche de pièces de rechange. En août dernier, le président yéménite, Ali Abdallah Saleh, avait évoqué une commande à la Corée du Nord. Le gouvernement Bush avait d’ailleurs pris des sanctions contre Pyongyang, notamment parce que cette dernière avait vendu des pièces de Scud au Yémen.
La protestation officielle du gouvernement de Sanaa a donc fait tomber d’autres hypothèses qui circulaient depuis que mardi soir, le Pentagone a révélé la capture du So San. On évoquait notamment la possibilité que ces missiles soient destinés aux partisans d’Oussama Ben Laden, soit au Yémen, soit en Somalie. Dans les deux hypothèses, la signification aurait été considérable quant au degré d’équipement et à la logistique d’Al Qaïda, ainsi qu’à la menace que cette dernière aurait été en mesure de faire peser soit sur la base de Djibouti ou les villes saoudiennes riveraines de la Mer Rouge, soit sur d’autres villes d’Arabie Saoudite ou les émirats du golfe arabo-persique. Cette éventualité étant abandonnée, tous les mystères n’en ont pas disparu pour autant. Pourquoi le Yémen a-t-il besoin, aujourd’hui, de missiles à longue portée et contre quelle menace entend-t-il se prémunir ? Pourquoi, surtout, se les faire livrer clandestinement à un moment où toute la région, et le Yémen en particulier, sont sous haute surveillance de la part des États-Unis, tout particulièrement depuis l’attentat contre le pétrolier français au large du port yéménite de Mukalla en octobre dernier, et ainsi que l’a montré l’assassinat d’un responsable d’Al Qaïda, tué en novembre par un missile lancé par un drone, un avion sans pilote parti de Djibouti et télécommandé depuis le siège de la CIA près de Washington.
Le président Ali Abdallah Saleh, qui après le 11 septembre 2001, avait tenté de coller au plus près des États-Unis et dont George W. Bush a plusieurs fois vanté le rôle dans la lutte contre le terrorisme ne pouvait certainement pas imaginer berner les services américains d’une façon aussi grossière. Certes, comme beaucoup d’autres alliés des États-Unis, anciens ou récents, le Yémen avait témoigné d’une déception croissante devant la politique américaine au Proche-Orient et vis-à-vis de l’Irak. Mais sachant parfaitement que son pays était placé par les faucons du Pentagone et de la Maison-Blanche parmi ceux qui devaient être les prochaines cibles, après l’Irak, dans la guerre contre le terrorisme, le président yéménite avait toutes les raisons de ne pas commettre cet impair.
par Olivier Da Lage
Article publié le 11/12/2002