Proche-Orient
Des dirigeants arabes israéliens privés d’élection
La commission électorale israélienne a interdit à deux députés arabes, Ahmed Tibi et Azmi Bichara, de se présenter aux élections législatives du 28 janvier.
La décision, prise avec trois voix d’écart, est sans précédent et Israël n’a sans doute pas fini d’en mesurer les conséquences: par 22 voix contre 19, la commission électorale israélienne, chargée de valider les candidatures aux élections législatives anticipées du 28 janvier prochain, a interdit au parti arabe Balad et à son leader charismatique, le député Azmi Bichara, de se présenter aux suffrages lors du prochain scrutin. Cette décision intervient deux jours après l’interdiction faite à un autre député arabe, Ahmed Tibi, de se représenter.
Dans les deux cas, la commission invoque un amendement à la loi électorale, voté voici quelques mois, permettant d’interdire les listes qui remettent en cause le caractère «juif et démocratique du pays». Il est reproché au docteur Ahmed Tibi d’apporter son «soutien aux organisations terroristes qui commettent des attentats anti-israéliens», ce que dément vivement l’intéressé. En revanche, ce gynécologue de 44 ans, alors même qu’il siégeait au parlement, a été le conseiller de Yasser Arafat dans ses relations avec Israël pendant près de six ans et il avait joué un important rôle d’intermédiaire entre Palestiniens et Israéliens avant et après la signature des accords d’Oslo.
L’autre cas est plus emblématique encore. Azmi Bichara est déjà poursuivi par la justice israéliennes pour des propos tenus en Syrie en faveur de la «résistance populaire contre l’occupation israélienne». C’est à la demande du procureur de l’État, Eliakim Rubinstein, mais contre celui du président de la Commission, Michael Heshin, que la candidature de Bichara a été rejetée. Bichara est une figure atypique dans le monde politique israélien. Contrairement aux autres partis arabes, qui incarnent un vote essentiellement protestataire, celui d’Azmi Bichara, Balad, joue sur le nationalisme arabe autant que sur les contradictions du système israélien. C’est ainsi qu’en 1997, il s’était présenté au suffrage universel pour le poste de premier ministre d’Israël. La démonstration qu’il tente inlassablement de poursuivre est que contrairement à ses affirmations, l’État d’Israël n’est pas démocratique, puisque la nature essentiellement juive de l’État fait des citoyens arabes d’Israël des citoyens de seconde zone.
Une cassure qui apparaît irrémédiable
C’est du reste ce qui inquiète profondément de larges secteurs du monde politique israélien qui font valoir que cette interdiction apporte précisément de l’eau au moulin des thèses de Bichara et offre aux yeux du monde l’image de la discrimination à l’encontre des Arabes. La décision est d’autant plus choquante aux yeux de beaucoup que cette même Commission, dominée par la droite dure, a en revanche validé la candidature de l’ex-porte-parole du mouvement raciste anti-arabe Kach, Baruch Marzel qui figure en seconde place sur la liste du Herout, un parti d’extrême-droite.
Les Arabes israéliens, qui représentent 18% de la population, se considèrent déjà comme étant soumis à la discrimination. Naguère, ils étaient nombreux à apporter leurs voix aux travaillistes, mais la répression sanglante des manifestations en octobre 2000, qui ont fait 13 morts alors que Barak était Premier ministre et Shlomo Ben-Ami ministre de la Sécurité a constitué une cassure qui paraît aujourd’hui irrémédiable. Si désormais la communauté arabe d’Israël est privée d’expression politique légale, nombreux sont les observateurs qui redoutent qu’elle ne se contente pas de se réfugier dans l’abstention et qu’on assiste à l’apparition de tensions violentes entre juifs et Arabes d’Israël, à un moment où l’effondrement du processus de paix a renforcé le sentiment de solidarité des Arabes Israéliens à l’égard de leurs frères Palestiniens dont ils ont été séparés en 1948.
Ahmed Tibi et Azmi Bichara ont jusqu’au 9 janvier pour former un recours devant la Cour suprême.
Dans les deux cas, la commission invoque un amendement à la loi électorale, voté voici quelques mois, permettant d’interdire les listes qui remettent en cause le caractère «juif et démocratique du pays». Il est reproché au docteur Ahmed Tibi d’apporter son «soutien aux organisations terroristes qui commettent des attentats anti-israéliens», ce que dément vivement l’intéressé. En revanche, ce gynécologue de 44 ans, alors même qu’il siégeait au parlement, a été le conseiller de Yasser Arafat dans ses relations avec Israël pendant près de six ans et il avait joué un important rôle d’intermédiaire entre Palestiniens et Israéliens avant et après la signature des accords d’Oslo.
L’autre cas est plus emblématique encore. Azmi Bichara est déjà poursuivi par la justice israéliennes pour des propos tenus en Syrie en faveur de la «résistance populaire contre l’occupation israélienne». C’est à la demande du procureur de l’État, Eliakim Rubinstein, mais contre celui du président de la Commission, Michael Heshin, que la candidature de Bichara a été rejetée. Bichara est une figure atypique dans le monde politique israélien. Contrairement aux autres partis arabes, qui incarnent un vote essentiellement protestataire, celui d’Azmi Bichara, Balad, joue sur le nationalisme arabe autant que sur les contradictions du système israélien. C’est ainsi qu’en 1997, il s’était présenté au suffrage universel pour le poste de premier ministre d’Israël. La démonstration qu’il tente inlassablement de poursuivre est que contrairement à ses affirmations, l’État d’Israël n’est pas démocratique, puisque la nature essentiellement juive de l’État fait des citoyens arabes d’Israël des citoyens de seconde zone.
Une cassure qui apparaît irrémédiable
C’est du reste ce qui inquiète profondément de larges secteurs du monde politique israélien qui font valoir que cette interdiction apporte précisément de l’eau au moulin des thèses de Bichara et offre aux yeux du monde l’image de la discrimination à l’encontre des Arabes. La décision est d’autant plus choquante aux yeux de beaucoup que cette même Commission, dominée par la droite dure, a en revanche validé la candidature de l’ex-porte-parole du mouvement raciste anti-arabe Kach, Baruch Marzel qui figure en seconde place sur la liste du Herout, un parti d’extrême-droite.
Les Arabes israéliens, qui représentent 18% de la population, se considèrent déjà comme étant soumis à la discrimination. Naguère, ils étaient nombreux à apporter leurs voix aux travaillistes, mais la répression sanglante des manifestations en octobre 2000, qui ont fait 13 morts alors que Barak était Premier ministre et Shlomo Ben-Ami ministre de la Sécurité a constitué une cassure qui paraît aujourd’hui irrémédiable. Si désormais la communauté arabe d’Israël est privée d’expression politique légale, nombreux sont les observateurs qui redoutent qu’elle ne se contente pas de se réfugier dans l’abstention et qu’on assiste à l’apparition de tensions violentes entre juifs et Arabes d’Israël, à un moment où l’effondrement du processus de paix a renforcé le sentiment de solidarité des Arabes Israéliens à l’égard de leurs frères Palestiniens dont ils ont été séparés en 1948.
Ahmed Tibi et Azmi Bichara ont jusqu’au 9 janvier pour former un recours devant la Cour suprême.
par Olivier Da Lage
Article publié le 01/01/2003