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Irak

Saddam invite la CIA à Bagdad

En proposant à Washington de dépêcher auprès des experts en désarmement de l’ONU des agents de la CIA pour les épauler dans leurs inspections, Bagdad cherche à montrer son entière disposition à coopérer avec la communauté internationale. Il cherche surtout à contrer la vague d’accusations qui s’est abattue sur le régime irakien à la suite de la remise au Conseil de sécurité de l’ONU de la déclaration sur son programme d’armes de destruction massive. Washington et Londres avaient dénoncé une «violation patente» de la résolution 1441 des Nations unies tandis que Paris évoquaient des «zones d’ombre». Depuis Bagdad cherche à montrer qu’il est un bon élève et a promis pour la fin du mois de décembre de remettre aux inspecteurs la liste de ses scientifiques qui ont travaillé dans les programmes d’armement.
Coup de bluff ou volonté affichée de coopérer avec la communauté internationale ? L’invitation lancée par le général Amer al-Saadi, le responsable du dossier de l’armement irakien, aux agents de la CIA pour qu’ils viennent sur place renforcer le travail des inspecteurs de l’ONU est en tous les cas une opération de communication très réussie. «L’Irak, a assuré ce proche conseiller de Saddam Hussein, n’a pas d’objection à ce que les services de renseignement américains viennent pour indiquer aux experts des Nations unies les sites qu’ils devraient inspecter», preuve s’il en fallait encore pour lui que le régime de Bagdad n’a rien à cacher. Le général irakien a d’ailleurs souligné qu’«après 24 jours d’inspections qui ont couvert pratiquement tous les sites suspects, les mensonges et allégations de Washington et Londres ont été mis en évidence». Il a une nouvelle fois assuré que son pays était disposé à donner des réponses à toutes les questions estimées «en suspens» mais il a toutefois précisé que les autorités irakiennes n’avaient plus «aucune documentation à fournir sur l’état de leur armement».

La proposition de Bagdad n’a paradoxalement pas enchanté les inspecteurs de l’ONU, dont le chef, Hans Blix, exaspéré, avait pourtant vivement critiqué le manque de renseignements fournis par Londres et Washington. Hiro Ueki, le porte-parole de la Cocovinu, la Commission de contrôle, de vérification et d’inspection des Nations unies, a en effet écarté la possibilité que des membres des services de renseignements américains se joignent aux équipes de l’ONU en Irak pour leur désigner des sites qui seraient suspects selon Washington. Il a notamment fait valoir que le mandat des inspecteurs ne prévoyait pas une telle collaboration. «Nous avons, a-t-il souligné, un mandat très clair du Conseil de sécurité et je ne pense pas que nous allons nous en écarter en ce qui concerne la composition des équipes». Les Etats-Unis, pour leur part, semblaient plutôt gênés des déclarations du général al-Saadi. Interrogé sur la proposition irakienne, le porte-parole du département d'Etat, Philip Reeker, n'a pas répondu directement mais a insisté sur le fait «qu'il y a un mécanisme déjà en place, au travers des Nations unies» et que Washington le soutenait.

Bagdad fournira la liste de ses scientifiques avant fin décembre

Concernant l’audition de ses scientifiques, Bagdad, qui semble là aussi vouloir jouer jusqu’au bout le rôle de bon élève, affirme être entièrement disposé à coopérer avec les inspecteurs de l’ONU. Le responsable de l’armement irakien Amer al-Saadi a ainsi confirmé que l’Irak allait accéder, avant la fin de l’année, à la demande officielle de Hans Blix requérant la liste de ses scientifiques ayant travaillé sur ses programmes d’armements chimiques et biologiques. Washington souhaite que l’ONU interroge ces experts hors de leur pays. L’administration américaine estime en effet que ces derniers seraient plus libres de s’exprimer s’ils ou leurs familles n’étaient pas soumis aux pressions des autorités irakiennes.

Jusque-là, Hans Blix, ne voulant pas prendre le risque de mettre en péril la vie d’éventuels témoins, n’a pas tenu à recourir à cette méthode. «Si les scientifiques refusent de quitter le pays, nous ne pouvons pas les y forcer», a-t-il notamment estimé. Mais même sur l’idée de faire interroger ses experts à l’étranger, Bagdad semble prêt à coopérer. Le général al-Saadi, qui a certes estimé que cette proposition lui semblait «compliquée» à satisfaire, a toutefois estimé que les difficultés seront surmontées si les inspecteurs de l’ONU en font la demande.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 24/12/2002